La crise sanitaire a accéléré l’évolution des comportements immobiliers, au fur et à mesure des épisodes de confinement. ORPI tire le bilan de 2020, année inédite et dessine les perspectives 2021.
Observée dès 2019, une nouvelle cartographie immobilière se dessine au profit des villes moyennes. Manque d’espace, cohabitation contrainte et promiscuité avec le voisinage ont amené les habitants des grandes villes à rêver d’espace, de verdure mais surtout à reconsidérer leur cadre de vie comme une priorité. A proximité des grands bassins économiques, les villes moyennes ont pu tirer leur épingle du jeu sur l’année 2020. Un mouvement illustré par des recherches sur le site Orpi.com où l’on voit apparaître de nouvelles villes. Par ordre d’intérêt en province : Limoges, La Rochelle, Pau et Cannes en province. En Île-de-France : Argenteuil, Antony, Massy, Champigny-sur-Marne et Saint-Maur des Fossé.
« Les villes moyennes ont fait figure de locomotives pour le marché en 2020. La situation économique et sanitaire ainsi que le développement du télétravail ont accéléré l’envie d’un mode de vie plus cocooning qui se profilait déjà depuis plusieurs mois. Il ne s’agit pas de se priver totalement des commodités et infrastructures des métropoles, mais de privilégier le confort global du cadre de vie. Une composante de plus en plus importante dans la définition d’un projet immobilier », précise Christine Fumagalli, Présidente d’ORPI.
Toutefois les mêmes lois régissent ces nouveaux marchés, soumis de la même manière à l’offre et la demande. Avec le risque de reproduire un déséquilibre : ainsi dans les villes où la demande augmente, les biens en vente trouvent très rapidement acheteur et sans longue phase de négociations, à l’instar des métropoles.
Pas d’exode rural, mais un réajustement dans les grandes villes
Les métropoles restent attractives et la demande est toujours supérieure à l’offre, bien qu’on constate un léger réajustement des prix, notamment sur les biens avec défauts ou travaux, et une plus grande exigence des futurs acheteurs. « Le déséquilibre offre/demande persiste dans les grandes villes. A Paris par exemple, en sortant du confinement du mois de mai, il y avait toujours un ratio déséquilibré. Ce n’était plus 1 vendeur pour 80 acquéreurs potentiels, mais 60. A Lyon, Nantes ou Montpellier, les marchés se tendent davantage et l’offre se raréfie mais la demande est croissante. Pour preuve, Nice, Paris et Toulouse arrivent dans le top 10 des recherches sur le site du réseau », indique Christine Fumagalli.La maison n’a jamais autant fait rêver les Français.
La maison n’a jamais autant fait rêver les Français
C’est LE critère de l’année 2020 : la maison individuelle est devenue le synonyme du logement idéal. Côté acquéreurs, cela s’est traduit dès le mois de juin par un pic exceptionnel de + 45% de recherches d’achat sur le site, par rapport à la même période en 2019 ! Une tendance qui s’est poursuivie tout l’été, et qui concerne également les jeunes locataires : 30% des recherches de maisons sont effectuées par des locataires entre 18 et 25 ans.
« Un projet immobilier s’organise sur le long terme, et la crise n’incite pas à se précipiter. Il y a toujours une période de transition entre le rêve et la réalité ; or le dernier trimestre a été particulièrement difficile sur le plan économique et sanitaire, ce qui a aussi contraint certains candidats à l’achat à reporter leur projet », note Christine Fumagalli, Présidente d’Orpi.
Sans surprise, le parcours d’achat s’est particulièrement complexifié cette année, à la fois par le stop and go des confinements mais aussi par l’impact de la crise et le durcissement des conditions des prêts bancaires. Dans les faits, les acquéreurs de maisons ont finalement peu fait évoluer leurs critères : la surface moyenne passe de 100m2 en 2019 à 103m2 en 2020 – insuffisant pour obtenir une pièce en plus avec un budget moyen relativement stable, de 217 617 euros (soit + 2,2%).Côté vendeurs, les estimations de maisons n’ont jamais été aussi dynamiques. En juillet et août, le site Orpi.com en a enregistré respectivement + 76% et + 78% par rapport à la même période l’an passé.
« Sur la même période, nous avons constaté chez Orpi une légère hausse des mandats de 16% en juillet et 11% en août. Il n’y a pas de rapport de proportionnalité, car la part de vendeurs rejoint celle des propriétaires curieux, qui souhaitent se rassurer sur la valeur de leur bien, dans un contexte où aucun professionnel ne pouvait prévoir ni la hausse ni la baisse des prix », poursuit Christine Fumagalli.
L’attrait pour les maisons se confirme également dans les projets d’acquisition des résidences secondaires. La crise a fait émerger une tendance de bi-résidence permise grâce au télétravail. Ainsi, de nouveaux profils d’acquéreurs émergent et s’intéressent désormais aux avantages des résidences secondaires, permettant à ce marché de niche de moderniser son image. Pour preuve, lors du sondage Orpi réalisé en juillet dernier, 1 répondant sur 4 déclarait envisager l’achat d’une résidence secondaire.
