La LMNP dans la ligne de mire du projet de loi de finances 2025 !

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de réintégrer les amortissements dans le calcul de la plus-value imposable des locations meublées non professionnelles (LMNP). Maître Stéphane Buffa, Avocat associé au cabinet KAIRNS Avocats AARPI nous aide à comprendre les implications d'une telle réforme.

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L’avantage fiscal de la LMNP

La location meublée non professionnelle, que certains aiment qualifier de niche fiscale, offre des avantages fiscaux significatifs pour l’investisseur. Le plus important d’entre eux réside dans la déduction de l’amortissement du résultat fiscal. Autrement dit, pour déterminer le bénéfice fiscal sur lequel est calculé l’impôt dû, une charge (l’amortissement), correspondant à la dépréciation de la valeur (très souvent théorique) du bien est comptabilisée. Cette déduction a pour effet une diminution du bénéfice fiscal, et par voie de conséquence de l’impôt à payer, voir souvent une absence d’imposition pour l’investisseur immobilier, en raison d’un résultat fiscal nul.

Illustrons ces propos par l’exemple d’un investisseur ayant acquis un bien immobilier d’une valeur de 230 000 €, dont le bâti est estimé à 200 000 € (le terrain ne s’amortit pas). Si l’investisseur est soumis à une tranche marginale d’imposition de 30 %, l’amortissement total du bâti, déductible du bénéfice soumis à la tranche marginale d’imposition de 30 % et aux prélèvements sociaux de 17,2 %, soit un taux d’imposition global de 47,2 %, permet une économie d’impôt de 94 400 € (200 000 x 47,2 %).

L’avantage est d’autant plus significatif qu’au moment de la cession du bien immobilier, la plus-value ne tient pas compte des amortissements antérieurement déduits. En effet, l’article 150 VB du Code général des impôts dispose que pour le calcul de la plus-value, le prix d’acquisition est le prix « effectivement acquitté par le cédant ». Financièrement cela signifie qu’un investisseur peut déduire de son revenu des amortissements, alors même que le bien n’a pas perdu de valeur, sans être imposé sur les amortissements au moment de la réalisation de la plus-value. Il y a là un véritable cadeau fiscal au profit du loueur en meublé non professionnel.

La réintégration des amortissements dans le calcul de la plus-value

Cet avantage devrait être sérieusement limité si l’article 24 du projet de loi de finances pour 2025 était définitivement adopté en l’état : cet article prévoit, en effet, que le prix d’acquisition d’un bien immobilier est minoré du montant des amortissements admis en déduction, pour les ventes intervenant à compter du 1er janvier 2025. Ainsi, au moment de la vente, la déduction des amortissements du prix d’acquisition aurait pour effet d’accroître le montant de la plus-value imposable, donc de l’imposition.

Pour autant, l’impact fiscal devra être soigneusement calculé. En effet, en l’état (1) la plus-value imposable à l’impôt sur le revenu (19 %), aux prélèvements sociaux (17,2 %) et à la taxe sur les plus-values immobilières élevées (jusqu’à 6 %) fait l’objet d’abattements pour durée de détention, de sorte que le montant de l’imposition globale diminue en fonction du nombre d’années de détention. Au bout de 30 ans, la plus-value est exonérée.

A titre d’exemple, un investisseur ayant acquis un bien 500 000 € (frais de notaire et d’agence inclus) et l’ayant revendu 900 000 € après 10 ans de détention est actuellement imposé au titre de l’impôt sur le revenu à hauteur de 43 225 €, au titre des prélèvements sociaux à hauteur de 51 288 € et au titre de la taxe sur les plus-values immobilières élevées à hauteur de 11 375 €, soit un montant total de 105 888 €. L’imposition globale représente alors environ 26 % de la plus-value brute.

Si nous prenons par hypothèse des amortissements déduits à hauteur de 200 000 €, réintégrables pour le calcul de la plus-value, alors le montant de l’impôt sur le revenu serait de 69 825 €, le montant des prélèvements sociaux de 82 850 € et le montant de la taxe sur les plus-values immobilières élevées de 22 208 €, soit un total de 174 883 €, ce qui représente environ 44 % de la plus-value brute.

Rééquilibrer le marché locatif en faveur des locations longue durée

Quelle stratégie adopter pour les investisseurs ? Ceux dont le bien est en vente ou qui ont pour projet de le vendre prochainement auront peut-être intérêt à le faire avant l’entrée en vigueur du dispositif, soit avant la fin de l’année, quitte à réduire le prix de vente. Pour les autres, il faudra davantage anticiper le surplus d’imposition à l’occasion d’une cession d’un bien immobilier, voire s’orienter vers une durée plus longue de détention avant de céder le bien, afin de profiter de l’effet fiscal des abattements pour durée de détention.

Cette stratégie pourrait d’ailleurs être celle qui soit la plus en ligne avec les réflexions actuelles en matière de location immobilière. En effet, l’exposé des motifs de l’article 24 du projet de loi de finances souligne que dans le cadre fiscal actuel, les loueurs en meublé non professionnels disposent « d’un avantage fiscal spécifique, susceptible d’entretenir un déport des loueurs nus vers la location meublée et, ainsi, l’attrition de l’offre de logements affectés à la résidence principale, en incitant la location de courte durée et à vocation touristique ». Cet objectif se situe dans la droite ligne des objectifs poursuivis par le rapport de mai 2024 déposé par Madame la députée Annaïg Le Meur, portant des propositions de réforme de la fiscalité locative.

Il n’est pas dit que le législateur s’arrête ici dans la réforme du régime fiscal des locations et ne prenne pas d’autres mesures visant à limiter la location courte durée au profit de la location longue durée. L’investisseur immobilier avisé restera attentif à l’évolution du projet de loi et aux futurs réformes relatives à la location immobilière.

1) L’abattement pour durée de détention pourrait disparaître à l’occasion du vote de la loi de finances pour 2025.

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