Lorsqu’un compromis n’aboutit pas, la partie qui refuse de réitérer la vente est confrontée à la clause pénale prévue au compromis. Comment est-elle mise en œuvre, dans quels cas s’applique-t-elle ?
Les raisons qui mènent à l’impossibilité de signer un acte authentique de vente sont nombreuses. Chacune peut entraîner différentes conséquences juridiques et notamment l’application de la clause pénale du compromis. Il s’agit d’une clause par laquelle les parties s’engagent, en cas d’inexécution de leur obligation, à verser à l’autre partie une indemnité forfaitaire. Dans chaque situation, l’agent immobilier doit rester vigilant quant à la posture à adopter et la suite à donner.
Séquestre et clause pénale
Il est fréquent de confondre les deux. Cependant, le dépôt de garantie représente la somme versée par l’acheteur lors de la signature du compromis, qui vise à garantir le vendeur de la bonne réalisation de la vente par l’acheteur.
La clause pénale, quant à elle, prévoit le versement d’une indemnité en cas de refus de signature de la vente définitive. Les montants du dépôt de garantie et de la clause pénale ne sont pas forcément identiques. Le plus souvent, le dépôt de garantie (en général entre 1 et 10 % du prix) est moindre par rapport au montant de la clause pénale (10 % du prix en pratique). Ainsi, en cas de défaillance de l’acheteur, le vendeur devra poursuivre le paiement du complément au dépôt de garantie, qui pourra lui être attribué.
La caducité résultant de la non-réalisation de la condition suspensive
Une des causes fréquentes menant à l’annulation de la vente est liée à une condition suspensive de prêt ou d’obtention de permis ou autre qui n’est pas accomplie selon les stipulations du compromis.
L’absence de faute du bénéficiaire de la condition suspensive
Par principe, lorsqu’une condition suspensive n’est pas réalisée, le compromis est caduc. Les parties reprennent leur liberté.
Lorsqu’une condition suspensive n’est pas réalisée sans qu’une faute puisse être imputée à la partie qui en bénéficie, la clause pénale n’est donc pas applicable. C’est le cas du refus de prêt lorsque l’acquéreur a effectué des démarches afin de demander un prêt dans un établissement de crédit et que sa demande est conforme aux conditions du compromis.
Dans l’avant contrat, de plus en plus souvent, des précisions viennent contraindre l’acquéreur. En effet, il peut s’engager non seulement à demander un prêt, mais aussi à un taux et pour une durée spécifique, ou encore à demander un prêt dans plusieurs établissements de crédit. De nombreux litiges découlent de ces clauses et de leur interprétation. Dans un arrêt du 14 décembre 2022, la Cour de cassation a considéré que lorsque la condition suspensive précise un montant maximal du prêt, cela ne permet pas d’imposer à l’acheteur d’accepter un prêt à un montant inférieur. Dans cette affaire, la Haute Cour retient l’absence de faute de l’acquéreur. Le vendeur n’obtiendra donc pas l’indemnisation correspondante.
La faute commise par le bénéficiaire de la condition suspensive
Lorsqu’une condition suspensive n’est pas réalisée à la suite d’une faute imputable à la partie qui en bénéficie, l’article 1304-3 du Code civil prévoit que la condition est réputée accomplie.
Cela revient à imposer à l’acheteur bénéficiaire de la condition de poursuivre la vente comme si la condition était réalisée ou à défaut de régler l’indemnité prévue par la clause pénale.
Cependant, il est nécessaire de prouver la faute de la partie concernée et son lien de causalité avec la défaillance de la condition suspensive afin d’obtenir l’application de la clause pénale. En effet, c’est uniquement la faute qui est sanctionnée par la clause pénale. Lorsqu’un acquéreur effectue une demande de prêt dans les délais qui lui ont été impartis, mais que l’établissement de crédit tarde à éditer une offre, la non-réalisation de la condition suspensive de prêt dans le délai n’est pas imputable à l’acquéreur et la clause pénale ne peut pas être mise en jeu.
