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« Dégradations d’agences immobilières en Pays basque : la mauvaise cible », Jean-Marc Torrollion, Président de la FNAIM

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Jean-Marc Torrollion, Président de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) réagit aux dégradations d’agences immobilières au Pays basque, en réaction à la tension sur le marché immobilier et la hausse des prix. Pour le Président de la FNAIM, s’en prendre aux agents immobiliers revient à se tromper de cible : il appelle les pouvoirs publics à se saisir de cet enjeu de toute urgence.

photo : jean marc torrollion

Ce n’est pas la première fois, mais il faudrait que ce soit la dernière. Il y a quelques jours, des menaces ont été taguées sur cinq agences immobilières au cœur du village basque de Saint-Pée-sur-Nivelle. L’Union du patrimoine, signataire de ces graffitis, milite pour l’indépendance du Pays basque et l’interdiction aux non-Basques d’y devenir propriétaires : « Aujourd’hui de la peinture, demain les bombes. » menacent-ils. Derrière ces messages, ils veulent dénoncer l’augmentation du prix des logements, ininterrompue en Pays basque depuis un quart de siècle, qui a entraîné un cruel décrochage entre revenus des familles et valeur des biens sur le marché.  Ils l’imputent aux acquéreurs venus d’ailleurs, prêts à payer cher leur jouissance de la beauté et de la douceur du pays et, au prix d’un raccourci facile, aux agences immobilières qui commercialisent ces biens.

Quand un dysfonctionnement du marché conduit à mettre en péril la sécurité des biens et l’intégrité physique des personnes, c’est que la situation est d’une gravité sans pareille.

Il est clair d’abord que les militants de la cause basque se livrent ici à des actes répréhensibles. De plus, les agresseurs se trompent de coupables : les agents immobiliers n’ont pas le pouvoir de fixer les prix d’un marché donné. Logements et terrains, la matière première de leur travail, sont la propriété de ménages, en l’occurrence le plus souvent basques, qui choisissent de les céder et en exigent le prix qu’ils estiment payable. On rappellera que l’agent immobilier n’est que le mandataire du vendeur et que la Loi du marché s’impose à eux.

Le territoire basque, comme l’ensemble des territoires à forte attractivité, souffre du tiraillement entre prix et solvabilité des candidats à la propriété et à la location. Les professionnels de la transaction font alors plus que de jouer le rôle légal de mandataires des cédants : ils refusent la fatalité du marché, calment le jeu, tempèrent les ardeurs parfois sans limite des propriétaires.

Par calcul, puisqu’ils sont conduits à mesurer qu’une vente ne se réalisera pas dans des délais normaux si le prix est excessif ou, si un crédit n’est pas consenti, à ce qu’elle n’aille pas jusqu’à son terme. Mais aussi par vertu :  la plupart des agents immobiliers en Pays basque sont basques. Ils vivent dans leur chair les dérèglements du marché. Leurs propres enfants sont pénalisés par l’inflation indécente des prix et ils le dénoncent aussi. Les prix des locations meublées saisonnières, tirées vers le haut par Airbnb -prouvant que la situation est encore pire sans intermédiaire- ont dérivé et abiment le marché de la location dans son ensemble. L’offre des biens mis à la location de longue durée s’étiole, pénalisant les personnes du cru qui en ont besoin.

Alors qui est responsable ? Les vendeurs qui manqueraient d’attachement à l’intérêt général ? Or, comment peut-on accuser quelqu’un qui souhaite réaliser une plus-value sur la cession de sa maison ou de son appartement ? Il vaut mieux chercher du côté de la décision publique, ou plutôt de son absence. Les élus locaux ont sous-estimé les besoins en logements et l’insuffisance de l’offre a produit la surchauffe. Combien ont eu la prescience de constituer des réserves foncières pour réguler les constructions ? Combien ont recouru à un établissement foncier public, dûment doté au plan financier, pour acheter des terrains à des prix raisonnables et en contrôler la mise en marché selon un échéancier maîtrisé ? Pis encore : on a vu des maires vendre les emprises publiques au plus offrant, alors même que, depuis la loi de mobilisation foncière de 2013, ils peuvent vendre moins cher sous condition d’édifier des logements intermédiaires ou sociaux. Les décisions de juguler la spéculation des locations touristiques directes n’ont pas non plus été prises à temps.

Le résultat est terrible : on se précipite sur la xénophobie comme un remède. On est prêt en Pays basque, en Corse, en Bretagne, à voter des délibérations intenables au plan constitutionnel pour réserver les logements aux habitants vernaculaires, à l’exclusion des autres, sans se soucier des conséquences aussi radicales que les décisions.

Enfin, l’État a sa part de responsabilité, ayant passé des années à chercher en vain le moyen juridique d’inverser le mécanisme de taxation des plus-values de cession des terrains, par rapport aux ventes d’immobilier déjà construit, pour que l’imposition soit progressive avec la durée de détention et ainsi dissuader la thésaurisation et la spéculation. Les tentatives se sont heurtées au principe constitutionnel d’égalité devant l’impôt entre propriétaires de bâti et de non bâti. Des expérimentations locales et temporaires sont possibles et on les a négligées. Au Pays basque, elles seraient salutaires.

La FNAIM propose de prévoir un régime d’exonération pour les ventes de résidences secondaires si l’acquéreur le fait pour un usage de résidence principale. Il faut aussi, comme l’a proposé le député de Haute-Garonne Jean-Luc Lagleize, interdire les ventes par adjudication des communes : un maire doit avoir le courage d’expliquer à ses administrés que maximiser des recettes de cession d’immobilier, c’est enflammer le marché local et hypothéquer l’avenir pour des générations entière d’habitants.

La conscience politique doit se réveiller, au Pays basque et ailleurs, où il devient impossible d’acheter ou louer un logement sur le territoire où l’on est né et où ses parents et ses grands-parents ont vécu. À se cacher le diagnostic, à différer la prescription curative, on expose ces régions de notre pays à l’incendie social. Plus que l’immobilier, c’est la cohésion de la France qui est en jeu.

 

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Vos réactions
  • Par Claude, il y a 3 années

    Ces actes sont répréhensibles c’est certain mais c’est le risque de se vouloir Fédération Nationale de l’immobilier (en bandeau du site). Cette appellation stigmatise alors qu’il s’agirait de se limiter à fédération nationale des agents immobiliers pour ne plus être apparenté à l’immobilier mais seulement à une profession.

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