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Avenant au mandat : dans quels cas est-il obligatoire ?

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Si la réglementation dite Hoguet fixe les conditions de validité des mandats, rien n’est prévu concernant les avenants. Ainsi, dans la pratique, les interrogations sur les avenants sont fréquentes. Dans quels cas sont-ils obligatoires ? Faites le point avec l’éclairage juridique de Maître Caroline Dubuis-Talayrach pour savoir comment formaliser et enregistrer les avenants au mandat.

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Le principe

Si la réglementation dite Hoguet fixe les conditions de validité des mandats, rien n’est prévu concernant les avenants. Leur principe et leur validité sont toutefois reconnus par le décret (1) Hoguet qui prévoit que quand la rémunération de l’agent immobilier est « forfaitaire, celle-ci peut être modifiée lorsque le prix de vente ou de cession retenu par l’engagement des parties est différent du prix figurant dans le mandat. ». L’avenant au mandat est donc autorisé.

Pour le reste c’est la jurisprudence qui va nous éclairer. Car si l’avenant au mandat est possible, est-il pour autant obligatoire ?

La réponse est assurément positive concernant les honoraires et le débiteur desdits honoraires. Il est fréquent que les honoraires soient modifiés dans le cadre de la commercialisation d’un bien immobilier. En pareil cas, il ne fait pas de doute qu’un avenant doit être formalisé sous peine de remise en cause du droit à honoraires.

En effet, la réglementation Hoguet (2) prévoit que le montant des honoraires et le débiteur desdits honoraires doivent être indiqués dans le mandat et dans l’engagement des parties.

Ainsi, la Cour de cassation (3) casse un arrêt qui avait ordonné le paiement d’une somme de 25 000 € à un agent immobilier alors que le débiteur des honoraires n’était pas le même dans le mandat et dans l’engagement des parties. Autre illustration par la Cour d’appel d’Aix- en-Provence (4) qui ordonne la restitution par le professionnel d’une somme de 30 000 € suite à un changement de débiteur, restitution majorée d’intérêts car le professionnel « ne pouvait ignorer, en l’état de la réglementation de la profession d’agent immobilier, l’exigence d’une conformité entre le mandat et l’acte de vente sur la charge de sa rémunération ».

La situation aurait été différente si l’agent immobilier avait formalisé un avenant au mandat.

Certes, ces décisions ont été rendues sur des faits antérieurs à l’interdiction du basculement des honoraires (5) et devraient moins se rencontrer en pratique mais le principe demeure. Tant sur le débiteur des honoraires que sur leurs montants. Ainsi la Cour d’appel de Paris (6) juge que « la rémunération du mandataire est une des clauses impératives du mandat de vente immobilière, de sorte que toute modification imposait un écrit à cette fin qui lui appartenait, en sa qualité de professionnelle, de requérir. »

La Cour d’appel de Toulouse (7) quant à elle juge que « la diminution de la commission par rapport au mandat écrit constitue un avenant au mandat, susceptible d’une nullité relative faute d’avoir donné lieu à un écrit conforme aux dispositions de la loi Hoguet. Cependant, cette nullité ne peut être soulevée par les époux A, qui bénéficient de cette baisse de la rémunération. Or, la nullité vise la seule protection du mandant dans ses rapports avec le mandataire. En conséquence, les vendeurs ne peuvent pas se prévaloir de ce qu’un nouveau mandat n’a pas été signé pour entériner la baisse du prix de vente et la diminution de la rémunération du mandataire pour échapper à leurs obligations contractuelles. »

Décidemment clémente, la cour d’appel dans la même décision juge que « le fait de baisser le prix de vente par rapport à ce qui était mentionné au mandat ne nécessitait pas la signature d’un nouveau mandat de vente ». Si la Cour a été favorable au professionnel, il n’est pas acquis qu’une autre Cour adopte ce raisonnement.

Aussi, et d’une façon générale il est vivement conseillé de formaliser des avenants de façon à ce que les conditions du mandat correspondent à celles de la réalisation de l’opération.

