Quelle est la teneur du droit de visite du bailleur qui a donné congé au locataire d’un logement ?
La loi n°89-462 du 6 juillet 1989 n’encadre pas le droit de visite du bailleur à proprement parler. Il n’existe d’ailleurs pas de texte obligeant le locataire à laisser visiter le logement pendant la durée du préavis locatif.
L’article 4 de ladite loi prévoit toutefois que serait réputée non écrite la clause du contrat de location qui obligerait le locataire, en vue de la vente ou de la location du local loué, à laisser visiter celui-ci les jours fériés ou plus de deux heures les jours ouvrables.
Dans ces conditions, les contrats de location soumis à cette loi d’ordre public intègrent le plus souvent une stipulation organisant ce droit de visite, plus ou moins en ces termes :
« En cas de mise en vente ou relocation, le locataire devra laisser visiter les lieux loués au bailleur ou son mandataire deux heures pendant les jours ouvrables qui lui seront précisées par ces derniers ou, à défaut d’accord, entre 17 heures et 19 heures. Il en sera de même en cas de cessation de location pendant la durée du préavis légal. »
A défaut de stipulation en ce sens dans le contrat de location, le bailleur devrait attendre la fin du bail et le départ du locataire pour mettre en place les visites de commercialisation ou de relocation de son bien.
Toutefois malgré la présence de cette clause, le refus de visite est plus fréquent qu’on ne le pense. Il arrive en effet que le locataire évincé vive difficilement la situation, surtout lorsqu’il ne peut se porter acquéreur. Alors le locataire fait obstruction aux visites durant son préavis, ou fait en sorte que celles-ci se déroulent de manière chaotique.
Cependant le bailleur ne peut pas pénétrer de force dans le logement pour imposer les visites. En effet, aux termes de l’article 6 de ladite loi de 1989, le bailleur a l’obligation d’assurer au locataire la jouissance paisible des lieux loués. Il en ressort une interdiction de pénétrer dans les lieux loués pour le bailleur, le fait d’entrer dans le domicile du locataire contre son gré ou en son absence pouvant d’ailleurs constituer une violation de domicile.
Précision : Le droit de visite du bailleur en matière de travaux impératifs dans les lieux loués est soumis à un autre régime de fonctionnement mais peut également justifier une action en cas d’obstruction du locataire.
Quels sont les moyens de droit du bailleur et les sanctions possibles ?
En pratique, le bailleur qui se voit confronté à un locataire ou occupant récalcitrant aux visites peut solliciter une autorisation judiciaire de pénétrer dans les lieux (au besoin sous astreinte).
Le bailleur qui subit un préjudice du fait de la résistance abusive de son locataire peut également solliciter judiciaire des dommages-intérêts de la part de son locataire.
A titre d’exemple, dans une décision récente la cour d’appel de Paris a jugé que le locataire qui a refusé l’accès à son logement pour permettre aux potentiels acheteurs de le visiter, faisant ainsi obstacle à une quelconque vente de cet appartement, a commis une faute qui a causé un incontestable préjudice à sa propriétaire. La cour d’appel a ainsi condamné le locataire à verser 10 000€ à son bailleur. Dans cette espèce la bailleresse démontrait avoir mis en vente son bien auprès de deux agences immobilières, démarches qui n’ont pu aboutir en raison de l’obstruction du locataire. Précisons que le fait que le locataire conteste la régularité ou le bienfondé du congé ne lui permet pas de s’opposer aux visites.
Conseils : Il est important que le bailleur (ou son mandataire) formalise expressément et systématiquement ses demandes de visite(s), au besoin par la voie de courriers recommandés pour justifier du refus du locataire.
L’agence qui s’est vu refuser la ou les visites pourra également attester de l’obstruction.