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Indépendance des courtiers de crédit

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Le courtage en crédit a connu un développement très important tant dans son nombre d’acteurs, que dans la contribution à la production bancaire de crédits, qu’ils soient immobiliers ou de restructuration. Les rapprochements d’enseignes ou leur rachat par des établissements de crédit au cours des derniers mois peuvent toutefois interpeller quant à la neutralité de certaines enseignes.

Interview du directeur de l’information et du partenariat In&Fi Bruno Rouleau, par le journal de l’agence : Quel est le panorama actuel du courtage ?
Bruno Rouleau :
Il est difficile de connaître le nombre exact de cabinets en activité à ce jour car il n’existe pas encore d’organe de tutelle suffisamment représentatif dans le métier, mais on l’estime à environ 2 000- 2 200. Ces cabinets sont d’ancienneté, de taille, de segment d’activité très disparates. Les enseignes les plus connues sont généralement les plus anciennes (CAFPI, MeilleurTaux, ACE, EMPRUNTIS) et celles positionnées essentiellement sur le courtage en crédits immobiliers. D’autres ont bâti leur activité sur la restructuration de crédits. Enfin des enseignes, comme la nôtre, émergent depuis 4-5 ans avec un concept plus global de réponse à tous les besoins de financement des particuliers, et ce souvent en proximité et non en plateforme comme dans la plupart des cas. On peut estimer qu’une vingtaine d’acteurs représentent à eux seuls 80% du marché global.

L’annonce en juin 2007 de l’ouverture du capital de MeilleurTaux semble avoir donné le coup d’envoi à une déferlante d’opérations capitalistiques au sein de ce secteur.
Bruno Rouleau :
En effet, la vague actuelle ne semble pas s’arrêter. Et quand bien même la jeunesse de la profession donne des arguments pour un mouvement de concentration, nous ne pensions pas qu’il se ferait si rapidement. Les deux grandes catégories d’investisseurs sont des groupes bancaires et des compagnies d’assurance. MeilleurTaux a été racheté en septembre 2007 au travers un montage financier avec holding, par le Réseau Caisses d’Epargne. Empruntis vient de passer entre les mains d’un consortium d’assureurs (GMF, MMA…). D’autres opérations sont encours de finalisation avec des structures filiales d’enseignes bancaires pour de gros cabinets spécialisés en restructuration. Enfin d’autres cabinets, comme Partners Finance, ont depuis plusieurs années dans leur capital des banques ayant investi selon une stratégie de participation minoritaire pour avoir un regard indirect sur la concurrence. A ce jour, ne demeurent vraiment indépendants que CAFPI, ACE et IN&FI, parmi les majors du secteur.

Est ce à dire que les autres enseignes évoquées ne le sont plus ?
Bruno Rouleau :
Il faut être réaliste. Lorsque vos actionnaires principaux, majoritaires ou de référence, sont des banquiers ou des assureurs ou des « assurbanquiers » directement intéressés à la captation des dossiers de financement que vous drainez, leurs concurrents peuvent légitimement s’interroger sur l’impartialité du courtier. Quand bien même, le dit actionnaire fait la promesse, à grand renfort de communication, de la neutralité maintenue, il met en place par derrière des outils d’intégration ou des accords internes visant à instaurer des conditions favorables pour une meilleure synergie intragroupe. Le courtier devient dès lors une force technico-commerciale qui tamise les demandes de financement dans une concentration verticale du projet du client. Au final, il peut s’agir là d’une évolution du métier qui redonne sous cette forme une qualité de conseil auprès des candidats au crédit que les banques ont délaissé depuis ces dix dernières années. Reste aux autres acteurs financiers à se positionner à l’égard de ces cabinets affichant une parenté avec des concurrents.

Cette situation ne risque-t-elle pas de provoquer une suspicion des consommateurs pour l’ensemble du secteur ?
Bruno Rouleau :
Il faut cesser en France de prendre le consommateur pour un ignare à qui on peut faire croire tout ce que l’on veut. Certes, ce dernier peut avoir un doute mais, renseignements pris, il saura faire le tri et s’adresser aux bons interlocuteurs en fonction de ses besoins. C’est d’ailleurs ce qu’il fait déjà quand il interroge des simulateurs ou des enseignes en ligne pour valider son projet. Ce n’est pas pour autant qu’il donne suite à l’offre de service de courtage. La professionnalisation du métier, la proximité du contact, la pérennité de la relationnotamment par une approche en amont et un suivi du dossier en aval-, et l’impartialité de la solution recherchée sont des attentes fortes. Seules les enseignes de courtage pouvant afficher ces qualités seront durablement plébiscitées par les consommateurs.