À noter enfin que l’extension de l’objet (un nouveau bien immobilier) avec des honoraires spécifiques doit se faire via un nouveau mandat et non par un avenant. (11)

La formalisation des avenants

Formaliser certes mais encore faut-il être précis. Ainsi un agent immobilier s’est vu opposer l’avenant qu’il avait rédigé et dont les termes étaient manifestement ambigus (8). Un mandat exclusif de vente avait été signé le 3 mars 2011 pour trois mois renouvelables par tacite reconduction sans pouvoir dépasser une année.

Le mandat expirait donc le 3 mars 2012. Un avenant a été signé entre les parties modifiant le prix de vente, les honoraires et stipulait que « ledit mandat se trouve par ailleurs prorogé jusqu’au 13 juillet 2011.

Toutes les autres clauses de conditions demeurent inchangées. » La Cour en a déduit que les parties avaient souhait  réduire la durée du mandat au 13 juillet 2011, l’agent immobilier soutenant quant à lui que le 13 juillet 2011 était le terme des 3 mois d’irrévocabilité…

Toujours en faveur de la précision quant oublier d’indiquer une mention du type « les autres charges et conditions demeurent sans changement ». Ainsi un acquéreur expiait de l’absence de cette mention sur un avenant de baisse de prix de vente et d’honoraires, une absence de durée (cause de nullité). La Cour (9) ne suivit pas cette argumentation mais il est néanmoins conseillé d’insérer la clause précitée.

L’enregistrement

Quid de l’enregistrement d’un mandat ? La loi Hoguet est muette sur ce point et la Cour d’appel d’Aix (10) a récemment rendu une décision remarquée en jugeant que l’avenant ne nécessite pas l’enregistrement par un numéro autonome. La Cour d’appel de Lyon (11) semble s’inscrire dans ce courant et juge à propos de deux mandats identiques à l’exception d’une baisse de prix et ayant le même numéro que « le second mandat aurait pu être conclu sous forme d’avenant dont l’enregistrement n’est nullement obligatoire en l’état des textes et de la jurisprudence ».

Pourtant l’enregistrement de l’avenant permet de lui donner une date certaine et a le mérite du parallélisme des formes avec le mandat. Il serait souhaitable que la Cour de Cassation puisse se prononcer sur le sujet.

 

1) Article 75 du décret du n°72-678 du 20 juillet 1972

2) Article 73 du décret du n°72-678 du 20 juillet 1972

3) Cass.1e civ., 24 avril 2013, n° 11-26876

4) Cour d’Appel d’Aix en Provence, 12 septembre 2017, n° 15/21463

5) Arrêté du 10 janvier 2017 relatif à l’information des consommateurs par les professionnels intervenant dans une transaction immobilière

6) Cour d’Appel de Paris, 23 juin 2022, n° 19/18705

7) Cour d’Appel de Toulouse, 13 septembre 2021, n 19.03718

8) Cour d’Appel de Metz, ch, civ, 27 avril 2017, 15.03212

9) Cour d’appel Nîmes, 18 juin 2020, 18.03419

10) Cour d’Appel d’Aix en Provence, ch1-1, 10 mai 2022, 21.14962

11) Cour d’appel de Versailles, 18 septembre 2014, 12.05497

Caroline Dubuis Talayrach

Caroline Dubuis Talayrach
Après plus de 20 ans d’exercice en Cabinet d’Avocats Conseils et comme Directrice Juridique et Méthode d’une enseigne nationale de franchise en agences immobilières, Maître Caroline Dubuis-Talayrach a ouvert son propre cabinet de :
- Mandataire en cessions d’agences immobilières, cabinets d’administration de biens et syndic
- Droit des affaires : Conseil et rédaction des actes en création et transmission d’entreprises, droit des contrats, droit de l’agent commercial, droit des sociétés, droit de la franchise, baux commerciaux
- Droit de l’agent immobilier : Conseil et rédaction des actes d’achat/vente de cabinets, formation professionnelle, exercice professionnel, honoraires, création de savoir-faire métiers

Sa philosophie : Conseiller – Négocier– Former– Défendre
Basé à Aix en Provence j'interviens sur toute la France.
Tel : 06 16 72 18 90
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