Accueil » Actu » « L’envie des Français pour l’immobilier ne reprend pas le pas sur les prix, elle reste tributaire du crédit » Charles Marinakis, CENTURY 21
« L’envie des Français pour l’immobilier ne reprend pas le pas sur les prix, elle reste tributaire du crédit » Charles Marinakis, CENTURY 21
À l’issue de ce 1er trimestre 2024, l’envie des Français pour l’immobilier semble intacte, elle croît même, mais ne parvient pas à surmonter les deux handicaps que sont les prix et les taux de crédit. Pourtant, depuis janvier 2024, des changements s’amorcent. Analyse de Charles Marinakis, président de CENTURY 21.
2023 a été marquée par un faible recul des prix et un fort ralentissement du marché immobilier dû àla hausse continue des taux d’intérêt, au resserrement des conditions d’octroi de crédits et à l’inflation grandissante venant amputer le reste à vivre des ménages. Dans ce contexte, les Français ont dû mettre de côté leur rêve d’accession à la propriété et leurs projets immobiliers.
Au 1er trimestre 2024 cependant, les prix commencent enfin à s’ajuster plus nettement. Une maison se vend ainsi à 2 459 € le m² en moyenne (-3,3 % par rapport au 1er trimestre 2023) et un appartement à 4 072 € le m² (-3,2%). Cette baisse est néanmoins insuffisante pour relancer l’activité, et le nombre de transactions est en retrait de -11,2 % par rapport au 1er trimestre 2023. Signe de l’atonie du marché, les délais de vente s’allongent encore de 9 jours en moyenne pour atteindre des niveaux jamais égalés : 103 jours pour une maison et 100 jours pour un appartement. Les Français ont toujours le pied sur la pédale de frein.
Malgré ce contexte économique défavorable,« les Français ne semblent pas renoncer au rêve de la propriété. […] 61 % de non-propriétaires expriment comme objectif le devenir », comme le souligne le baromètre Habitat réalisé par Procivis en novembre 2023. Les indicateurs CENTURY 21 du 1er trimestre confirment cette tendance : les acquéreurs veulent à nouveau se projeter, le nombre de consultations de biens à la vente, les demandes envoyées aux agences, les alertes créées dans le cadre d’un projet d’acquisition ont respectivement augmenté de +22,5 %, +21,5 % et +10 % par rapport au 1er trimestre 2023.
L’envie est toujours intacte, elle croît même, mais elle ne parvient pas à surmonter les deux handicaps que sont les prix et les taux de crédit. Pourtant, des changements s’amorcent : depuis janvier 2024 les taux d’intérêt refluent, l’inflation ralentit, les banques ouvrent à nouveau les vannes du crédit et les pouvoirs publics se sont emparés du thème du logement.
Il faudrait que les prix s’ajustent et compensent des taux demeurant élevés. A titre de comparaison, il faut remonter à 2012 pour retrouver un taux moyen de crédit identique à celui que nous connaissons actuellement. Or en 2012, le prix moyen d’une maison était 19 % moins cher qu’aujourd’hui (2 068 € le m² versus 2 459 € aujourd’hui) et celui d’un appartement 17 % moins élevé (3 484 € le m² versus 4 072 €). Pour retrouver un marché immobilier dynamique, l’offre et la demande doivent se réconcilier.
A Paris, le temps des 10 000 € le m² est révolu !
Cette réconciliation Offre/Demande est en train de s’opérer à Paris et le prix moyen au m² tangente actuellement les 9 000 € en s’établissant à 9 098 € le m² en moyenne au 1er trimestre 2024 (-9% par rapport au 1er trimestre 2023). Cet ajustement des prix, qui était indispensable, vient gommer la hausse artificielle observée depuis 2017, liée au niveau exceptionnellement bas des taux d’intérêt. Justement, à taux d’intérêt comparable (4% en 2012), les prix se situaient autour des 8 510 € le m² dans la Capitale soit 6,8% plus bas qu’aujourd’hui (cf : la courbe croisant Evolutions des prix et des taux d’intérêt).
L’activité est moins impactée qu’à l’échelle nationale (-7,3%) mais même ainsi, les transactions peinent à se réaliser rapidement et mettent en moyenne 98 jours ; un délai de vente record pour la capitale, et de très loin !
