On connaît bien cette histoire drôle : un homme chute du dernier étage d’une tour et passe devant les fenêtres des occupants de tous les étages. On l’entend dire à chacun « Jusqu’ici tout va bien ». L’histoire est drôle à force d’être absurde, et en outre elle n’est drôle que si c’est une fiction. Notre Président de la République incarnait ce personnage hier soir à la télévision, et l’histoire ne prêtait pas à sourire : jusqu’ici tout va mal, ce qui est fait ne donne pas l’espoir du redressement et ne sera pas infléchi… et il s’agit de la France, celle du logement et de l’emploi dans la filière immobilière en particulier.
Revenons sur le plan d’urgence pour le logement qu’il avait présenté quelques jours plus tôt, pour illustrer le propos, et apprécions la pertinence des « outils » – pour reprendre le propre mot de Monsieur Hollande. Le choix a été fait dans ce plan de privilégier la construction HLM, la rénovation énergétique des logements sociaux et des logements occupés par les ménages modestes.
Rien sur le logement privé et rien pour les classes moyennes, en particulier pour l’accession à la propriété. En outre, de bonnes intentions sans doute, pour simplifier et sécuriser les permis de construire, pour mobiliser le foncier public et privé, mais qui ne porteront leurs fruits en termes de logements livrés et d’emplois que dans dix-huit mois dans le meilleur des cas, étant donné la durée de réalisation d’un projet de construction.
Le Gouvernement, à juste titre, a fixé un cap de production de 500000 logements par an, et ce dès 2013, en assignant aux HLM la mission d’en produire 150000, soit 30% seulement. Quelle étrange logique que de ne pas soutenir les acteurs responsables des 70% restants! Le plus grand préjudice consiste, ce faisant ou plutôt ce ne faisant pas, à dégrader la confiance des investisseurs privés, c’est- à-dire aussi bien des ménages prêts à accéder et des familles ou des institutions prêtes à acheter pour louer, et la confiance des professionnels à leur service. Tout se passe comme si on voulait envoyer un message négatif aux promoteurs, aux constructeurs de maisons individuelles, aux agents immobiliers et aux investisseurs potentiels.
Parlons donc des outils qui ne sont pas dans la boîte, et mon diagnostic n’attribue pas seulement à l’actuelle majorité la responsabilité de leur absence : le PTZ doit être d’urgence amélioré avec un allongement des différés de remboursement, la taxation des plus-values sur la vente des logements locatifs et des résidences secondaires doit revenir à des niveaux décents, les travaux d’entretien ne doivent plus être affectés du taux fort de TVA pour que soient resolvabilisés ceux qui les commandent, la TVA réduite doit profiter aux acteurs privés aussi. Le choc de « simplification » doit immédiatement alléger les 3 200 pages du code de l’urbanisme et les 1 340 pages du code del’habitation et de la construction.
Bref, la satisfaction de François Hollande n’est pas de mise. Il ne peut considérer que son plan d’urgence pour le logement vaut solde de tout compte. Une loi de finances rectificative avant l’été s’impose, qui apportera vraiment de l’oxygène à un secteur du logement qui s’asphyxie, avec une réduction de 30% de son rythme respiratoire.