« L’achat d’une résidence secondaire n’est plus, comme auparavant, un signe de réussite passé la quarantaine : 28 % de ceux qui aspirent acheter une maison secondaire ont moins de 39 ans, 11 % moins de 30 ans. Et un quart d’entre eux est locataire de sa résidence principale », commente Christine Fumagalli.
L’appel d’air du marché de la location longue durée
Les deux confinements ont eu un impact fort à la fois sur le comportement des propriétaires-bailleurs et celui des locataires. Du côté des propriétaires-bailleurs, ceux qui avaient misé sur la location courte durée ont dû revoir leurs projets, le tourisme étant très limité. Ce serait néanmoins un raccourci pour Orpi d’affirmer que tous les investisseurs se sont reportés sur le marché de la location longue durée.
Du côté des locataires, la coopérative observe plusieurs cas de figure qui les ont amenés à quitter leur logement. Le plus fréquent concerne les étudiants rentrés chez leurs parents : bien que temporaire, cela a permis de remettre immédiatement de l’offre sur le marché. D’autre part, la période actuelle a poussé bon nombre de locataires à changer de logement, comme le montre le dernier sondage Orpi, mené auprès de 750 répondants locataires. On y apprend que 38% des sondés aspirent à déménager. Ces derniers oscillent entre réflexion et projet concret : 32% d’entre eux y réfléchissent encore, alors que 34% prévoient de concrétiser leur projet dans les 6 mois. Parmi les locataires qui songent à déménager, près de 40% souhaitent accéder à la propriété.Si l’envie reste présente, ce sont parfois les conditions d’accès au crédit qui freinent : parmi les 62% des sondés qui ne souhaitent pas changer de logement, 11% mettent en cause les difficultés pour obtenir un prêt.
Un effet directement ressenti par le réseau. D’abord en termes de recherches sur le site Orpi.com : + 30% de recherches en location au mois de juin 2020 par rapport à 2019, + 20% en août et encore 17% en septembre et 13% en octobre 2020. Dans les agences, cela se traduit par l’augmentation des signatures de mandats de location : +11 % en juin, 4% en août et 7% en septembre (vs 2019) mais aussi l’augmentation des signatures de baux : + 14% en juin, 4% en août et 5% en septembre-octobre (vs 2019). Preuve que les projets vont bon train, même si le second confinement a ralenti cette dynamique.
Perspectives 2021
En 2021, le marché sera drivé par plusieurs facteurs :
•Malgré des taux restés très bas, les restrictions des banques entravent sérieusement la confiance des Français et réduisent la solvabilité des ménages : “Le dernier trimestre a été brutal pour certains profils qui avaient reçu un accord de la banque au premier semestre puis qui se sont vus exclus du parcours de financement une fois le bien de leur rêve trouvé. Dans le réseau se sont 3 fois plus de refus de crédits. L’immobilier est souvent le projet d’une vie. L’agent immobilier joue le rôle de premier filtre en présentant un candidat à l’achat solvable. Notre défi 2021 est de redonner confiance aux ménages les plus fragiles et primo-accédants, et les accompagner plus que jamais pour rétablir un accès équitable à la propriété. Si on ne revoit pas ces conditions, c’est la santé économique du secteur immobilier qui pourrait être impactée” déclarait la Présidente du réseau. Face à l’appel de toute la profession, le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) a réagi. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a récemment annoncé que la durée maximum d’emprunt passerait de 25 à 27 ans, et le taux maximum d’endettement serait porté à 35% contre 33% précédemment. Des règles qui devront désormais être suivies obligatoirement par les banques. Une nouvelle qui va dans le bon sens, mais le réseau restera vigilant. Pour Orpi, il est primordial de prendre en compte le profil du porteur de projets et de ne pas se limiter au taux d’endettement, au risque d’écarter du parcours immobilier certains profils : les bailleurs, les indépendants, etc. Le cadre a été assoupli mais ne permet pas un traitement individualisé des profils.
• Orpi restera également attentif à l’expérimentation de l’encadrement des loyers dans les grandes villes. Telle qu’elle a été présentée, un loyer maximum applicable correspondant au loyer médian du quartier, augmenté de 20%. Or cette mesure pourrait être contre-productive et avoir pour conséquence d’augmenter les prix des loyers actuels, puisque les propriétaires pratiquant actuellement des prix modérés souhaiteront, logiquement, s’aligner au prix médian, quitte à augmenter leur loyer. Pour éviter des disparités entre les territoires, la réflexion doit avant tout être portée sur l’offre.
• Quant à l’attrait pour les zones rurales ou villes moyennes, le réseau constate déjà quelques revirements : “On observe, à la marge pour l’instant, que des biens achetés par des citadins dans des zones plus rurales à l’issue du premier confinement sont de nouveau mis en vente aujourd’hui. D’où l’importance de se projeter sur le long terme et d’être accompagné par un professionnel pour bien questionner son projet ” conclut la Présidente.