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Colonnes montantes : ENEDIS court-circuitée

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Gérald Berrebi, avocat au barreau de Paris revient sur une jurisprudence concernant le remplacement des colonnes électriques vétustes

photo : AdobeStock_130920751

Le remplacement des colonnes électriques vétustes fait débat : ENEDIS (ex-ERDF), gestionnaire du réseau d’électricité, tente d’opposer aux copropriétés et propriétaires d’immeubles que ces colonnes sont « hors concession » et qu’il ne lui incombe donc pas de faire les frais de ce remplacement. La jurisprudence judiciaire l’entend de moins en moins ainsi !

La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 15 février 2018, vient contrarier la stratégie habituellement mise en œuvre par le distributeur, ENEDIS (ex-ERDF) pour lequel l’enjeu n’est pas négligeable, car de très nombreuses colonnes montantes sont aujourd’hui vétustes.

Étant gestionnaire et exploitant du réseau public d’électricité, le distributeur doit assurer la maintenance et l’entretien de ce réseau et donc, si elles font partie de ce réseau, des colonnes montantes. Sa stratégie est dès lors toute tracée : refuser d’assumer le remplacement de ces colonnes en indiquant qu’elles n’appartiennent pas au réseau public qui lui est confié, mais aux propriétaires ou aux copropriétaires des immeubles dont elles desservent les étages.

Le coût de ce remplacement étant important pour ces derniers (plusieurs dizaines de milliers d’euros), tous ne s’en tiennent toutefois pas à cette affirmation souvent infondée.

Le juge judiciaire a ainsi été à plusieurs reprises saisi de la question de la propriété des colonnes montantes et de ce fait, de la nécessité de déterminer à qui incombe la preuve de cette propriété, ENEDIS argumentant alors ne pas avoir à apporter cette preuve. Les tribunaux, souvent saisis à la requête des propriétaires ou copropriétés, lui ont parfois donné raison sur la base de la règle selon laquelle il incombe au demandeur (les propriétaires ou copropriétaires, dans ce cas) d’apporter la preuve que la colonne montante appartient au réseau public.

Or, la question de savoir qui doit faire la preuve est souvent décisive : il est difficile, voire impossible pour l’usager d’apporter une telle preuve, d’autant que c’est le distributeur qui détient les archives et l’historique de la colonne montante !

La stratégie d’ENEDIS a donc pu s’avérer plutôt efficace : ceux qui n’étaient pas découragés par son affirmation de ce que la colonne montante était « hors concession » se trouvaient souvent dans une impasse une fois devant le Tribunal. Du moins, jusqu’à récemment…

En effet, dans cet arrêt de la Cour d’appel de Paris du 15 février 2018, la stratégie d’ENEDIS s’est heurtée aux dispositions de la loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l’électricité et du gaz et de son décret d’application du 8 novembre 1946, selon lesquelles les colonnes montantes faisaient pleinement partie des éléments nationalisés et ont donc été intégrées de plein droit au réseau public d’électricité, à moins que leur propriétaire ne manifeste une volonté contraire.

Il peut donc être soutenu, et tel était l’argumentaire que nous défendions pour le syndicat des copropriétaires dans le cadre du litige tranché par la Cour d’appel de Paris le 15 février 2018, que ces dispositions ont ainsi institué une présomption d’incorporation des colonnes montantes au réseau public, présomption qui oblige dès lors le distributeur ENEDIS à apporter la preuve que la colonne montante est « hors concession ».

La Cour d’appel de Paris a reconnu l’existence de cette présomption dans le cas d’espèce, confirmant ainsi pleinement le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 21 novembre 2016, qui s’était également appuyé sur cette présomption pour faire droit à la demande du syndicat des copropriétaires.

Il appartient dès lors à ENEDIS de prouver (en consultant ses archives) que la copropriété ou le propriétaire de l’immeuble a manifesté un refus de voir la colonne montante incorporée au réseau public, ce qui déjoue sévèrement sa stratégie…

©adobestock

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