Alors que les Français peinent à se loger, le nombre de meublés de tourisme explose. C’est tout l’objet d’un rapport parlementaire publié par la député Annaïg Le Meur. Le texte dresse un état des lieux très instructif de la fiscalité locative actuelle et propose de la réformer pour rééquilibrer le marché locatif. Professionnels de l’immobilier, soyez informés à ce sujet !
Cet été, la député réélue Annaïg Le Meur a effectivement publié un rapport parlementaire dédié à la fiscalité locative en France, à la suite de la proposition de loi –actuellement en cours d’examen au Parlement – qu’elle avait elle-même présenté précédemment.
L’objectif ? Dresser un état des lieux des pratiques fiscales locatives en France, afin d’une part, de favoriser la location longue durée et d’autre part, assurer une offre de logements privés abordables et de qualité, grâce à des évolutions fiscales. Autrement dit, il s’agit de « remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue », alors que le nombre de mises en location a significativement baissé, tout particulièrement celui des locations nues de longue durée, alors que les offres de location meublée, elles, ont augmenté.
Le rapport précise que « le nombre de logements proposés sur les plateformes de réservation est passé de 855 000 en 2019 à 1 190 000 en 2023, soit une augmentation de 40 % en quatre ans ».
Une distinction de régime fiscal qui avantage significativement les meublés de tourisme
En cause : la dichotomie de régime fiscal qui existe entre la location nue et la location meublée (saisonnière ou de longue durée). Il en ressort que, dans l’état actuel du droit, les locations meublées sont fortement avantagées, avec des abattements plus importants et une fiscalité moins contraignante.
Un abattement fiscal plus important pour les propriétaires loueurs de meublés touristiques
Très concrètement, le rapport explique que le propriétaire d’un logement nu qui perçoit au maximum 15 000 euros annuels de loyers peut bénéficier d’un abattement de 30 %. En revanche, les conditions sont bien plus favorables pour un propriétaire qui loue son bien en meublé : dans le cadre d’une location de longue durée, des revenus jusqu’à 77 700 euros ouvrent droit à un abattement fiscal de 50 %. Et s’il s’agit d’un meublé de tourisme classé, le propriétaire peut gagner jusqu’à 188 700 euros annuels de loyers, avec un abattement fiscal de 71 %.
C’est d’ailleurs une exception française (cette distinction de régime fiscal ne se fait nulle part ailleurs en Europe). Résultat : « on arrive de plus en plus souvent à des situations où les habitants comme les salariés des entreprises locales ne trouvent pas d’offre locative privée accessible pour se loger, alors que se développent les locations de meublés, notamment de courte durée » constate le rapport.
Ce n’est pas tout : si les propriétaires loueurs viennent à dépasser le plafond du chiffre d’affaires réservé au régime micro-BIC, ils peuvent alors opter pour le régime réel d’imposition. Dans ce cas, ils peuvent notamment déduire l’amortissement et les charges du logement des revenus de la location meublée. De quoi renforcer encore l’attractivité de la location meublée, au détriment de la location nue pour laquelle un tel dispositif n’est pas prévu.
Des rendements locatifs plus faibles pour les locations nues et de longue durée
Qui dit fiscalité avantageuse dit aussi rentabilité locative maximisée pour les locations meublées de tourisme. Le rapport souligne également que les locations meublées, surtout touristiques, sont bien plus rentables que les locations nues.
Pour évaluer cette rentabilité, calculée sur 12 ans, quatre villes ont été étudiées par Annaïg Le Meur : Annecy, La Rochelle, Montpellier et le 13ème arrondissement de Paris, villes choisies car le marché locatif y est représentatif du type de bien recherché, à savoir des appartements de 40m2 environ. Il en est ressorti que l’investissement locatif est deux à trois fois moins élevée pour une location vide que pour une location meublée de courte durée, dans le cas d’un taux marginal d’impôt sur le revenu à 30 % (classe moyenne). Pour les foyers plus aisés (avec une tranche marginale d’imposition sur le revenu à 45%), la rentabilité d’une location vide (régime de frais réels) est carrément nulle voire légèrement négative dans les quatre villes analysées.
Résultat : une pénurie de locations longues
Ainsi, les 800 000 meublés de tourisme déclarés sur le territoire constituent une réserve locative indéniable, d’autant qu’elles sont concentrées dans les zones où le marché locatif est tendu. Cela crée une pénurie de locations longue.
Exemple très parlant indiqué dans le rapport : « à Paris, dans le troisième arrondissement, l’offre de logements meublés touristiques est 25 fois plus importante que celle de logements classiques. À Die, dans la Drome, on trouve au maximum cinq logements à louer, en location classique, contre une centaine sur les différentes plateformes de tourisme. Et ce constat se retrouve partout ».
Trois propositions de réforme pour favoriser la location longue durée
Pour autant, la député dit de ne pas vouloir « interdire les locations de type Airbnb ou de mettre en place une réglementation drastique, mais plutôt trouver un équilibre entre activité touristique saisonnière et vie du territoire le reste de l’année ».
Trois pistes de réforme sont ainsi proposées :
La fin du régime BIC pour les loueurs en meublé non professionnels, afin d’harmoniser le traitement fiscal des locations nues et meublées ;
La création d’un régime commun pour tous les types de location, afin de simplifier significativement le système actuel ;
Une modification des seuils de recettes permettant de distinguer les loueurs en meublé non professionnels et les loueurs en meublé professionnels.
Comme on l’imagine, ces propositions feront l’objet de discussions animées et leur chemin législatif reste encore à faire. Restez en veille à ce sujet pour informer au mieux vos clients !
S’il existe des locations meublées de type Airbnb, c’est que ça répond également à une demande. La rentabilité supérieure des locations meublées à celle des locations nues ne peut exister que s’il y a des touristes.
En réduisant fortement le nombre de locations meublées, pour autant que les mesures préconisées y parviennent, il va obligatoirement y avoir un impact sur l’économie touristique : restaurants, bars, musées, …
Je pense que le vrai problème est à chercher du côté du déficit structurel de constructions neuves.
En alignant la fiscalité meublée sur la location nue, on va surtout réorienter les investisseurs vers les placements financiers au détriment de l’immobilier.
Autre point qui n’est jamais abordé : la location meublée génère des charges spécifiques : mobilier, ménage, conciergerie. La fiscalité actuelle (ou plutôt ancienne pour le micro-BIC) est une prise en compte de ces spécificités.
Par Bernard Charlotin, il y a 2 mois
S’il existe des locations meublées de type Airbnb, c’est que ça répond également à une demande. La rentabilité supérieure des locations meublées à celle des locations nues ne peut exister que s’il y a des touristes.
En réduisant fortement le nombre de locations meublées, pour autant que les mesures préconisées y parviennent, il va obligatoirement y avoir un impact sur l’économie touristique : restaurants, bars, musées, …
Je pense que le vrai problème est à chercher du côté du déficit structurel de constructions neuves.
En alignant la fiscalité meublée sur la location nue, on va surtout réorienter les investisseurs vers les placements financiers au détriment de l’immobilier.
Autre point qui n’est jamais abordé : la location meublée génère des charges spécifiques : mobilier, ménage, conciergerie. La fiscalité actuelle (ou plutôt ancienne pour le micro-BIC) est une prise en compte de ces spécificités.