Pour les agences indépendantes, l’année 2023 aura été l’année de bascule du marché immobilier

Inflation galopante, hausse importante des taux d’intérêt, durcissement de l’accès au crédit et prix de vente figés… L’année 2023 aura définitivement acté le retournement du marché immobilier tant redouté. C’est en tout cas ce qui ressort du dernier Observatoire Interkab réalisé par La Boîte Immo.

Selon l’Observatoire Interkab, qui analyse le regard sur le marché immobilier de 8 000 agences indépendantes, tous les indicateurs d’un retournement de marché sont aujourd’hui perceptibles simultanément :

  • Un allongement des délais de vente qui n’a cessé de s’accentuer tout au long de l’année pour finalement dépasser le seuil de 150 jours de délai à la fin de 2023. Trois facteurs sont à l’origine de cette situation : la constitution de plus en plus complexe des dossiers de financement, une baisse des prix encore trop timide, et enfin, une pénurie d’acquéreurs. Face à ces cycles de commercialisation qui s’allongent, les agents immobiliers adoptent de nouvelles stratégies. En effet, ils étaient plus de 56 % au troisième trimestre à déclarer opérer une sélection plus drastique sur leur prise de mandats. Une attitude qui est cohérente au vu des stocks de biens déjà conséquents accumulés sur l’année.
  • Une reconstitution des stocks qui se poursuit mais qui tend néanmoins à se ralentir en cette fin d’année (+9% de stock à la vente entre le troisième et le quatrième trimestre contre +30 % entre le deuxième et troisième trismestre. Cette croissance est homogène dans les régions. En effet, on observe une hausse de +13 % des stocks de biens à la vente en Nouvelle-Aquitaine entre le troisième et quatrième trimestre, celle-ci s’élève à +21 % en Île-de-France sur la même période.
  • Les marges de négociation sont restées stables sur l’année, aux alentours de -5 %, alors qu’on s’attendait à une correction du marché une fois les négociations entre acheteurs et vendeurs entamées. Elles passent de -4,9 % au premier trimestre à -5,2 % au dernier trimestre (soit +0,3 point depuis le début de l’année), ne constituant donc pas une variable d’ajustement.
  • Le Baromètre observe un recul général du volume des transactions entre le troisième et le quatrième trimestre sur l’ensemble du territoire, notamment sur les régions Île-de-France et Nouvelle-Aquitaine qui enregistrent chacune une baisse de -1 % sur la période. En cette fin d’année 2023, le marché se dirige vers un retour à des volumes normatifs de transactions.

La performance énergétique est devenue un critère d’achat à part entière

Dans une époque où la sobriété énergétique est devenue un enjeu majeur, les diagnostics influent directement sur la perception des biens qu’ont les professionnels et les acheteurs. 45 % des agents immobiliers indépendants considèrent ainsi que les biens affichant une performance énergétique défavorable (étiquette F ou G au DPE) constituent une opportunité d’investissement. Pour ceux qui sont prêts à entreprendre des travaux de rénovation, il y a en effet de vraies opportunités de négociation des prix de vente.

Cependant, côté acheteurs, la perception est tout autre, puisqu’ils sont quasiment 7 acheteurs sur 10 à considérer les étiquettes F ou G comme rédhibitoires dans leurs critères d’achat. « Cette considération énergétique apparaît maintenant comme un élément déterminant dans l’acte d’achat des particuliers, qu’il conviendra désormais de considérer comme un « critère d’achat », au même titre que l’étage du bien par exemple », souligne Olivier Bugette.

Chute spectaculaire de la part des profils primo-accédants et investisseurs en 2023

Les acteurs les plus touchés par la crise immobilière sont indubitablement les primo-accédants. S’ils constituaient plus de 32 % des acquéreurs potentiels il y a moins de 18 mois, ils n’en représentent aujourd’hui plus que 15 %. L’augmentation des taux d’intérêt, associée à une inflation galopante, a eu raison des capacités d’emprunt des jeunes générations.

Autre catégorie d’acheteurs potentiels en net recul, les investisseurs ont désormais une position très attentiste en vue d’une baisse effective des prix de vente. En effet, s’ils constituaient encore 30 % du volume de transactions en 2022, ils ne représentent plus que 15 % des prospects acquéreurs en cette fin d’année 2023.

Conséquence de cette nouvelle réalité de marché, les secundo-accédants et les seniors représentent aujourd’hui 7 acheteurs potentiels sur 10. Cette dynamique reflète un changement significatif dans la composition des acheteurs et impacte incidemment certaines typologies d’actifs, les rendant moins attractifs.

2024 ou le défi de la baisse des prix

Au fil des derniers mois, la pénurie d’acheteurs s’est considérablement accentuée. Selon les agents immobiliers indépendants, 7 acheteurs sur 10 rencontrent des difficultés dans la constitution de leurs dossiers de financement.

Dans le même temps, 3 acheteurs potentiels sur 10 préfèrent jouer la montre en attendant des opportunités avec des baisses de prix significatives. Alors que le marché devient de plus en plus binaire avec, d’un côté ceux qui ne peuvent plus acheter et de l’autre ceux qui préfèrent attendre, il est fort probable que la baisse des volumes de transactions se poursuive en 2024.

La seule variable d’ajustement en capacité d’enrayer cet état de marché sera la baisse des prix de vente. Selon 80 % des agents immobiliers, le défi majeur de 2024 sera donc de sensibiliser les vendeurs à la nécessité d’une baisse des prix. Les acheteurs se trouvent dans des situations complexes, avec au mieux, l’espoir d’une stabilisation des taux. C’est pourquoi le marché doit s’ajuster à la réalité économique de 2024. « Le rôle de l’intermédiaire n’a jamais été aussi crucial, car il est le seul à pouvoir exercer un rôle de conseiller auprès des vendeurs et leur expliquer que l’époque où l’argent était quasiment gratuit et les prix très élevés est révolue », explique Olivier Bugette, CEO de La Boîte Immo.

Bien que l’urgence soit devenue flagrante pour les agents immobiliers, les vendeurs n’ont pas encore pleinement pris conscience de la situation : les vendeurs sont en effet encore plus de 50 % à ne pas envisager de baisse de leur prix de vente. Le marché immobilier, comme à son habitude, fait preuve d’une certaine inertie et tarde à se réajuster.

Les agents immobiliers indépendants auront un rôle prépondérant à jouer en tant que régulateurs du marché. « Leurs connaissances du marché local et la proximité qu’ils entretiennent avec leurs clients seront des atouts majeurs dans le dialogue qu’ils devront mener avec eux », conclut le CEO de La Boîte Immo.

 

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