TOUTE L'INFORMATION PRATIQUE POUR LES PROFESSIONNELS DE L'IMMOBILIER

L’alternance : une chance pour les métiers de l’immobilier ?

Publié le
Publié le
Réagir 0 réaction
1 121
Evaluer cet article

Si de plus en plus d’agences engagent des jeunes en apprentissage, ce type de contrat souffre encore chez certains d’une image peu flatteuse. L’alternance est pourtant l’une des solutions pour former et recruter à moindre coût un futur professionnel de l’immobilier.

photo : Happy office workers jumping and dancing in casual clothes or suit on gradient neon fluid background. Flyer with copyspace

Qui dit marché de l’immobilier en pleine effervescence, dit besoin en matière de recrutement. En 2021, selon la 6e édition du Panorama de l’immobilier et de la ville menée par le cabinet d’audit financier EY, le secteur a créé près de 51 100 emplois. Une tendance qui devrait se poursuivre et inciter les recruteurs à opter pour de nouveaux canaux afin d’étoffer leurs effectifs. L’alternance peut être l’une des solutions pour pallier le manque de salariés dans une agence, un syndic ou toutes autres structures immobilières. Il permet à une entreprise de recruter un ou une étudiante en apprentissage qui alterne entre des temps de présence en entreprise et des jours de cours en école, BTS ou à l’université.

Ce type de contrat est d’autant plus intéressant qu’il est subventionné par les pouvoirs publics. Le gouvernement vient de renouveler son soutien à l’alternance pour 2023 à travers une aide à l’embauche de 6 000 € pour le recrutement d’un salarié de moins de 30 ans en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation. Un bonus auquel il faut ajouter, dans le cadre d’un contrat d’apprentissage, l’exonération : des cotisations patronales relatives aux assurances sociales, des contributions CSA, Fnal et VM ; de la totalité des cotisations salariales d’origine légale et conventionnelle dues au titre des salaires versés à l’apprenti dans la limite de 79 % du Smic ; des cotisations patronales d’assurance-chômage versées par les employeurs qui ont adhéré au régime d’assurance-chômage ; de la contribution au dialogue social au taux de 0,016 %.

« Ces aides permettent aux professionnels d’embaucher en vue de préparer la croissance de l’entreprise, sans la fragiliser dans l’immédiat. C’est d’autant plus intéressant qu’il n’y a pas d’obligation d’embauche à la fin du contrat d’apprentissage », ajoute Diane Gillouin, responsable Placement/Alternance au sein de l’ESI FNAIM.

Le recrutement : étape essentielle

Pourtant, dans l’immobilier, l’alternance souffre encore d’une mauvaise réputation chez certains professionnels, en milieu rural comme dans les grandes villes : « Vous avez des gens qui voient ça comme un stage amélioré et recrutent n’importe qui. Là, c’est la déconvenue », indique Antoine Mesnard, fondateur du site Recrutimmo. Les contrats d’alternance lient les deux parties durant 1 ou 2 ans. Ils peuvent être rompus sans justification et sans préavis durant les 45 jours qui suivent sa signature par notification écrite. Mais passé ce délai, il est très difficile de l’arrêter. Sauf en cas de faute grave, l’employeur doit conclure un accord à l’amiable avec son apprenti pour rompre le contrat en suivant une procédure bien définie. « Si on ne sélectionne pas son alternant avec la même rigueur qu’un salarié lambda, on se retrouve avec un poids mort pour l’entreprise. C’est délétère pour les deux parties », conseille Antoine Mesnard.

D’autres professionnels refusent de s’intéresser à ce type de salarié car ils prétendent ne pas avoir le temps de les former. « Pour s’engager sur ce type de contrat, il faut avoir envie de transmettre aux plus jeunes ses connaissances, les ficelles et les pièges juridiques et fiscaux de l’immobilier », précise Pierre Pozzo, président du réseau Pozzo Immobilier qui emploie régulièrement des alternants. « La formation de l’alternant est le point essentiel pour qu’une solide relation se noue entre l’entreprise et l’apprenti. De plus, lorsqu’on accueille un nouveau salarié, on le forme. Alors pourquoi ne pas en faire autant avec un apprenti ? », s’interroge Antoine Mesnard.

Des entreprises engagées

D’autres professionnels jouent pleinement la carte de la formation en proposant un suivi personnalisé à l’alternant. Chez Citya Immobilier, une journée d’activité au siège est organisée tous les mois. « La dernière était une immersion au cœur d’une société d’assurances. Les jeunes devaient préparer un argumentaire et un packaging pour un produit d’assurance immobilière », indique Line de Kilmaine, directrice des ressources humaines chez Citya Immobilier. Au sein du réseau Pozzo, de nombreuses formations, en parallèle du cursus scolaire du jeune, lui permettent d’approfondir ses connaissances : « Nous avons notre propre école de formation en interne et tous les collaborateurs y participent, qu’ils soient ou non alternants. Ça peut aller de la formation à la photo, au droit civil, etc. Des formations en e-learning sont également proposées. L’alternant dispose ainsi d’une large palette pour connaître tous les métiers de l’immobilier », souligne Pierre Pozzo.

