Avec les soldes et les vœux de début d’année, on se prend toutes et tous à espérer une détente dans les conditions du crédit. L’analyse de Bruno Rouleau, directeur de la Stratégie et de l’Innovation chez AFR Financement.
Le fait est que les barèmes de taux des crédits immobiliers diffusés sur ces premiers jours de février sont pour une grande majorité soit inchangés, soit en léger repli. Cela dit, je n’irai pas jusqu’à prévoir une baisse telle qu’on assisterait à des vagues de renégociations avant la fin d’année 2024.
La baisse des taux n’aura pas lieu… ou aura bien lieu….
En effet, la plupart des banques ont dû se serrer la ceinture durant l’année 2023 (production de nouveaux crédits en repli de plus de 42%), et la crispation des transactions n’augure pas d’un rebond vif. Quand ce ne sont pas les autorités de régulation qui serrent la vis, c’est le blocage psychologique des acheteurs qui prend le relais.
Cela dit, c’est un cycle habituel de cycle de crise : déni, crispation, résignation, rebond. Nous n’en serions encore donc qu’à la crispation. Forcément, puisque de toute part, on enjoint les vendeurs à se résigner à baisser leurs prix de 15 à 20%. Les acheteurs attendent donc cette baisse… qui a bien du mal à se matérialiser. Et là aussi, la raison est simple : le fort déséquilibre persistant entre l’offre et la demande potentielle, qui soutient, malgré lui, le marché.
Pour autant les banques ne sont pas prêtes à raser trop court, car le retour des marges sur les crédits n’est pas un acquis. D’une part, la hausse de l’OAT 10 ans (référentiel couramment retenu pour les provisions sur risques de taux) vers les 2,80% rappelle la fragilité du contexte. D’autre part, les tensions sociales et la complexité de la gestion des fonds propres bancaires ne permettent pas aux établissements de crédit de relâcher leur vigilance en matière de distribution de crédits. Ceci a pour conséquence une convergence des intérêts vers les profils d’emprunteurs à hauts revenus.
On retrouve cette stratégie dans l’élargissement des fourchettes de taux selon les typologies de clientèle, avec un affaissement sur les catégories CSP+, afin de les attirer, et le maintien de barèmes moins attractifs sur les clients lambda.
Du coup, notre panorama des taux pratiqués donne pour ce mois-ci des fourchettes en léger repli car je n’ai pas retenu les grilles les plus chères :
Prêts relais : entre 3,95 et 4,65 % (taux indiqués hors assurance de prêt)
Prêts sur 15 ans : entre 3,80 et 4,20 %
Prêts sur 20 ans : entre 3,90 et 4,50 %
Prêts au-delà de 20 ans : entre 4,10 et 4,70 %
Le marché reste en attente des décisions sur les dernières dispositions du PTZ 2024 (annoncées avant fin mars prochain) et d’éventuels actes concrets pour débloquer le crédit à l’accession promis par le premier ministre récemment. Le marché présente cependant des inerties, on le sait, et comme pour les plantations, il faudra sans doute attendre la fin des derniers frimas printaniers pour réchauffer l’ambiance.
Bruno ROULEAU est co-fondateur et Délégué Général de la Fédération du Courtage en Crédit. Diplômé du CNAM dans le secteur bancaire, cadre durant une 20aine d’années au sein de 4 groupes bancaires. Il bascule dans le secteur de l’intermédiation bancaire en 2004, d’abord chez In&Fi Crédits qu’il rejoint peu de temps après leur création. Il en devient associé aux côtés de Pascal BEUVELET, crée avec lui l’IFIB (Institut de Formation) et l’activité de Financement Professionnel. Il y occupe aussi la fonction de Directeur des Partenariats, de l’Animation et Porte-Parole de l’enseigne. En 2010, il rejoint CAFPI au sein de la Direction Générale et du Comité Exécutif, en charge des Grands Accords, de l’Economie Sociale et de l’Organisation Interne.
Passionné par l’entrepreneuriat, il crée en 2015 son cabinet de conseil en Formation et de conseil pour accompagner les entreprises et les réseaux dans leur virage digital, notamment dans la gestion de la relation Client. Revenu dans le secteur du courtage en crédit en 2018, il retrouve d’abord In&Fi Crédits comme membre du Comité de Direction, Directeur des Partenariats et Porte-Parole, et devient parallèlement secrétaire puis Président de l’APIC, avant de passer Secrétaire Général chez La Centrale de Financement, puis Directeur de la Stratégie et de l’Innovation, et Porte-Parole chez AFR Financement, tout en étant administrateur de la CNCEF Crédits jusqu’en juillet 2024. Il est également auteur d’ouvrages sur le courtage en crédit, référent réglementaire au sein d’organismes de formation, et intervenant en Faculté des Métiers.