Les chiffres révèlent les sacrifices auxquels consentent les ménages pour réaliser leur projet : la superficie moyenne recule de -2,7 m² pour atteindre un niveau plancher à 46,4m².
Une surface moyenne aussi réduite n’avait plus été observée depuis 2006. Cela influe évidemment sur le montant moyen d’une transaction qui, à hauteur de 410 802 €, retrouve des niveaux de 2015.
L’Ile-de-France à mi-chemin entre Paris et la province
L’évolution du marché francilien suit la même tendance qu’au niveau national (-11,7 % d’activité entre le 1er trimestre 2023 et le 1er trimestre 2024) et pourtant les prix ont reculé de -7,7 % pour les maisons et de -4,6 % pour les appartements en un an. S’établissant à 3 470 € le m² pour les maisons et 4 333 € le m² en moyenne pour les appartements, ils retrouvent des niveaux semblables à ceux de 2021 quand il faudrait, à taux d’intérêt comparable, qu’ils s’ajustent encore de -14,5% en moyenne.
Pour acheter, les acquéreurs rognent sur les surfaces et la superficie moyenne baisse, notamment pour les maisons qui perdent 4,5m² environ en un an. En parallèle, ces transactions mettent beaucoup plus de temps à se concrétiser et le délai de vente moyen explose pour atteindre un niveau record (95 jours pour les maisons et 102 jours pour les appartements).
Au sein de la région francilienne, les évolutions par département sont évidemment très contrastées. Les Yvelines, le Val-d’Oise et l’Essonne présentent une activité en baisse de -20% ou plus, quand comparativement, les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne sont stables tandis que la Seine-Saint-Denis voit son volume d’activité ne fléchir que de -3,3%. Les prix ne suivent pas non plus les mêmes tendances, allant de -2,7% pour les Hauts-de-Seine à -10,1% pour le Val-d’Oise. Il est donc très délicat de tirer des généralités, les marchés étant très fragmentés.
La diversité des marchés toujours d’actualité
Ce constat prévaut également au niveau des régions où l’activité fluctue entre -4,4 % en Bourgogne-Franche-Comté et -19,6 % dans les Pays de la Loire. Six régions présentent une évolution du volume de transactions de l’ordre de -12,5 % par rapport au 1er trimestre 2023 : l’Auvergne-Rhône-Alpes, la Bretagne, les Hauts-de-France, la Normandie, la Nouvelle Aquitaine et PACA.
Les évolutions de prix sont tout aussi contrastées dans ces régions allant de -12,1% pour les Pays de la Loire à +4,4 % pour PACA. Ce n’est cependant pas la seule région qui présente des prix en augmentation entre le 1er trimestre 2023 et le 1er trimestre 2024. La Bourgogne-Franche-Comté (+1,2%) ainsi que la Nouvelle-Aquitaine (+1,6%) connaissent également des évolutions de prix à la hausse.
Cela dit, même au sein des régions, les marchés réagissent différemment et toute généralité est nécessairement trompeuse. Ainsi, en PACA, Nice voit son marché ralentir de -14,8 % tandis que ses prix continuent de progresser (+4,6 %), Marseille à l’inverse profite d’un regain d’activité (+7,7 %) tandis que ses prix reculent nettement (-9,2 %). Dans la région voisine, Montpellier connaît un ralentissement du nombre de ses transactions (-11,3 %) tandis que ses prix ne s’ajustent que de -2,3 %. A Lyon, les prix reculent plus fortement (-8,8 %) et pourtant le marché ne repart pas encore et enregistre une baisse du nombre de ses ventes de -30,6 %.
Devant des marchés aussi hétérogènes les uns des autres, il est difficile d’être assertif quant à leur prochaine évolution.
Cependant, les indicateurs montrent que l’appétence des Français pour l’immobilier revient, que les premières démarches dans le cadre d’un projet sont à nouveau menées. Ils se heurtent cependant au principe de réalité, une réalité qui conjugue encore inflation généralisée réduisant leur reste à vivre et taux de crédit élevés diminuant leur pouvoir d’achat immobilier. Dans ce contexte, un seul levier est du ressort des ménages : celui des prix, qu’il conviendrait encore de réajuster pour fluidifier le marché.