Reste que certains secteurs peinent à attirer les jeunes. La transaction reste le Saint Graal d’une grande partie des candidats. La gestion locative a de plus en plus le vent en poupe. « Le secteur sur lequel on peine à faire naître de l’enthousiasme chez les jeunes, c’est le syndic. Il y a pourtant de gros besoins, mais la profession souffre d’une image vieillotte. Quand on pense à la copro, on s’imagine en train de gérer du conflit, d’être stressé en permanence et de devoir veiller tard en assemblée générale », constate Marie Debens, directrice de l’IMSI Groupe IGS. Mais pour celles et ceux qui osent franchir le pas, l’expérience est souvent satisfaisante selon Citya Immobilier : « La pluridisciplinarité permise par ce poste séduit pas mal de jeunes qui ne connaissaient rien au métier de syndic. C’est d’autant plus intéressant pour nous qu’ils viennent parfois nous challenger. Leur formation scolaire vient mettre en relief certaines de nos pratiques et parfois, ils testent de nouvelles choses en AG avec leur tuteur », observe Line de Kilmaine.

Un passeport pour l’emploi

Un apport qui touche parfois jusqu’aux acteurs de l’immobilier haut de gamme. « Cette génération nous apporte beaucoup sur le digital », ajoute Ruth Meade Roux, directrice des ressources humaines pour Émile Garcin Propriétés chez qui l’on dénombre 5 alternants dans les agences parisiennes, 2 dans celles du Sud-Ouest et 1 en Belgique. Mais qu’on ne se trompe pas, les offres d’alternance dans l’immobilier de prestige sont encore rarissimes : « L’immobilier de luxe est un milieu très fermé et élitiste. Pour y entrer, il faut avoir des compétences pointues avec des candidats bilingues voire trilingues », constate Diane Gillouin. Des alternants qui, malgré leur jeune âge, doivent également se distinguer sur le plan technique : « Il faut parfois connaître des règles financières d’un autre monde », abonde Marie Debens.

Le milieu n’est pourtant pas fermé à ce type de candidature. Le CV, mais surtout la lettre de motivation et la maîtrise a minima de l’anglais, sont essentiels. Sur le terrain, les apprentis sont confrontés aux mêmes missions que leurs homologues de l’immobilier « standard ». Piges. Constitution des dossiers. Accueil. Prospection.

Si les entreprises y gagnent en embauchant des alternants après un savant recrutement, les apprentis se voient offrir, après cette première expérience, un véritable passeport pour l’emploi. À l’IMSI, 65 % des étudiants ayant terminé leur cursus sont directement embauchés en CDI. À l’ESI, le taux d’intégration sur le marché de l’emploi atteint les 97 %. Et pour cause, comme le rappelle Ruth Meade Roux, posséder une expérience en alternance sur son CV attire l’œil du recruteur : « On parle tout de même de jeunes qui travaillent et ont, dans le même temps, le nez dans leurs études. Ça ne fait pas tout sur un CV, mais ce n’est pas négligeable. Ils sont très courageux et j’ai une grande admiration pour eux », conclut-t-elle.

Témoignage

« Je suis en alternance au sein de l’entreprise Seqens, un bailleur social en Île-de-France. Je suis responsable site pour eux, ce qui signifie que je veille au bon entretien du bâtiment, des travaux de remise en état des logements quand les locataires quittent les lieux, etc. Ce n’était pas mon premier choix, même si le milieu HLM m’intriguait depuis une émission sur le sujet animée par Elise Lucet. J’ai envoyé des candidatures en gestion locative et en copro dans de nombreuses entreprises, sans obtenir de réponse, en passant par LinkedIn, Indeed et HelloWork. La seule agence prête à me prendre voulait que je travaille en tant que salariée pendant l’été afin de savoir si oui ou non elle serait prête à signer un contrat d’alternance avec moi. J’ai préféré refuser. Ce n’est pas simple de trouver une alternance dans le milieu de l’immobilier. En tant qu’étudiant, ce type de contrat est un vrai plus pour nous. Ça nous permet d’avoir un petit salaire et de mettre en pratique les théories que l’on voit en cours. Toutefois, cela demande beaucoup de travail et d’organisation pour jongler entre les périodes de cours et les phases en entreprise. »  Coralie – 21 ans

 

 

Ludovic Clerima

La référence des pros de l’immobilier enfin chez vous !
En savoir plus

A lire également
JDA EDITIONS
Du même auteur
Newsletter

Recevez l'essentiel de l'actualité immobilière sélectionné par la rédaction.

Sur le même thème
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Le journal trimestriel

Vous souhaitez consulter notre dernier magazine ou l'une de nos éditions précédentes ?

Consulter en ligne Abonnez-vous
Découvrez nos formules d'abonnement