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L’analyse de Bernard Cadeau : Le rapport Nogal est-il le chainon manquant de la loi Élan ?

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Bernard Cadeau, Past Président du réseau ORPI revient sur les 37 propositions remises par Mickaël Nogal au premier ministre pour sécuriser les mises en location et améliorer les rapports entre bailleurs et locataires.

photo : BERNARD CADEAU

Le rapport Nogal est-il le chainon manquant de la loi Élan ? Je ne sais si la réponse est affirmative, mais ce rapport, qui deviendra bientôt une loi, pose deux postulats importants : rétablir la confiance entre bailleurs et locataires, d’une part, et désigner l’administrateur de biens comme tiers de confiance dans cette relation particulière, d’autre part.

Un mot tout d’abord sur la méthode : ce rapport est le fruit d’une vaste consultation tous azimuts, ce qui n’est pas si fréquent et mérite d’être souligné.

Rappelons, au préalable, dans quel contexte de marché nous sommes : la France souffre depuis très (trop) longtemps d’un déséquilibre important entre offre et demande de logements, qui entraîne une pression constante sur les prix, principalement en zones tendues. Les investisseurs institutionnels se sont détournés du marché, notamment sur le segment du logement intermédiaire, et le logement social ne peut pas tout. Restent les petits investisseurs particuliers qui croient aux vertus de la pierre. Pour autant ces bailleurs privés, contrairement aux idées reçues, ne possèdent pas un patrimoine immobilier gigantesque et sont à la tête de moins de deux logements en moyenne. Dans le parc locatif privé de près de sept millions de logements, deux tiers sont gérés directement de particulier à particulier, pour cause « officielle » de manque de confiance dans l’administrateur de biens et/ou d’honoraires trop élevés.

Établir un cercle vertueux en changeant de regard sur la société

Mais on doit à la vérité de dire que c’est à l’occasion de ces transactions locatives en direct que sont relevés le plus de litiges, le plus d’infractions et le plus de discriminations de toutes sortes ! Alors comment venir à un cercle vertueux et rétablir définitivement la confiance entre bailleurs et locataires ?

D’abord, et même si cela peut surprendre, en changeant de regard : les modes de vies évoluent, la mobilité professionnelle devient une réalité et les propriétaires d’aujourd’hui seront locataires demain ailleurs, puis redeviendront sans doute un jour propriétaires ou investisseurs, les habitants des centre villes, qui sont locataires pour des raisons budgétaires, sont de plus en plus souvent investisseurs immobiliers dans d’autres régions, et nous pourrions citer bien d’autres cas ! Les relations devraient donc être, avec le temps, moins manichéennes.

D’autre part, rétablir la confiance et bannir certaines discriminations passent par une redéfinition globale de la solvabilité des locataires. L’évolution permanente du marché du travail et la tendance forte vers une autonomie personnelle doivent conduire à mesurer les ressources de chacun à une aune différente du seul CDI, sans que le bailleur ait à craindre pour son règlement.

Ensuite, l’administrateur de biens doit disposer de plus d’autonomie pour s’affirmer comme le tiers de confiance, car c’est bien la confiance seule qui motive l’investissement immobilier. Il doit garantir un juste équilibre entre les intérêts des uns et des autres. Il est le seul en situation de lutter efficacement contre les discriminations de toutes sortes. Il est le garant du bon état des logements mis sur le marché.

Remplacer le dépôt de garantie…

Nombreux sont les conflits qui se cristallisent autour du dépôt de garantie, souvent appelé à tort, caution. Ce dépôt, réduit au fil du temps à un mois, ne représente plus guère de valeur financière pour le bailleur, mais demeure une valeur symbolique, un moyen de pression, que certains locataires évacuent en omettant de régler le dernier loyer ! Le rapport propose de consigner ces dépôts de garantie dans un seul organisme centralisateur, sorte de nouvelle administration. Outre la lourdeur probable de ce système, donc son inefficacité, évitons de faire grossir le millefeuille administratif !

Alors, allons plus loin. Pourquoi ne pas supprimer purement et simplement ce dépôt de garantie ?

J’entends d’ici les voix qui s’élèvent et crient au scandale ! Prenons un peu de temps et faisons le pas de côté qui s’impose : la sinistralité en matière de loyers impayés est inférieure à 3 % et seuls 15 % des bailleurs ont souscrit une assurance garantie locative.

Le dépôt de garantie n’appartient pas au bailleur et ne le met pas à l’abri des mauvaises surprises en cas de sinistre dans 85 % des cas où aucune assurance n’a été souscrite. On estime par ailleurs à plus de quatre millions le nombre de logements loués de particulier à particulier sans versement de ce dépôt. Enfin, c’est très souvent sa restitution qui génère les conflits.

…par un système assurantiel engageant le locataire et le propriétaire

Pas question pour autant de laisser le bailleur démuni et privé de recours. C’est lui qui prend le risque financier de l’investissement ; il doit être garanti de percevoir ses loyers et disposer de son bien en bon état, au terme du contrat. Un système assurantiel garantissant au bailleur comme au locataire le strict respect de leurs droits respectifs est possible en portant ce sujet sensible sur un terrain neutre. Ceci suppose un changement de paradigme qui passe par un engagement conjoint du locataire (qui, au passage, retrouve du pouvoir d’achat) et du bailleur. La mutualisation du risque par une souscription généralisée renforcera la sécurité du bailleur.

Alors ? Utopie ? Foutaises ? Gardons-nous de jugements définitifs trop rapides !

Ce n’est pas un hasard, si de jeunes et prometteuses start up, associées à des assureurs, ont anticipé en basant leur stratégie sur ces sujets. Elles ne viennent pas du monde de l’immobilier mais, pour elles, il est évident que les choses peuvent et doivent évoluer.

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