Les conditions de financement sont tellement bonnes qu’il peut être intéressant aujourd’hui de renégocier son emprunt. Suivez le guide.
Les taux d’intérêt ne cessent de baisser depuis un an, et chacun peut s’interroger sur l’opportunité de faire réviser son prêt en cours, surtout si celuici a été souscrit en 2007 et 2008, marquées par la crise financière. Mais entre l’attrait de la renégociation du taux et la vraie bonne affaire, il peut y avoir une différence très forte qui mérite une analyse et les conseils d’un spécialiste.
Avec la baisse des taux, tout le monde a-t-il à y gagner en renégociant son crédit ?
D’abord, il convient de ne pas se méprendre entre la baisse des taux relayée par les médias et la baisse des conditions que les banques accordent à leurs clients. Entre juillet 2008 et mai 2009, les taux directeurs de la Banque centrale européenne sont passés de 4,25 à 1 %. Pour les crédits immobiliers, les banques ont ramené sur la même période leurs taux d’intérêt, en moyenne, sur une durée de vingt-cinq ans, de 5,7 à 4,4 %. Et il ne s’agit là que des taux pour les dossiers d’acquisition, non de renégociation, car les banques sont parfaitement conscientes que, pour les clients, faire racheter son crédit par un autre établissement représente de l’énergie, et a un coût.
Respecter un différentiel de 1 % entre l’ancien et le nouveau taux
Avant d’étudier la situation, il faut s’assurer d’un écart de taux de 1 % entre le prêt initial et celui que vous envisagez. En deçà, il est rare que la renégociation auprès d’un autre prêteur soit intéressante. Cela ne pourra donc éventuellement concerner que certains prêts contractés entre mi-2007 et fin 2008. En effet, les années précédentes ont affiché des taux relativement bas.
Tenir compte des pénalités de remboursement anticipé
Lorsqu’on fait racheter son prêt par une autre banque, il faut tenir compte des pénalités de remboursement anticipé du crédit initial, mais aussi des frais relatifs aux garanties – garantie initiale et nouvelle garantie –, de ceux inhérents au nouveau prêt, et enfin de plusieurs éléments connexes au crédit lui-même. Si votre situation professionnelle a changé – par exemple garantie fondée sur un accord avec votre précédent employeur –, vous ne pourrez peut-être pas bénéficier de conditions aussi avantageuses. S’agissant du crédit luimême, les établissements prêteurs ne sont pas très ouverts en général à l’absence de perception d’indemnités de remboursement anticipé. Enfin, si votre plan de financement initial était composé de prêts aidés – prêt 0 %, épargne logement, PAS… –, la renégociation doit tenir compte de la perte de ces avantages et de la remise en cause des allocations AL et APL.
Prendre en considération les éléments constitutifs du dossier et son environnement
Le montant de l’apport personnel du crédit initial doit aussi être pris en compte. Comme les premières années de remboursement du prêt sont consacrées à davantage d’intérêts que de capital, une personne ayant contracté un crédit total peut se voir réclamer par la banque délaissée un montant supérieur au prêt initial. En imaginant que le capital dû (solde du crédit et pénalités) soit inférieur au montant emprunté initialement, il faut tenir compte d’un ultime point : la durée prévisionnelle du nouveau crédit. Si l’emprunteur se trouve dans les statistiques évoquées précédemment, avec un crédit initial souscrit en 2007, il doit faire le calcul de la rentabilité de l’opération sur une durée de quatre et cinq ans. Il ne réalisera en effet des économies que si le nouveau prêt va à son terme. Autrement, les frais occasionnés par la renégociation ne seront jamais amortis, et il aurait été préférable de garder son prêt initial, même à 1 ou 1,5 % plus élevé en taux nominal. Mais s’il s’agit d’un bien destiné à être conservé au titre de résidence principale – ou à usage locatif –, l’économie réalisée peut s’avérer substantielle et ouvrir droit à des avantages auxquels l’emprunteur n’avait pas accès avant.
Maîtriser les règles du jeu avant d’opter pour un nouveau crédit à taux révisable
L’option pour un crédit à taux révisable répond un peu à la même logique que celle de la renégociation : il faut analyser le gain potentiel en fonction du différentiel de coût et de la durée prévue du prêt. En effet, l’avantage du crédit à taux révisable réside dans le gain immédiat sur le taux d’intérêt par rapport à un taux fixe. L’impact est important les premières années car le capital restant dû, sur lequel s’appliquent les intérêts, est important. Avec le temps, le différentiel s’estompe et le risque croît de voir le taux se renchérir (NDLR : d’où la nécessité de taux révisables protégés à la hausse, dits capés), surtout dans une période de taux bas comme en ce moment. Donc, si le prêt doit être conservé longtemps, il est prudent de ne pas choisir de taux révisable – sauf à des conditions de protection très forte. En revanche, si le prêt est destiné à être soldé dans les cinq à six ans à venir, le choix du taux révisable peut s’avérer intéressant, car il permet de revenir sur des situations a priori non concernées par l’attractivité de la renégociation du fait du différentiel de taux accentué qui gomme les restrictions sur les frais annexes. Dans tous les cas, l’idéal est de s’adresser à un spécialiste, de préférence un courtier, car l’avis du conseiller bancaire sera de part et d’autre forcément partial.
Bruno Rouleau