Transactions, formation, management, Internet révolutionne la profession d’agent immobilier. À condition d’en bien maîtriser les outils.
2015 sera pour les agents immobiliers l’année du numérique ! L’affirmation paraît péremptoire, et pourtant elle ressortit à l’évidence. Tout se passe comme si la prise de conscience par la profession des apports du numérique s’était construite au fil des années précédentes, et comme si les vérités sautaient aux yeux.
Les indices? Ils sont multiples. La nouvelle tonitruante, d’abord, que les syndicats, les réseaux commerciaux et les principales enseignes de la transaction tentent de s’associer pour créer un site d’annonces commun. Il n’est pas certain qu’ils y réussissent, mais au fond ce n’est pas l’essentiel. Pourquoi ce projet soudain ? Parce que la collectivité professionnelle, qui réalise la prépondérance de cet outil de mise en marché, voudrait être en quelque sorte propriétaire des clés de son chiffre d’affaires, alors qu’elle se sent otage d’éditeurs spécialisés.
Ces éditeurs, non sans talent, ont simplement compris avant tout le monde l’enjeu de la puissance numérique. Ils avaient anticipé que l’essentiel des ventes et des locations se ferait par les vitrines virtuelles et non par les boutiques physiques. Clairement, le rôle de l’agence n’est plus le même. Ces éditeurs avaient aussi compris qu’il ne suffisait pas de numériser les annonces et de les enrichir par l’image, l’axonométrie (plan en 3D) ou les diagnostics, mais qu’il fallait simplifier la vie du candidat acquéreur ou du locataire en consolidant les offres. L’œcuménisme est fondamental, et les agents immobiliers sont également en train de le comprendre, à mille lieues des chapelles, à mille lieues même des marques et des enseignes jalouses de leur site.
Cela dit, ceux qui ont tout misé sur l’agence virtuelle – les réseaux de mandataires – n’ont-ils pas envoyé le balancier trop loin ? N’auront-ils pas besoin de disposer d’ancrages physiques pour mieux incarner leur marque aux yeux du public et aux yeux de leurs négociateurs ? La question n’est-elle pas désormais de savoir équilibrer le réel et le virtuel ? Ainsi, quand le président de la Fnaim dit que ses adhérents n’ont pas attendu les réseaux pour se servir d’Internet, il a raison. Mais ont-ils tous rationalisé leur stratégie commerciale grâce à l’immatériel ? Ont-ils tous mesuré, s’ils ont plusieurs agences, la pertinence de leur dispositif, alors que c’est Internet qui assure entre 80 et 90 % de leurs ventes et de leurs locations ? Ont-ils relativisé le rôle de leurs agences ? Ne sont-ils pas tentés par un mix avec un réseau d’agents commerciaux pour mieux quadriller leur marché ? Les interrogations qui taraudent tant les tenants du réél que les champions du virtuel sont un indice de plus que le numérique devient l’aune à laquelle il faut peser la stratégie d’une agence immobilière.
Toujours dans l’ordre de l’exploitation des atouts du numérique, combien d’agences ont-elles des sites véritablement différenciants, informatifs, ergonomiques, agréables ? Combien sont-elles à recourir au suivi de la clientèle grâce au smartphone par exemple ? Combien ont associé aux annonces des visites virtuelles des biens ou un logiciel de préfiguration et de simulation de travaux ? Le succès du seul salon dédié à l’utilisation des nouvelles technologies par les agences – RENT, Real Estate and New Technologies – mais également des ateliers consacrés à ces sujets lors des congrès, témoigne que le retard est en voie de se combler, indice supplémentaire que le numérique, naguère média parmi d’autres, a acquis le statut de référent.
Le numérique est également un fabuleux outil de management et d’accompagnement, non seulement envers des collaborateurs salariés, mais aussi non salariés. En particulier, dans une profession qui use largement du statut de travailleur indépendant, en réseau ou dans une relation plus classique, créer un lien fort avec un agent commercial sans risque de le voir requalifié en subordination est possible grâce à Internet. De même, la formation continue, rendue obligatoire par la loi Alur pour tous les collaborateurs en contact avec le public, trouvera aussi dans la dématérialisation une modalité moderne et économique. Le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières se penche déjà sur la possibilité de mêler enseignements présentiel et distantiel pour répondre aux obligations de la loi.
Une année numérique sans conteste, qui installera de nouveaux codes pour la transaction au profit de l’efficacité professionnelle. Exaltant, non ?
Après avoir conseillé Pierre Méhaignerie, ministre de l'équipement et du logement, Henry Buzy-Cazaux a occupé des fonctions de responsabilité dans des entreprises immobilières de premier plan, FONCIA, Tagerim ou encore le Crédit Immobilier de France, mais également au sein des organisations professionnelles du secteur. Ancien délégué général de la FNAIM, il a aussi été administrateur de plusieurs autres syndicats immobiliers. Il a été chargé de mission auprès du président du Conseil de l'immobilier de l'Etat.
Il mène depuis toujours une action engagée pour la formation aux métiers de l'immobilier: président d'honneur de l'Ecole supérieure des professions immobilières, cofondateur de l'Institut des villes, du territoire et de l'immobilier du Groupe ESSEC, il est aujourd'hui président fondateur de l'Institut du Management des Services Immobiliers, centre de prospective et d'enseignement.
Il est enfin membre du conseil scientifique de l'observatoire immobilier des notaires et président du groupe "Immobilier, logement et ville durable" du Forum pour la gestion des villes et des collectivités locales et territoriales.