Dividendes versés par une SCI : qui peut les obtenir ?

Suite à une donation, une succession ou une vente les parts des sociétés civiles peuvent être démembrés entre un « usufruitier » (souvent un parent) et un « nu-propriétaire » (en général, un enfant). Dans ce cas, qui peut obtenir les dividendes versés par la société ? La Cour de cassation a récemment apporté une nouvelle pierre à l’édifice de la répartition des dividendes par une société civile immobilière dont les parts son démembrées (arrêt du 19 septembre 2024). Éclairage de Stéphane Buffa, avocat associé KAIRNS Avocats AARPI.

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L’article 582 du Code civil dispose que les dividendes prélevés sur les bénéfices réalisés par la société sont octroyés à l’usufruitier des parts sociales. En revanche, l’article ne prévoit rien lorsque les bénéfices n’ont pas été distribué immédiatement, mais qu’ils ont été mis en réserve, puis distribués ultérieurement. Pour la chambre civile de la Cour de cassation, les dividendes prélevés sur les réserves reviennent au nu-propriétaire (Cass. 1re civ., 22 juin 2016, n° 15-19.471) et non à l’usufruitier.  La chambre commerciale de la Cour de cassation a retenu une solution plus complexe : les dividendes prélevés sur les réserves reviennent à l’usufruiter dans le cadre d’un quasi-usufruit.

En d’autres termes, au moment de la distribution, l’usufruitier perçoit les dividendes. Toutefois, au moment de la succession de l’usufruitier, les dividendes qui ont été prélevés sous la forme d’un quasi-usufruit constituent une créance des nus-propriétaires déductible de la succession de l’usufruitier (Cass. com., 27 mai 2015, n° 14-16.246).

Récemment, la chambre civile de la Cour de cassation a précisé ces interprétations jurisprudentielles. Par un arrêt du 19 septembre 2024, n°22-18.687, elle s’est prononcée sur la question de la répartition entre usufruitier et nu-propriétaire de la distribution d’un résultat exceptionnel provenant de la cession de la totalité des actifs immobiliers d’une SCI, sans distinguer les dividendes prélevés sur les réserves ou sur les bénéfices. La Cour a décidé qu’en l’absence de convention particulière entre le nu-propriétaire et l’usufruitier de parts sociales, le dividende prélevé sur le produit de la vente de la totalité des actifs immobiliers d’une SCI revenait au nu-propriétaire, le droit de jouissance de l’usufruitier s’exerçant sous la forme d’un quasi-usufruit sur la somme distribuée. Ainsi, l’usufruitier percevrait les dividendes correspondant au produit de la cession ; le nu-propriétaire bénéficierait, quant à lui, d’une créance correspondant à ces dividendes à l’encontre de la succession. 

On notera que la Cour de cassation confirme que la répartition des dividendes n’est pas d’ordre public, mais que les statuts peuvent déroger au principe posé par la jurisprudence. 

Cette liberté offerte aux associés d’une SCI ouvre la voie à plus de souplesse dans la gestion de la SCI et du démembrement de parts sociales. Ces solutions confirment les nombreuses voies ouvertes pour gérer la question de la distribution des dividendes par une SCI afin de préserver les intérêts de chacun tout en optimisant la succession sur le plan fiscal. 

A cet égard, les associés devront porter une attention particulière lors de la distribution de dividendes en décidant le compte sur lequel ils doivent être prélevés. Ils devront également être attentifs à la rédaction des statuts, puisque la jurisprudence permet de modifier les modalités de distribution des dividendes.

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