« Allo allo, y-a-t-il quelqu’un là-haut ? » Tribune d’Alain Duffoux, président du SNPI

Alain Duffoux, président du SNPI, publie une tribune "coup de gueule.". Après un état des lieux sans détour quant à la politique des décideurs actuels, il propose des mesures de première urgence pour détendre le blocage et agir contre la crise de l’immobilier.

La crise immobilière est mondiale. Rien ne sert de reporter intégralement la faute sur nos gouvernants puisque cette crise touche l’ensemble du globe.

Pour autant, ils sont coupables ; oui coupables de négligence et de ne rien faire pour cesser d’aggraver la situation des générations de Français qui sont et seront, plus encore demain, sacrifiées. Au moment où ces lignes sont écrites, rien n’est encore fait et aucune décision significative n’est engagée ! Le gouvernement pourrait pourtant décider de la mise en place immédiate de mesures facilitant le redémarrage des transactions immobilières… Il semble que la cheffe du gouvernement n’ait pas encore pris la mesure de l’impact de cette crise !

Après avoir ouvert toutes les vannes pendant la Covid, le gouvernement coupe aujourd’hui le robinet sans discernement.

La chute des ventes immobilières entraîne des pertes financières directes immenses pour l’État. Ces pertes de recettes sont le résultat des faillites d’entreprises dans la promotion, dans les agences immobilières, chez les artisans, les fournisseurs d’équipement pour la construction et la rénovation, mais aussi les études notariales, les géomètres, les diagnostiqueurs, les annonceurs, les déménageurs, les assureurs, les banques, les fabricants de meubles et d’électroménagers… et par conséquent les commerces alimentaires, les restaurants, les transports, les voyagistes, les hôteliers… la liste est trop longue ! Mais pour finir nous aurons bel et bien une économie qui se sera effondrée et un taux de chômage qui repartira à la hausse de plus belle.

Soutenir l’immobilier c’est soutenir l’économie dans son ensemble, mais également préserver les emplois afin d’éviter une crise sociale majeure.

Les générations sacrifiées

La loi Climat et Résilience, qui impose aux bailleurs de réaliser des travaux visant à rendre les logements moins énergivores et plus décents, implique que si ces travaux ne sont pas exécutés, ces logements soient bannis du marché de la location.

Alors que le logement est l’alpha et l’oméga de la vie, nos gouvernants s’y attaquent. Oui l’État veut sacrifier des générations de bailleurs. Depuis des siècles, l’être humain développe, crée, industrialise, rapproche les hommes et les pays, facilite les communications, produit plus pour nourrir plus de monde, invente et innove sans cesse pour vivre mieux… Mais inévitablement pour faire cela, alors que la population mondiale ne cesse de croître, nous consommons et polluons.

C’est ainsi… et le logement n’est qu’une des pierres, parmi bien d’autres, de cet édifice du monde moderne dans lequel nous vivons. Une petite pierre d’ailleurs puisque les plus gros pollueurs, selon les dernières études publiées, sont les industriels du vêtement, le transport maritime, l’automobile et la fabrication des batteries des véhicules électriques… les vaches… et la liste est longue avant d’en arriver au logement.

Et pourtant, le chef de l’État, accompagné de la Présidente de l’Europe sont partis en guerre contre les propriétaires, responsables selon eux de la plupart des dysfonctionnements climatiques actuels.

Où sont les décideurs ? Conditions d’accès au crédit et report de calendrier

Ils ont décidé que les Européens et les Français au 1er chef, devaient montrer le chemin au reste du monde et se voir auréolés du titre de leader de la transition énergétique quitte à s’enfoncer plus encore dans la crise ! Il est si facile de s’en prendre à des catégories de population qui ne peuvent que subir. Longtemps, les automobilistes étaient les vaches à lait, et bien ils ne sont plus les seuls.

Alors que pendant des décennies on a expliqué, à juste titre, que l’investissement dans la pierre était un investissement de bon père de famille, les bailleurs sont aujourd’hui pris au piège. Ils devront engager de lourds travaux afin d’être compatibles avec le monde de demain !