De même, il a été jugé que l’acquéreur qui a tardé à effectuer une demande de prêt sans que soit prouvé que le refus de prêt soit causé par ce retard, n’est pas considéré comme fautif. (Arrêt de la Cour de cassation du 7 novembre 2007 n°06-14.227).
La caducité du compromis indépendamment de toute condition suspensive
En dehors d’une condition à la vente qui ne se réaliserait pas, le compromis est définitif. Si une partie refuse de signer l’acte de vente, la clause pénale peut jouer son plein effet et permettre une indemnisation de la partie lésée.
C’est le cas par exemple lorsque des acquéreurs renoncent à l’achat car ils se séparent après la signature du compromis ou tout simplement changent d’avis passé le délai de rétractation.
Toutefois, les parties peuvent s’entendre pour annuler amiablement leurs engagements réciproques. Dans ce cas, elles ne font pas jouer la clause pénale mais signent une transaction pouvant prévoir une indemnisation selon les circonstances.
Il en va de même lorsqu’une partie souhaite renoncer à son engagement, avec l’accord de l’autre.
Le cas du décès d’une partie au compromis
En cas de décès du vendeur ou de l’acquéreur, son engagement à vendre ou acheter le bien se transmet à ses héritiers qui peuvent être redevables de la clause pénale en cas de refus de poursuivre la vente. Les difficultés peuvent s’enchaîner rendant parfois impossible la signature de la vente. Il faut en effet réussir rapidement à identifier les héritiers ou encore que les héritiers de l’acquéreur soient eux-mêmes finançables.
Pour éviter ces litiges, le compromis peut prévoir sa caducité en cas de décès d’une des parties avant l’acte authentique de vente et notamment une condition suspensive de survie des parties. Dans ce cas, la clause pénale ne sera pas due si une des parties venait à décéder.
La mise en jeu de la clause pénale et la suite
En pratique, l’agent immobilier est en première ligne lorsqu’une partie au contrat ne remplit pas ses obligations. Il doit remplir son obligation de conseil et peut essayer de trouver une solution amiable. Un protocole d’accord pourra ainsi être signé entre les parties pour mettre fin au compromis et prévoir une indemnisation le cas échéant, soit équivalente à la clause pénale, soit négociée. A défaut d’un tel accord et d’un versement volontaire, pour obtenir l’application de la clause pénale, le juge judiciaire devra être saisi par la partie lésée.
La réduction du montant de la clause pénale par le juge
La détermination du montant de la clause pénale n’est pas toujours aisée. Trop faible, il risque de ne pas suffire à ce que les parties se sentent contraintes de poursuivre leurs engagements, trop élevé, ce montant peut être réduit par le juge.
Le juge judiciaire dispose de la possibilité de réduire le montant de la clause pénale lorsqu’il est trop élevé par rapport au réel préjudice subi par la partie lésée. Dans un cas d’espèce où le vendeur avait pu revendre le bien dans des conditions plus avantageuses, la Cour a considéré qu’il était justifié de réduire le montant de la clause pénale.
Revente après la caducité, un nouveau mandat est-il nécessaire ?
Lorsque la vente ne se réalise pas, l’agence disposant d’un mandat de vente peut s’interroger sur les modalités de la remise en vente.
En pratique, la caducité d’un compromis n’entraîne pas la caducité du mandat de vente consenti à l’agent immobilier. En effet, l’opération prévue au mandat n’est pas réalisée, donc celui-ci se poursuit.
Il n’est donc pas obligatoire d’établir un nouveau mandat de vente pour que l’agence puisse remettre en commercialisation le bien.
Cependant, certains préfèrent signer un nouveau mandat de façon automatique. Cela permet de valider avec le vendeur sa volonté de poursuivre la vente.
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