En poussant le raisonnement de la concentration verticale des banques par le rachat de toutes les enseignes de courtage significative à son extrême, qu’adviendrait-il de ce métier ?
Bruno Rouleau :
Les banques n’y ont pas forcément intérêt. Primo parce que cela représente un coût et des moyens à mettre en oeuvre pour améliorer les synergies dont elles n’ont peut être pas envie de se charger en ce moment, comptetenu du chalut financier mondial (crise des subprimes, renforcement des fonds propres, mise en place des outils de contrôle selon circulaire Bâle II, ralentissement des activités immobilières, gestion du renouvellement des effectifs avec une vague de départ en retraite d’ici 2010-2012, plans de restructuration successifs pour accompagner les grandes opérations de rapprochement, absorption des investissements dans les métiers de l’immobilier…). Secundo, parce que le client va se sentir prisonnier d’une offre commerciale intégrée, contraire à l’esprit «comparateur de solutions» du métier de courtier, et qu’il se désintéresserait dès lors de cette démarche au profit d’un retour « à la source », à l’agence bancaire. Enfin parce que les banques n’ont pas la capacité, en l’état actuel des choses, de restaurer une qualité de conseil dans le crédit au sein de leurs réseaux, accaparés par la vente de produits de fidélisation ou à plus forte valeur ajoutée en termes de commissions.

Le mouvement devrait donc se calmer ?
Bruno Rouleau :
Je le pense, quoique l’appétit de certaines banques étrangères ou compagnies d’assurance ne soit sans doute pas totalement satisfait. Mais il n’est pas non plus dit que des enseignes de courtage étrangères (anglosaxonnes, espagnoles…) ne viennent se positionner sur le marché français dans les mois à venir.

Quels arguments pourriez-vous donner dès lors à des clients en quête de financement, ou à des agences immobilières pour les convaincre de toujours passer par un courtier ?
Bruno Rouleau :
Les mouvements économiques ne remettent cependant pas en question les attraits du courtage en regard de la lourdeur d’une démarche personnelle directe des emprunteurs auprès des banques, à savoir : disponibilité du courtier, son horizon de solutions très large et neutre par rapport aux établissements prêteurs, l’étude de faisabilité préalable, tandis qu’un banquier ne s’intéresse réellement au projet qu’une fois un contrat signé entre les mains, un souci d’optimisation du coût dans le montage, une connaissance impartiale des stratégies des établissements de crédit pour gérer la relation après mise en place du crédit, une économie de temps et une plus grande efficacité dans la concentration du dossier auprès d’un seul interlocuteur. Pour les agences immobilières, le coutier est une solution complémentaire à son métier puisqu’il garantit l’étude du dossier, la prise en charge de la gestion et du suivi, une approche professionnelle lui garantissant une plus grande efficacité de traitement et une accélération du processus de vente (faisabilité, information des accords, prévision de la date de signature de l’acte authentique…), tout en lui laissant plus de disponibilité pour l’exercice de son métier principal. Or en cette période plus compliquée pour les transactions, l’essentiel du temps des négociateurs se situe sur le terrain à rechercher des biens tout en se rassurant sur le bon déroulement des affaires en cours de signature. Le courtier trouve dès lors toute sa justification.

A vous entendre, il faudrait presque que tous les candidats à l’accession passent préalablement par un courtier pour valider ses envies.
Bruno Rouleau :
Idéalement, en effet, toute l’activité immobilière et financière y trouverait son compte. C’est ce que nous nous efforçons de faire comprendre aux acteurs en question (acheteurs et vendeurs, professionnels de l’immobilier, banquiers). Cela faciliterait les projets, limiterait les frustrations d’un rêve impossible à réaliser, désengorgerait la filière de dossiers « infaisables » et accélérerait le débouclage des contrats. Sans doute ce métier est-il encore jeune pour s’imposer comme service sous cette forme, mais je suis convaincu que c’est une évolution inéluctable en regard aux attentes des uns et des autres.

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