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Relance de l’immobilier : Les quatre vérités du promoteur Raymond Le Roy Liberge, président des Provinces

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Le point de vue du président du groupe Immobilier Les Povinces sur les dernières annonces du gouvernement.

photo : Raymond Le Roy Liberge, président du groupe Les Provinces

Le point de vue du président du groupe Immobilier Les Povinces revient sur les dernières annonces du gouvernement.

Il faut rendre justice au Gouvernement et au Président de la République : ils ne négligent pas la question du logement et elle obsède même les discours publics depuis l’accession au pouvoir de la nouvelle majorité. On ne peut que saluer la décision annoncée le 14 juin par le Président de la République de baisser le taux de TVA sur la construction de logements intermédiaires de 19,6 % à 10 %, après que le logement HLM a profité d’un geste dans le même sens il y a quelques semaines. On doit aussi rendre justice au Chef de l’Etat d’être revenu sur l’erreur manifeste de son prédécesseur, en allégeant la taxation des plus-values de cession sur les résidences secondaires et les biens locatifs. Pourtant, les décisions prises ou annoncées passent à côté de l’essentiel et ne libèrent ni les envies d’investir ni l’énergie des constructeurs.

Encore les professionnels sont-ils rompus à l’exercice, et il leur faut faire bon cœur contre mauvaise fortune pour continuer à produire, nonobstant les embarras règlementaires puisque c’est leur fonction sociale. Il n’en va pas de même des ménages : une vocation d’accédant ou d’investisseur, quel que soit le support, immobilier en direct ou parts de SCPI, une vocation patrimoniale, pour entretenir et valoriser, peuvent s’éteindre si l’on n’y prend garde. Au demeurant, c’est bien ce qui se passe : un tiers des acheteurs manque à l’appel, la commande de travaux d’entretien fléchit.

Les raisons les plus fortes tiennent sans conteste à la confiance collective, qui s’est absentée du pays. Le chômage en est cause, certes, mais aussi l’alourdissement de toutes les fiscalités. La baisse du pouvoir d’achat pénalise les investissements dans l’immobilier, et la fiscalisation du logement dissuade ceux qui auraient encore l’épargne suffisante. Au-delà, la méthode d’élaboration de la politique immobilière est critiquable à plus d’un titre.

Le premier grief tient à la complexité et à l’instabilité. Le ménage qui achète, pour se loger ou pour louer, accomplit un acte de long terme et il a besoin de visibilité sur les conditions fiscales de son engagement. Jamais le cadre fiscal et financier n’a été aussi mouvant, au point que pour la première fois de son histoire, le célèbre cabinet d’avocats fiscalistes Francis Lefèvre a différé de plusieurs mois la parution de son guide annuel… et l’a assorti presque à chaque page d’avertissements au lecteur : ce qui est écrit est peut-être déjà dépassé au moment de la consultation ! Il ne s’agit d’ailleurs pas que de la fiscalité proprement immobilière, mais aussi du régime de l’impôt sur le revenu des personnes physiques comme des sociétés, ou encore de l’impôt sur la fortune. On annonce à cet égard une succession de lois de finances rectificatives, ce qui serait désastreux. On peut comprendre que les circonstances économiques impliquent des ajustements de cap, mais l’essentiel doit être posé pour une durée suffisante à la compréhension et à la digestion des investisseurs.

Pourquoi par exemple, alors que tout le monde était d’accord sur ce point, n’avoir pas modifié le régime des plus-values de cession des terrains constructibles selon le mécanisme préconisé par toute la filière, en le rendant progressif pour inciter à la mise sur le marché du foncier disponible ? C’est d’un véritable choc foncier avec une taxation nulle ou progressive dont nous avons besoin. Une taxation trop forte ne peut qu’inciter les propriétaires des terrains à augmenter leur prix de façon identique, voire à retirer leur foncier de la vente. Pourquoi avoir confirmé si tard la persistance de l’éco-PTZ, qu’on croyait mort, et annoncé une aide à la mise aux normes énergétiques six mois après les débats budgétaires au Parlement ? D’autant que le PTZ, recentré sur les 3 premiers déciles au lieu des 5 premiers auparavant, n’est plus accessible aux acquéreurs qui avaient les moyens d’acheter.