Le constat de la situation est pourtant simple à faire : les diagnostics sont d’une fiabilité plus que relative et leurs critères sont d’ailleurs insensés. Les entrepreneurs, susceptibles d’exécuter ces travaux, n’ont à ce jour pas ou peu de personnels qualifiés pour les réaliser. Le coût des matériaux s’emballe et pour couronner le tout, les taux d’intérêt flambent, renchérissant d’autant la facture pour ceux qui souhaiteraient emprunter.

La conséquence est telle que, à force de les maltraiter, les bailleurs se rebiffent et plutôt que d’engager des travaux importants et financièrement lourds, décident massivement soit de conserver leurs biens vides soit de les vendre, asséchant plus encore le marché locatif ! Tout cela sans compter les bailleurs, souvent âgés, qui n’obtiendront pas leurs financements, ou bien encore la décision des banques de ne pas financer les acquisitions de biens classés F ou G.

Ils sont dans la rue

Inévitablement, les candidats locataires souffrent des conséquences de ces mesures drastiques et la rareté des logements à louer ne cesse de croître. Il existe même des candidats locataires prêts à louer sans même visiter le bien proposé ! Nous allons bientôt les appeler les GILETS PIERRE et ils vont prochainement descendre dans la rue afin d’exprimer leur colère.

La rue, nous le savons, est mauvaise conseillère, source de débordement et terreau des anti-républicains ! Le SNPI s’était vu confier une mission par la CPME à l’automne dernier, afin de trouver les moyens d’éviter une crise majeure du logement qui, de facto, impacterait les salariés. Et bien le rapport rendu fin d’année 2022 et dont les résultats ont circulé en 2023 n’a reçu aucun écho de nos gouvernants.

L’Europe, une fois de plus, lumière du monde, se tire une balle dans le pied en imposant aussi rapidement et massivement des mesures impossibles à « digérer » par nos concitoyens et nos entreprises ! Après les 35 heures, avec une administration pléthorique et une dette abyssale, nous nous engageons maintenant dans la loi climat et résilience !

« Nous demandons donc en priorité le report des contraintes pesant sur la rénovation des bâtiments. L’urgence impose de permettre aux locataires de trouver un toit. Nous demandons que l’État prenne à sa charge le coût de la rénovation des logements sur lesquels il a encaissé des impôts et taxes depuis trop longtemps, sans qu’à aucun moment il n’avertisse les propriétaires du caractère obsolète et polluant de ces logements. »

Le ministre de l’Économie, Bruno LEMAIRE, semble bien le seul à avoir compris les enjeux et malheureusement isolé face aux jusqu’au boutistes. Espérons qu’avec les professionnels et consommateurs, il trouve une voie raisonnable afin de surmonter cet obstacle majeur.

En complément, pour agir contre la crise de l’immobilier et tenter de détendre le blocage actuel, nous proposons des mesures de première urgence :

« Nous demandons au Gouvernement la suppression, pendant 24 mois, des droits de mutation pour les primo accédants d’un logement en résidence principale.

Nous demandons aux banques un assouplissement des critères d’octroi des prêts.

Nous demandons aux banques de baisser leurs marges sur les prêts immobiliers pour permettre aux français un accès plus facile au crédit immobilier.

Nous demandons la possibilité de transfert des crédits lors de l’achat d’un autre bien immobilier. En effet, en cas de vente d’un bien le crédit peut être reporté sur le nouveau bien aux conditions antérieures. Le surplus d’emprunt se fera, bien entendu, aux conditions actuelles du marché. »

Ces mesures ne résoudront pas l’ensemble de nos problèmes mais elles enverront un signal fort et permettront à minima un volume de transactions significatif qui redonnera du souffle à toute une filière.

Ayons le courage d’oser. Le silence est assourdissant et le mutisme que nous avons pu observer ces dernières années n’est plus tenable. Comme disait la marionnette des Guignols représentant le Président Jacques Chirac, « Putain, trois ans c’est long ».

 

Extrait de l’entretien de Alain Duffoux pour le magazine l’Expression édition de Nov/Dec 2023

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