Vers un avenir durable : la réglementation du zéro artificialisation nette

Dans un contexte mondial de préoccupations croissantes quant à l’impact environnemental de l’urbanisation galopante, la réglementation du zéro artificialisation nette émerge comme une réponse utile pour préserver nos écosystèmes. Éclairage de Quentin Lagallarde et Sébastien Fagnen.

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Comprendre l’artificialisation et ses conséquences

Au cours de la décennie précédente, la France a enregistré une moyenne annuelle de consommation de 24 000 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers, équivalant à près de 5 terrains de football par heure. Cette tendance concerne l’ensemble des territoires, avec une concentration notable de 61 % de la consommation d’espaces dans les zones où la pression immobilière est absente. Les répercussions englobent des aspects écologiques tels que l’érosion de la biodiversité, l’aggravation du risque de ruissellement et la limitation du stockage du carbone. Parallèlement, des conséquences socioéconomiques se manifestent, incluant les coûts liés aux équipements publics, l’augmentation des temps de déplacement et des dépenses énergétiques des ménages, la dévitalisation des zones en déclin, ainsi que la réduction du potentiel de production agricole, entre autres.

Objectifs du ZAN

Dans le cadre de la loi Climat et Résilience (août 2021), la France vise le « zéro artificialisation nette des sols » d’ici 2050. L’objectif intermédiaire pour 2031 implique une réduction de moitié de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers par rapport à la décennie précédente (2011-2021). Cette démarche cherche à contenir l’urbanisation effrénée, préservant ainsi les écosystèmes, la biodiversité, et contribuant à une gestion plus durable du territoire.

Le ZAN vise à interdire toute nouvelle artificialisation nette des sols, conditionnant toute expansion urbaine à une renaturation proportionnelle des espaces déjà artificialisés. Des mesures strictes s’appliquent, telles que le renforcement des règles pour les autorisations d’urbanisme commercial, interdisant de nouveaux projets d’artificialisation (sauf dérogations pour des surfaces inférieures à 10 000 mètres carrés). Les secteurs d’implantation des entrepôts sont également soumis à des critères liés aux besoins logistiques et aux objectifs de réduction de l’artificialisation. Une circulaire ministérielle rappelle que l’application du ZAN dépend de la mise en conformité des documents d’urbanisme. Face aux préoccupations locales, une loi promulguée en juillet 2023 vise à soutenir les élus locaux en renforçant l’accompagnement et en accordant des délais supplémentaires pour intégrer les objectifs de réduction de l’artificialisation dans les documents d’urbanisme.

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Résistances et oppositions

Le ZAN rencontre plusieurs freins et oppositions, reflétant des complexités et des divergences d’opinions. Les principales préoccupations incluent la définition floue de l’artificialisation, la complexité de sa mesure, le débat quantitatif vs qualitatif, les inquiétudes sur l’impact sur l’accession à la propriété, l’influence de la logique comptable, la concurrence entre villes et villages, l’opposition des acteurs économiques, les enjeux économiques et sociaux, la pression sur les zones périurbaines, et les risques politiques, notamment en matière de logement pour les catégories modestes. La réussite du ZAN nécessitera une approche équilibrée prenant en compte ces divers aspects et s’adaptant aux spécificités locales.

Les élus locaux face aux difficultés de la mise en place du ZAN

Les élus locaux expriment quotidiennement leurs interrogations et craintes quant à l’avenir des communes, principalement rurales, dans un contexte de profonds changements territoriaux. Depuis les lois de décentralisation des années 1980 et le célèbre ouvrage de Jean-François Gravier «Paris et le désert français» après la Seconde Guerre mondiale, la France connaît un changement de paradigme majeur dans son approche de l’aménagement du territoire. Aujourd’hui, le pays fait face à l’un des plus grands défis territoriaux du XXIe siècle.

Les acteurs locaux doivent faire preuve d’audace, de courage et de pragmatisme pour répondre à cette transformation. Alors que le ZAN fixe un horizon avec une nomenclature stabilisée, son application requiert une agilité constante, en tenant compte du contexte évolutif, notamment en matière de logement et d’industrie.
La crise du logement est pointée du doigt, avec une baisse historique de la construction et des besoins estimés à 300 000 logements par an. L’adaptation rapide des outils disponibles est nécessaire pour soutenir les projets de primo-accession à la propriété, tout en
respectant les objectifs du ZAN. Une nouvelle vision du prêt à taux zéro pour la construction individuelle est réclamée.

La problématique des friches occupe également une place centrale, considérées comme une alternative écologique au mitage des espaces agricoles et naturels. Cependant, les obstacles juridiques actuels entravent la reconquête de ces espaces délaissés, appelant à la création de nouveaux outils pour faciliter leur acquisition et densification. Les friches jouent un rôle essentiel dans la mobilisation du foncier pour les énergies renouvelables et la réindustrialisation du pays, alignées sur la conciliation du temps économique et du temps de l’aménagement.

La mise en œuvre du ZAN doit mieux répondre aux spécificités locales, par le biais d’une déclinaison territoriale plus aboutie. La question de l’équité entre les territoires est soulevée, soulignant les inégalités de préparation face au ZAN. Les communes littorales, confrontées au recul du trait de côte, appellent à des évolutions législatives mieux adaptées.

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Conclusion : un engagement collectif pour un futur durable

En conclusion, la France fait face à des défis significatifs liés à l’artificialisation des sols, avec des conséquences écologiques et socioéconomiques majeures. Malgré les objectifs ambitieux du ZAN pour atteindre le «zéro artificialisation nette des sols» d’ici 2050, sa mise en œuvre se heurte à des résistances et des oppositions variées. Les préoccupations concernent la définition floue de l’artificialisation, les enjeux quantitatifs et qualitatifs, ainsi que les implications socioéconomiques, particulièrement dans le contexte de la crise du logement et des friches. Face à ces défis, une approche équilibrée, audacieuse et pragmatique est nécessaire pour répondre aux trans- formations territoriales tout en respectant les objectifs de durabilité fixés par la loi Climat et Résilience. Les acteurs locaux jouent un rôle crucial dans la réussite du ZAN, exigeant une adaptation constante aux spécificités locales et une collaboration étroite pour relever l’un des plus grands défis territoriaux du XXIe siècle.

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Sébastien Fagnen
Sénateur de la Manche

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Quentin LAGALLARDE: Quentin LAGALLARDE , Chartered surveyor MRICS, expert évaluateur en immobilier près la Cour d’Appel de Caen. Certifié en expertise immobilière de l'ESSEC Business School et titulaire du DU expertise judiciaire (faculté de Droit de l'université de CAEN). Il est membre agréé du collège des experts du SNPI, Quentin LAGALLARDE dispose de plusieurs années d'expérience dans différents cabinets immobiliers en matière d'expertise, transaction et location. Il est certifié REV par TEGoVA, MRICS et également inscrit sur la liste des experts près la Cour d'Appel de Caen. En sus de son activité expertise, il est formateur auprès des professionnels de l’immobilier. Ses formations sont disponibles sur www.cotentin-expertise.fr. Téléphone : 02 33 03 17 02