La réforme du Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) et les débats qui vont s’en suivre ne font que commencer ! Pour mieux comprendre comment est né et a évolué cet outil dont on parle tant dans l’immobilier, Julien Besnard, fondateur du label Casam et d’un bureau d’études du même nom, vous propose une nouvelle série d’articles sur le DPE. Commençons par un flashback instructif sur ce document.
La modification du Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) ne fait que commencer ! Tandis que le gouvernement travaille sur sa « simplification », l’Union Européenne s’achemine vers une unification à l’échelle de l’Europe de la méthode. Mais revenons-en au début : quelle est l’histoire initiale de ce document ?
Créé en 2006, le DPE est passé en l’espace de quelques années du statut de simple document obligatoire, à celui de critère influençant à la fois le prix des biens et leur mise en location. En 2024, il est même devenu l’outil central de la politique de rénovation énergétique du gouvernement qui a conditionné l’obtention des aides MaPrimeRénov’ à sa réalisation, avant de repousser l’obligation au 1er janvier 2025.
Une promotion rapide pour le soldat DPE, lui qui n’avait pas été conçu pour endosser de telles responsabilités ! Revenons sur les origines de ce document et de sa méthode, qui expliquent en partie les contestations dont il fait l’objet aujourd’hui.
Aux origines du DPE
L’histoire du DPE s’inscrit dans une dynamique européenne. En effet, face à l’impératif écologique, l’Union Européenne adopte en 2002 une Directive sur la Performance Énergétique des Bâtiments, résumé par l’acronyme « DPEB ».
La DPEB demande aux États membres la mise en place d’une méthode de calcul évaluant la performance énergétique des logements et de communiquer ce certificat à l’acheteur ou au locataire. On retrouve dans ce texte les ingrédients qui composent encore aujourd’hui le DPE avec un indicateur CO2 et une traduction de la consommation en énergie primaire. L’indicateur énergie primaire se trouve au centre des contestations actuelles, qui s’inspire d’une méthode statistique européenne née dans les années 1970 pour piloter la production d’énergie en Europe.
L’évolution du DPE en France : une méthode inspirée de la Réglementation Thermique
Pour faire face la demande de la DPEB, l’État français s’est naturellement tourné vers la méthode française existante : la réglementation thermique (RT). Celle-ci est utilisée pour fixer les exigences de performances énergétiques des bâtiments neufs. Le bureau d’étude Tribu Energie, alors chargé de créer la méthode, reprend et adapte la RT 1988 afin de créer une méthode de calcul nommée 3CL (Calcul de Consommations Conventionnelles des Logements).
Cette méthode vise à additionner la consommation de chauffage, d’eau chaude, de climatisation, de ventilation et d’éclairage d’un bâtiment ; qu’elle divise ensuite par la surface du logement. Le tout est résumé par une étiquette énergétique.
En 2006, cette méthode est donc adoptée, cohabitant avec la méthode de relevé des factures, avant que la méthode 3CL soit finalement généralisée à tous les bâtiments en 2021. En 2010, la loi Grenelle rend le DPE obligatoire lors de la parution d’une annonce immobilière, et dès 2015 de premières enquêtes montrent l’attention croissante des acquéreurs vis-à-vis de la classe énergétique du bien visité. Mais dans l’esprit de tous, il reste encore une formalité administrative, ainsi sa méthode évolue peu.
2021 : année charnière marquée par l’impact croissant du DPE
En 2021, année d’accélération de la hausse du prix des énergies, la loi Climat et Résilience est promulguée, fixant un calendrier progressif de gel des loyers et d’interdiction de location pour les biens classés G, F, E (2025, 2028 et 2034). Les annonces immobilières doivent par ailleurs afficher clairement, dès 2022, le montant des dépenses théoriques annuelles d’énergies. Un point que je commenterai dans un prochain article.
Ainsi l’impact sur le prix des logements s’accélère. Entre 2021 et 2022, la différence de prix moyenne entre deux maisons classées respectivement D et F passant de 11 % à 15 % en seulement 1 an (données des notaires de France moyennées par région). Les critiques sur la fiabilité du DPE accompagnent cette hausse et force le gouvernement à s’emparer du sujet de la méthode, qui comme nous l’avons vu a subi peu d’améliorations depuis 2006.
Sous la pression de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2025 de l’interdiction de louer les biens classés G, le gouvernement a obtenu la modification des échelles de classes énergétiques pour les biens inférieurs à 40 mètres carrés. Premier changement d’une longue série ? C’est en tous cas ce qu’indique les tractations dans les ministères, notamment concernant le coefficient d’énergie primaire.
Chamboulement probable également en raison de la réglementation européenne qui évolue. Le 12 mars 2024, le Parlement européen a validé une refonte du DPEB avec notamment un projet de DPE unique européen, sur lequel travaille déjà certains acteurs du diagnostic.
Cet éclairage vous a plu ? Les prochains articles seront notamment consacrés aux modifications de la méthode et aux points de contestation du DPE.
Julien Besnard est le fondateur de Casam, un label décerné aux professionnels de l’immobilier se formant à la rénovation énergétique. Prise de mandat, conseils vendeurs, prospection… les éco-conseillers en immobilier labélisés Casam se démarquent auprès de leurs clients notamment grâce à leur capacité d’estimer les aides à la rénovation et l’impact de travaux sur la valeur verte du bien. Casam, qui est partenaire de grands réseaux immobiliers, forment chaque année plusieurs centaines de professionnels.
Casam est également un bureau d’étude réalisant des audits énergétiques et développant une calculatrice énergétique pour les professionnels du bâtiment et de l’immobilier. Fort de cette double expertise, Julien Besnard conseille des leaders tels Castorama ou Atlantic dans l'élaboration de leur stratégie commerciale en lien avec le DPE et MaPrimeRénov'.