Parler de pige dans l’immobilier aujourd’hui, c’est presque prononcer un gros mot. Sur les réseaux, dans les formations tendance, chez certains influenceurs, le verdict semble sans appel : la pige est « has been », dépassée, inefficace. Mais pour Audrey Antonini, formatrice et passionnée de terrain, c’est tout l’inverse. Son message est clair : la pige n’est pas le problème, c’est la façon dont on l’utilise.
Dans un post LinkedIn « coup de gueule », elle exprime sa colère face à cette tendance à enterrer un outil sans chercher à en comprendre les rouages. « On ne jette pas un outil parce qu’il ne marche pas. On le jette quand on ne sait pas s’en servir », affirme-t-elle. Cette professionnelle a une conviction profonde : bien utilisée, la pige est un levier redoutable, aussi bien pour les agents que pour les vendeurs.
Un parcours de terrain, une légitimité construite sur l’expérience
Redonner à la pige ses lettres de noblesse
Alors, pourquoi la pige est-elle si décriée aujourd’hui ? Selon Audrey, il y a plusieurs raisons à cela : « On a laissé les agents se dégoûter de cet outil, car il a souvent été mal enseigné, mal compris. On assimile effectivement souvent une pige mal faite à du harcèlement. Et avec un script robotique, c’est inefficace. » Résultat : les agents ont peur du rejet, ils se sentent illégitimes et ils confondent « prise de contact » avec le fait de « quémander ».
Pourtant, bien maîtrisée, la pige devient un acte de posture, de stratégie et de sincérité. Audrey parle même de « précision relationnelle » : « Il ne s’agit pas d’avoir du bagou, ni, pire de manipuler. Une pige bien menée vise à comprendre à qui on parle, avec une intention claire. On ne cherche pas à convaincre à tout prix. On cherche à provoquer un échange, à dialoguer. »
Elle insiste : « Derrière la pige, il y a des vendeurs seuls, mal conseillés, en difficulté. L’agent immobilier a le bon diagnostic, la bonne solution. Refuser de les appeler, c’est comme si un médecin refusait de soigner quelqu’un parce qu’il ne s’est pas présenté aux urgences. »
Réconcilier les agents immobiliers avec la pige
Dans ses accompagnements – en individuel ou petits groupes – Audrey travaille à réconcilier les professionnels avec la pige, en leur donnant des objectifs clairs et une vision précise. « Il est important de se fixer des objectifs. Combien de discussions ciblées par jour ? Quel taux de transformation ? Ce n’est pas une question de quantité d’appels, mais de qualité d’intention. »
Elle leur apprend aussi à voir le « non » non pas comme un échec, mais comme un « pas maintenant ». « On ne force pas, on prépare. On sème pour récolter plus tard. La pige, bien faite, c’est une démarche humaine, respectueuse, orientée solution. Elle rend service à tout le monde – y compris au prospect. »
Audrey Antonini croit ainsi à une réhumanisation de la profession d’agent immobilier, trop souvent réduite à des techniques de vente ou des stratégies marketing. « L’agent n’est pas un quémandeur. C’est une solution. Et cela change tout dans la posture. »
En redonnant ses lettres de noblesse à la pige, elle défend un immobilier plus juste, plus ancré, plus efficace. Et elle le dit sans détour : « La pige n’est pas morte. Il est temps d’arrêter de l’enterrer, pour au contraire, réapprendre à s’en servir. »