C’est sur cette question que s’est penchée l’édition 2023 du Baromètre Provicis-Interactive. Dans cette optique, l’enquête met en parallèle les aspirations des Français et les orientations des politiques publiques en matière de logement. Focus sur les grandes lignes à retenir.
«L’État prend le contrepied des Français. Ceux-ci aspirent manifestement à devenir propriétaire, d’une maison, neuve, dans un environnement pas trop dense ; on leur répond qu’il serait préférable de louer un appartement ancien (mais rénové) dans une métropole. Je ne juge pas les motivations de l’État, je dis simplement qu’on ne fait pas le bonheur des gens contre leur gré. Il est temps de remettre de l’humain dans la politique du logement », explique Yannick Borde, président de Procivis, en amont des résultats de cette enquête menée sur un échantillon de plus de 10 000 personnes.
Aspirations des Français et politique du logement : le grand écart ?
Devenir propriétaire : un rêve qui ne se démode pas
L’État se dessaisit progressivement des instruments de soutien à l’accession à la propriété. Après la suppression en 2018 de l’APL accession qui venait baisser de 25 % les mensualités des acquéreurs aux revenus modestes, c’est le Prêt à Taux Zéro (PTZ) qui se trouve « recentré » dans le projet de loi de finances pour 2024 jusqu’à exclure 75 % des personnes éligibles et 93% des territoires.
Pourtant, l’attachement des Français a la propriété ne faiblit pas, surtout pour les jeunes générations !
61% des Français qui ne sont pas propriétaires déclarent en faire un objectif important ou prioritaire, et on dépasse les 80 % chez les 18 à 34 ans.
Autre fait marquant : les jeunes sont beaucoup plus ouverts à des modalités particulières d’accession à la propriété.
Est-ce justement parce qu’ils sont les moins bien dotés pour devenir propriétaires et que donc ces alternatives les intéressent, ou est-ce le signe d’une évolution culturelle ? Effet d’âge ou effet de génération ?
Un focus sur la région Île-de-France semble orienter la réponse vers l’approche « pragmatique ». Ce marché tendu, aux prix particulièrement élevés, voit ses acteurs plus ouverts. Et en poussant la lecture à une échelle plus fine encore, on constate que plus le marché est central et donc cher, plus l’appétence pour l’alter-propriété est forte.
« Je suis curieux de suivre l’évolution des Français au sujet des modes alternatifs d’accès à la propriété. On voit qu’ils les connaissent mal et s’en méfient plutôt, mais il y a une ouverture du côté des plus jeunes et globalement beaucoup de pragmatisme. C’est peut-être un bout de la solution. », confie Yannick Borde.
La maison individuelle : le bien idéal pour 75 % des Français
Alors que l’arrêt du développement de la construction de maisons individuelles est une orientation majeure du Gouvernement, puisqu’il a d’abord été décidé d’exclure ce type de constructions du dispositif Pinel, et qu’il est désormais quasiment acté avec le PLF 2024 que les aspirants à la maison individuelle ne seront plus éligibles au PTZ.
Sauf que les Français, avec beaucoup de constance, plébiscitent toujours autant la maison individuelle, qui représente le logement idéal pour trois-quarts d’entre eux.
Le neuf : une priorité pour 46 % des Français
En introduction du Conseil National de la Refondation du Logement, la cheffe économiste de Bercy avançait un besoin en logements neufs de 200 000 par an. Un chiffre bas au regard des évaluations des professionnels qui en préconisent 2,5 fois plus.
Les Français ont pourtant là encore autre chose en tête : presqu’un sur deux voudrait acheter son prochain logement neuf, quand cette production ne représente avec 350 000 unités, moins de 1 % du parc existant.
Les Français n’ont jamais été aussi nombreux à vouloir acheter
L’effondrement de la demande constatée depuis 18 mois ne signifie pas que les Français ont cessé de vouloir déménager. Au contraire, les démarches entreprises n’ont jamais été aussi nombreuses : 55 % des Français consultent les annonces immobilières, et près d’un tiers de la population a engagé des démarchesactives (visites, simulation de crédit…) au cours des derniers mois.
La rénovation énergétique : entre conscience et méconnaissance
Les propriétaires bailleurs ont assez bien conscience qu’ils doivent faire des travaux d’amélioration (59 %) et ce chiffre progresse de 4 points par rapport à l’an dernier, mais dans le même temps, nombreux sont ceux qui pensent qu’ils vont devoir retirer leur logement de la location (45 % et même 52 % en Île de France), avec une progression plus marquée (+ 7 points).
En intention comme en acte, il n’y a donc pas d’accélération des travaux de rénovation énergétique. Les chiffres sont sensiblement les mêmes que ceux de l’an dernier, alors même que les locataires semblent prêts à voir leur loyer augmenter en contrepartie de tels travaux.
Deux tiers des propriétaires qui ont fait des travaux ou souhaitent en faire indiquent que les aides publiques les y ont incité. Et ceux qui n’ont pas encore sauté le pas, sont presque la moitié à dire que ces aides pourraient les y amener, un chiffre en baisse de deux points.
Alors, quels sont les freins ? Peut-être que le défaut de connaissance est un élément de réponse.
Les Français connaissent assez mal la performance énergétique de leur logement, et 45 % d’entre eux ne connaissent pas la classe énergétique (DPE) de leur logement. Les sérieuses réserves émises sur la fiabilité des diagnostics de performance énergétique n’ont sans doute pas facilité les choses.
« La massification de la rénovation est inatteignable sans un système de financement adéquat. Il reste à construire. Nous avons fait une proposition en ce sens : la création d’une « banque de la rénovation énergétique », instrument de place associant les grandes banques françaises et les professionnels du logement, pour déployer des financements à la hauteur de l’enjeu, tout en sécurisant la qualité des travaux », conclut le président de Procivis.