Quant à la complexité, elle culmine. Le dispositif Duflot, en soi porteur d’espoir, est un modèle du genre : à force de vouloir répondre à tous les impératifs à la fois, celui de la cible sociale, du cantonnement territorial, de la mixité, de l’adaptation aux conditions de marché, il défie l’intelligence humaine… Il est en outre toujours incomplet et donc par définition imprévisible : sait-on que les plafonds de loyer pourront être revus tous les six mois par référence au futur observatoire national, et que le préfet pourra aussi, d’autorité, les baisser si le besoin local s’en fait sentir ?

D’ailleurs, le dispositif Duflot est la parfaite illustration que l’Etat -deuxième grief-, à aller dans le détail, passe à côté du sujet : fallait-il, pour moraliser la défiscalisation immobilière et éviter les quelques excès condamnables, multiplier les critères jusqu’à l’indigeste ? Où est le cœur du sujet ?

Dans le volume de construction, génératrice de rentrées fiscales abondantes et de création d’emplois, et aussi dans l’aménagement du territoire. Sur le premier impératif, l’objectif de 40 000 logements par an est atteignable… à la condition que le Gouvernement tienne un discours volontaire et positif, et rassure sur les craintes de révision permanente que je viens de dénoncer. Pour autant, 20 000 unités manqueront à l’appel par rapport aux plus puissants des dispositifs antérieurs, et surtout par rapport aux besoins locatifs. On rappellera qu’un logement construit entraîne la création de 2,5 emplois dans toute la filière, jusqu’à la gestion et l’entretien. On mesurera ainsi les conséquences d’un moindre niveau de construction sur la résorption du chômage, sans parler de l’encaissement de TVA. L’effort brut immédiat qu’accepte l’Etat en se privant de rentrées fiscales par le mécanisme de la réduction d’impôt doit donner lieu à des bénéfices pour la collectivité, et cette équation vertueuse est fragile : un dispositif fiscal doit être assez attrayant pour y conduire.

A cet égard, la concentration des efforts de construction locative privée, comme d’accession d’ailleurs, sur les zones tendues est tout aussi dommageable. Madame Duflot, signe des temps, est ministre de l’Egalité des territoires : pourquoi ne pas reconnaître que nombre de ménages, locataires ou acquéreurs, ne pourront équilibrer leur budget domestique que sur des territoires moins exposés, où le foncier ne représente que 10 à 15 % du coût total de production du logement, contre 40 % dans les endroits où les aides sont aujourd’hui orientées ? Pourquoi même ignorer que beaucoup recherchent la qualité de vie majorée que ces territoires offrent ? D’ailleurs, si la responsabilité de l’Etat est engagée dans cette affaire, celle des collectivités locales l’est aussi : il importe que l’attractivité territoriale, économique, culturelle, mène effectivement les familles à porter leur regard sur d’autres zones que celles qui concentrent aujourd’hui l’essentiel de la population.

Un dernier grief tient à l’image fausse que les pouvoirs publics semblent avoir des promoteurs et de la méconnaissance de leur logique. D’abord, les promoteurs sont des producteurs de masse et leur prospérité est conditionnée par le volume de leur production, pas par leurs marges bénéficiaires. Aujourd’hui, la plupart des opérateurs de la profession affichent des rendements de l’ordre de 5 %, bien loin des taux d’autres acteurs. Ils réinvestissent l’essentiel de leurs ressources dans la formation des équipes et dans le recours aux meilleures entreprises d’architecture et de bâtiment. Ils font face à la longue litanie de normes techniques, heureusement suspendues pour certaines d’entre elles pendant les deux années qui viennent. En revanche, leur mode de fonctionnement est tel que sans certitude sur la demande et le rythme de commercialisation, portant leur propre risque, ils ne pourront lancer des programmes nouveaux, en s’endettant pour racheter des terrains, les viabiliser et y engager des constructions. Il importe de fluidifier d’urgence le marché et de faire revenir les acquéreurs, investisseurs et accédants, sans quoi on hypothèquera l’avenir des deux ou trois prochaines années.

On sent bien, à l’analyse, que le problème le plus saillant provient de la méthode politique : on ne prend pas assez de hauteur, on légifère sans cesse et on ne voit pas que ménages et professionnels attendent l’inverse. Ils attendent des produits attractifs et sécurisants et que l’Etat mise sur l’avenir et le long terme, avec les effets économiques vertueux qui s’ensuivront. Ne pas confondre action et agitation en somme.  ©LeFilDeLimmo/BazikPress

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