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« La trêve hivernale, un airbag de solidarité », Bernard Devert

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photo : Bernard Devert, fondateur de "Habitat et Humanisme" et prêtre du diocèse de Lyon

Cette trêve depuis 1956 protège, pour la période courant du 1er novembre, au 15 mars, les foyers sous le coup d’une décision judiciaire autorisant l’expulsion de leur logement.
La chute annoncée est seulement retardée. Comment transformer cette cessation temporaire d’hostilité en un acte d’hospitalité ?
La question n’est pas indifférente à la cohésion sociale et à la fraternité.
Sur les 100 000 familles concernées, plus de10 000 seront confrontées à cette expulsion au sortir de l’hiver. Comment ne pas envisager qu’elles connaissent aussi un printemps.
Loin des jugements faciles et destructeurs, reconnaissons que la montée des précarités conduit bien des familles, celles-là mêmes que nous voulons soutenir, à supporter un loyer dont le taux d’effort est insupportable au regard des ressources. Quand le ‘reste pour vivre’ est inférieur à 100 € mensuels, voire moins, ne nous étonnons que ‘ça craque’.
Le bien commun, dans cette attention à la fragilité de l’autre, devrait nous inviter à penser cette trêve non comme un simple sursis mais comme le temps d’un sursaut de responsabilités partagées pour des mesures concrètes qui atténueraient bien des drames.
Cinq interventions sont à mettre en œuvre. Deux relèvent principalement de l’Etat et des grands bailleurs sociaux soulignant que certains déjà s’engagent dans cette perspective pour la destination des surloyers ; les trois autres appellent l’intervention des acteurs associatifs.
– mobiliser davantage les financements très sociaux comme le Prêt Locatif Aidé d’Insertion (PLAI) ou le Prêt Locatif à Usage Social (PLUS) pour que les loyers et charges soient en cohérence avec les ressources, observant que l’effort engagé pour la maîtrise des charges énergétiques doit être impérativement fléché vers les logements sociaux.
– transférer les ‘surloyers’ et une quote-part des pénalités au titre de la loi SRU en déduction partielle du montant des loyers pour les familles les plus vulnérables. La loi ALLUR devrait prendre en compte cette disposition suivant amendement déposé par ATD Quart Monde et HH.
– réduire la vacance des logements dans les territoires tendus. HH s’engage au développement de son dispositif ‘propriétaire et solidaire’ : 1 200 logements ont été mobilisés sur deux années. Des propriétaires louent au prix de 5 à 6 € mensuels, 70% de ces revenus étant exonérés des revenus fonciers, dans le cadre de la location/sous-location ; HH assure la garantie locative et l’accompagnement des familles.
Il est possible de mobiliser 2 000 logements dans les grandes villes, ce qui offrirait  une réponse à 20% des familles qui, à la fin de l’hiver, ne peuvent pas garder leur logement au regard de la procédure d’expulsion mais aussi en raison d’un loyer insupportable.
– participer au fonds de dotation HEDE, l’Humanisme à l’Epreuve de la Dépendance, proposée comme une cordée pour la traversée de passages difficiles.
– mobiliser un bénévolat pour la durée de cette mission.
La fraternité n’est pas un mot creux. Dans toutes les périodes de crise, elle a autorisé bien des ouvertures et des solidarités qui participent à un ré-enchantement de la Nation.
A ce possible ne sommes-nous pas appelés.

 

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