Le droit au logement pour tous et sans discrimination est un objectif majeur des acteurs de l’immobilier. Ce que dit la loi.
Les agents immobiliers sont au coeur de la lutte contre la discrimination à l’accès au logement et doivent porter une attention particulière à cette problématique dans l’ensemble de leurs activités. De nombreuses mesures ont été mises en place afin de tendre vers cet objectif. La réglementation s’est développée en ce sens et des outils ont été créés.
Le droit au logement et la réglementation
Plusieurs lois ont reconnu l’accès au logement comme un droit fondamental :
la loi du 6 juillet 1989 relative à la location précise que l’exercice de ce droit implique la liberté de choix pour toute personne de son mode d’habitation, grâce au maintien et au développement d’un secteur locatif et d’un secteur d’accession à la propriété ouvert à toutes les catégories sociales ;
la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement dispose que garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation. Elle précise que toutes les familles éprouvant des difficultés particulières ont droit à une aide de la collectivité pour accéder à un logement décent pourvu de fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques.
pour sa part, le Conseil constitutionnel a rendu une décision le 19 janvier 1995 (n° 94-359-DC) précisant que le droit au logement décent est considéré comme un objectif à valeur constitutionnelle.
Les obligations de l’agent immobilier dans la lutte contre les discriminations
– L’obligation déontologique de non-discrimination
Le Code de déontologie des agents immobiliers, en vigueur depuis le 1er septembre 2015, prévoit que les professionnels s’obligent notamment à ne commettre aucune discrimination tant à l’égard des personnes physiques que des personnes morales.
Une discrimination se définit comme une inégalité de traitement fondée sur un critère interdit par la loi.
Il s’agit des critères mentionnés à l’article 225-1 du Code pénal :
l’origine,
le sexe,
la situation de famille,
la grossesse,
l’apparence physique,
la particulière vulnérabilité résultant de la situation économique apparente ou connue de son auteur,
le patronyme,
le lieu de résidence, l’état de santé,
la perte d’autonomie,
le handicap, les caractéristiques génétiques,
les moeurs,
l’orientation sexuelle,
l’identité de genre,
l’âge,
les opinions politiques,
les activités syndicales,
la capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français,
l’appartenance ou non, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou religion déterminée.
Cette interdiction de tout comportement discriminatoire concerne les différentes activités de l’agent immobilier : la location, la gérance, la vente ainsi que le syndic. La responsabilité de l’agent immobilier peut être engagée même s’il ne fait qu’agir sur la demande de son client. Une décision de la Cour de cassation a validé la condamnation pénale pour discrimination directe contre un agent immobilier qui avait exclu des personnes d’origine étrangère lors de la recherche de locataires alors qu’il agissait conformément à des instructions impératives de son client (Cass., ch. criminelle, du 7/6/2005 n° 0487354).
– Une obligation de formation professionnelle adaptée
Suite au rapport Nogal « Louer en confiance » de juin 2019, un décret du 14 octobre 2020 a créé une nouvelle formation obligatoire pour les professionnels de l’immobilier. Depuis le 1er janvier 2021, au cours des trois années consécutives d’exercice, la formation continue doit inclure au moins deux heures portant sur la non-discrimination à l’accès au logement.
A noter que pour la demande de renouvellement de leur carte, les titulaires de la carte professionnelle expirant entre le 1er janvier et le 31 mars 2021 doivent justifier d’activités de formation continue relative à la non-discrimination à l’accès au logement d’une durée minimale d’une heure.
– Les sanctions
Les sanctions encourues par le propriétaire et l’agent immobilier qui refusent la vente ou la location d’un bien en se fondant sur un critère discriminatoire sont les suivantes :
des dommages et intérêts pour la victime de discrimination ;
une sanction pénale d’un maximum de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende et jusqu’à 225 000 euros pour une personne morale ;
une amende administrative en cas de non-respect de la liste des justificatifs qu’un bailleur peut demander au candidat locataire, dont le montant maximum est de 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale.
L’agent immobilier encourt une sanction supplémentaire : l’interdiction d’exercice applicable à tout professionnel ayant fait l’objet depuis moins de dix ans d’une condamnation définitive d’au moins trois mois d’emprisonnement sans sursis pour des faits de discrimination.
Que faire en pratique ?
En tant que professionnel, vous pouvez aider vos clients à déconstruire leurs préjugés. Et si un client justifie, même implicitement, son refus de louer ou de vendre par un motif discriminatoire, il est nécessaire de refuser clairement cette démarche. Pour vous accompagner, en proposant des mesures, procédures et outils permettant de se prémunir des risques, le Défenseur des droits a publié un guide pratique à destination des professionnels : « Louer sans discriminer : un manuel pratique pour professionnaliser ses pratiques». Le Défenseur des droits a aussi publié un guide précisant les 8 points clés pour louer sans discriminer .
1) Définir l’engagement à louer sans discriminer avec le propriétaire : pour cela, l’agent immobilier peut ajouter une clause type de non-discrimination dans le mandat.
2) Définir les conditions de la location dans le strict respect de la loi : il faut donc connaître et déterminer les conditions de mise en location envisagées par le bailleur afin de garantir le respect de la loi et adapter le projet aux obligations légales.
3) Déterminer les différentes garanties pouvant être obtenues et les pièces justificatives pouvant être demandées, et notamment ne demander au candidat locataire et à la caution que les justificatifs autorisés par le décret du 5 novembre 2015.
4) Prévenir les discriminations par des tiers (assurance loyer impayé, règlement de copropriété) : il vous faut vérifier que les actes ou contrats concernés n’imposent pas de condition qui serait discriminatoire. Dans le cas contraire, le professionnel doit informer les parties concernées et prendre les mesures nécessaires, par exemple :
dénoncer un contrat d’assurance GLI ;
refuser de prendre le mandat ;
ou privilégier d’autres garanties et exclure celles qui sont discriminatoires.
5) Publier une annonce sans éléments discriminatoires : le professionnel doit vérifier que les annonces ne comportent que des conditions indispensables pour garantir la bonne exécution des obligations locatives (paiement régulier du loyer, bon entretien du logement) et qu’aucun candidat ne soit écarté, même involontairement.
6) Garantir l’égalité de traitement à toutes les étapes de la relation avec les candidats (mêmes informations pour tous, mêmes documents demandés, même délai de traitement de la demande, etc.), en définissant par
exemple des procédures et consignes à respecter à chaque étape et, le cas échéant, des outils nécessaires, pour s’assurer de leur respect.
7) Choix du locataire sans discriminer : il ne faut retenir que les critères en rapport avec la mise en location et ne définir que les conditions indispensables à la bonne exécution de ses obligations par le locataire. Exiger des ressources provenant uniquement d’un salaire tend à exclure les personnes handicapées par exemple.
8) Établir un bail conforme au contrat type afin de garantir aux locataires les mêmes conditions de location
conformes à la loi.
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