Une vidéo virale sur YouTube a récemment soulevé des questions sur les droits des propriétaires en France lorsqu’ils sont confrontés à des squatteurs. Les deux «youtubeurs » québécois ont déclaré dans leur vidéo: « En France, si quelqu’un part en vacances et que tu décides d’aller dans son logement et de changer la serrure, on n’a pas le droit de te foutre dehors », déclenchant une vague d’indignation. Mais où se trouve la vérité, et peut-on en France venir squatter si facilement chez les gens ?
Il faut déjà définir ce qu’est un squat : Un squat se produit lorsqu’une personne occupe un espace sans avoir conclu de contrat de location avec le propriétaire. Il est crucial de différencier le squat d’un locataire en défaut de paiement. Les lois françaises punissent sévèrement l’entrée illégale dans une propriété et le maintien dans les lieux sans autorisation.
Mais c’est vrai aussi qu’un propriétaire ne peut pas expulser manu militari les squatteurs de sa propriété, personne ne pouvant se faire justice lui-même. La loi ALUR de 2014 a créé le délit d’expulsion illégale, et agir ainsi peut conduire le propriétaire à être lui-même considéré comme un délinquant. Même si le squatteur enfreint la loi, le propriétaire ne peut pas agir de manière autonome pour éviter de commettre un délit.
Mais alors peut-on avoir recours à la police ? Bien que demander l’intervention policière soit possible, cela n’est pas toujours efficace. Le délit de flagrance doit être établi dans les 48 heures, ce qui peut être difficile si les traces d’effraction ont été effacées. Au-delà de ce délai, la procédure va être beaucoup plus compliquée.
Donc si je rentre chez moi et qu’on occupe ma maison depuis plus de 48h, qu’est-ce que je peux faire ? La Loi DALO de 2007, modifiée en 2023, offre une procédure d’expulsion accélérée. Cependant, cela exige que le propriétaire dépose plainte, prouve que le logement constitue son domicile (qu’il s’agisse ou non de sa résidence principale ou secondaire depuis la loi ASAP de 2020), et obtienne la constatation de l’occupation illicite par une autorité compétente. Bien que cette procédure soit plus rapide, le préfet peut refuser la mise en demeure pour des raisons d’intérêt général ou en considérant la situation personnelle des squatteurs. Rien n’est donc gagné !
Alors, lorsque l’évacuation forcée par le préfet n’est pas possible, le propriétaire doit entamer une procédure judiciaire, qui est plus longue. Cette démarche implique de prouver l’occupation irrégulière, justifier d’un titre de propriété, et identifier les occupants. Et pendant tout ce temps, le propriétaire doit se trouver un autre logement pour y habiter.
Et là encore, même si le juge a prononcé l’expulsion, les squatteurs peuvent décider de rester. Il faut alors faire intervenir un huissier qui délivrera un commandement de quitter les lieux. Et si les squatteurs sont tenaces, l’huissier est habilité à demander l’assistance de la force publique. Toutefois, le préfet peut là encore décider de refuser cette assistance en prenant en considération la situation personnelle des squatteurs, notamment la présence d’enfants en bas âge. Dans ce cas, la responsabilité de l’État serait tout de même engagée, impliquant une obligation d’indemniser le propriétaire lésé.
Bien que les squatteurs ne puissent se prévaloir de la trêve hivernale et ne puissent pas opposer le droit au logement au propriétaire, les démarches d’expulsion sont donc souvent complexes et longues.
Nos cousins québécois n’étaient donc pas si loin de la vérité, mais avec quelques nuances !