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Exécution anticipée du mandat de vente et rétractation du mandant, attention, danger !

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La possibilité d’exécuter par anticipation un mandat de vente comporte des risques pour l’agence immobilière. Les experts juridiques de Modelo font le point.

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En réformant le droit du démarchage à domicile devenu le droit des contrats conclus « hors établissement », la loi Hamon du 17 mars 2014 a autorisé une pratique jusqu’alors interdite : celle permettant au mandant qui bénéficie d’un droit de rétractation de 14 jours de demander à l’agence de commencer à exécuter son mandat avant l’expiration de ce délai.

Mais ce qui est parfois ignoré, c’est le fait que cette demande d’exécution anticipée ne prive pas le mandant de son droit de se rétracter. Il pourra le faire tant que l’agence n’aura pas « pleinement exécuté » la mission qui lui a été confiée, à savoir, dans le cadre d’un mandat de vente, trouver un acquéreur aux conditions prévues au mandat.

Tout l’enjeu est donc de déterminer à partir de quand la mission de l’agence est totalement remplie puisque cela met fin à l’exercice du droit de rétractation du mandant.

La réponse impose de combiner les dispositions protectrices du consommateur (C. cons., art. L. 221-25 et L. 221-28) et celles propres à la transaction immobilière avec l’article 6 de la loi « Hoguet » qui interdit à l’agent de recevoir la moindre rémunération ou « somme d’argent » tant que la vente n’a pas été « effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l’engagement des parties » et l’article 73 du décret du 20 juillet 1972 qui retarde au jour de la réitération de la promesse de vente par acte authentique le moment du versement des honoraires de l’agence. Autrement dit, le second de ces textes fixe le moment à partir duquel cette rémunération peut lui être versée, alors que le premier détermine le moment où l’agent acquière son « droit à rémunération », ce qui devrait logiquement coïncider avec celui où il a « pleinement exécuté » sa mission.

Or, une opération de courtage engagée par un agent immobilier n’est considérée comme achevée qu’à partir du moment où la vente, « constatée dans un seul acte écrit contenant l’engagement des parties », est parfaite : l’agent a rempli sa mission lorsque toutes les formalités (droit de préemption urbain, formalités bancaires) et facultés de rétractation (droit de rétractation, faculté de dédit) ont été purgées, et une fois levées toutes les conditions suspensives (E. Cruvelier, Rép. Dalloz de droit commercial, V° Agent immobilier) puisqu’une condition suspensive pendante suspend la réalisation de l’évènement qu’elle affecte. L’acte écrit contenant l’engagement des parties n’est d’ailleurs pas nécessairement un acte authentique. Un compromis faisant de la signature de l’acte authentique une simple formalité destinée à retarder les effets de la vente suffit. Il en va de même d’un compromis de vente ne comportant pas de clause de dédit et dont la condition suspensive d’obtention d’un prêt est réalisée (CA Amiens, 30 sept. 2004, n° 03/02141).

Mais tout cela peut-il intervenir dans le délai de 14 jours ? Selon la Direction Départementale de la Protection des Populations de l’Isère, non : la vente « ne peut de toute évidence pas intervenir dans les 14 jours à compter de la signature du mandat. Par conséquent, il est impossible de rencontrer l’hypothèse selon laquelle l’agent immobilier pourrait prétendre à une rémunération pour un mandat partiellement ou totalement exécuté dans un délai de 14 jours. » (Courrier du 22 janv. 2018).

Alors, une simple offre d’achat ferme peut-elle suffire ? La Cour de cassation a déjà eu l’occasion de préciser qu’une lettre d’intention d’achat précisant que l’établissement d’un compromis n’était pas une condition de formation de la vente et que l’offre de vente et son acceptation n’étaient pas soumises à un formalisme particulier pouvait valoir vente (Cass. 3e civ., 29 sept. 2016, n° 14-26674), dès lors que l’offre est acceptée par le mandant.

Or, on constate qu’en pratique, aujourd’hui, dans un contexte de marché très tendu, il peut arriver que le mandant refuse d’accepter l’offre au prix du mandat qui lui est transmise alors même qu’il s’est engagé dans le mandat à le faire et que son refus peut, toujours aux termes du mandat qui l’engage, actionner le versement d’une indemnité compensatrice au profit de l’agence égale au montant des honoraires prévus.

Plus précisément, il refuse d’accepter l’offre et se rétracte. En a-t-il encore le droit ? Malgré son iniquité, la réponse devrait être positive. En effet, faute d’accord « dans un seul acte écrit contenant l’engagement des parties », la mission de l’agence n’est pas encore « pleinement exécutée ». Le mandant peut donc encore se rétracter, faculté discrétionnaire que la loi lui confère, ce qui a pour conséquence d’anéantir le mandat qui contenait la clause indemnitaire… L’agence aura donc travaillé pour rien.

En conclusion, la possibilité d’exécuter par anticipation un mandat de vente comporte donc des risques pour l’agence. Il faut en être conscient. Des risques évidents lorsque le mandat n’est pas exclusif en raison de la probable concurrence entre différentes agences et différentes offres. Des risques plus limités en cas d’exclusivité si l’agence prend la précaution d’attendre, en cas de doute, l’expiration du délai de rétractation pour transmettre son offre d’achat au vendeur. Des risques signalés dès la parution de la loi Hamon qu’il est toujours utile de rappeler (M. Feferman et E. Petit, Du « démarchage » aux contrats conclus « hors établissement » : quels impacts sur les pratiques des agents immobiliers ? AJDI 2014, p. 606).

 

 

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