« Agents immobiliers : connaissez-vous le bail réel solidaire (BRS) ? »

Les outils de vente de logements se diversifient sur le marché immobilier. Le code de la construction et de l’habitation a été doté d’un contrat particulier pour répondre au besoin de créer du logement abordable. Il s’agit du Bail réel solidaire aussi appelé BRS. Revue de détail par Sophie Droller-Bolela, juriste et formatrice en immobilier.
BRS

Nous verrons dans cet article le mécanisme juridique du BRS. Les phases successives de ce montage laissent la place à différents acteurs dont les bailleurs sociaux et les promoteurs. Cependant, il n’est pas inenvisageable que les agents immobiliers puissent intervenir sur ce marché en tant que partenaire de ces acteurs dans la phase de commercialisation des biens.

1. Comment définir ce nouveau mécanisme d’accession à la propriété abordable de bail réel solidaire (BRS) ?

Le bail réel solidaire ou BRS se présente comme un nouvel outil à disposition des promoteurs privés et des bailleurs sociaux pour permettre à des ménages cibles de pouvoir accéder à la propriété immobilière ou plus précisément celle de leur logement et cela à moindre coût.

2. Quel est le mécanisme juridique qui permet d’accéder à la propriété à un prix inférieur au marché ?

Dans le cadre du BRS, la volonté du législateur a été de permettre l’accession à la propriété d’un bien immobilier pour se loger à titre de résidence principale avec un objectif de faire baisser le prix d’acquisition d’environ moins 30%. Cela est devenu possible grâce à un mécanisme juridique qui a déjà fait ses preuves, la dissociation du foncier et du bâti. Mécanisme emprunt des baux à construction ou encore du bail emphytéotique.

Le BRS est donc un bail dit de longue durée qui créé au profit du preneur un droit réel immobilier. Le contrat qui va lier le ménage ou la personne physique à un OFS va lui conférer un pouvoir direct sur son logement dans la limite des droits qui lui sont conférés dans le BRS (Article L255-1 du CCH).

3 – Qui sont les acteurs du bail réel solidaire (BRS) ?

Il faut distinguer 2 situations :

  • soit nous sommes face à un bail réel solidaire développé dans une opération immobilière neuve
  • soit nous sommes dans un bail réel solidaire développé par un bailleur social sur son propre patrimoine

Dans la première hypothèse, nous allons rencontrer 3 acteurs et 2 contrats. Dans le cadre d’une opération neuve, l’organisme de foncier solidaire ou OFS (Article L 329-1 du Code de l’urbanisme) va porter le terrain pendant toute la durée du BRS, durée qui peut s’étaler de 18 à 99 ans. Il met donc à disposition son terrain qui va être l’assiette foncière de l’opération.

Cet OFS va se rapprocher d’un opérateur qui aura comme mission de construire un immeuble à destination de logements et ensuite de céder les droits que ce dernier détient de ce BRS opérateur à des preneurs individuels.

Cet opérateur peut être un promoteur immobilier privé comme un bailleur social, il va donc procéder à la réalisation classique de la construction d’un immeuble avec la commercialisation de contrats de réservation puis la signature de VEFA portant sur les droits réels immobiliers dont vont être titulaires les différents ménages répondant aux exigences légales. Cette phase de commercialisation pourrait être confiée à des agents immobiliers de proximité dans certaines hypothèses.

Une fois l’opération de construction et de commercialisation de l’immeuble terminées le BRS opérateur disparaît pour ne laisser place qu’à une seule relation contractuelle, celle qui va lier l’OFS au preneur individuel pour toute la durée du BRS. Les preneurs individuels seront donc à compter de la livraison redevable d’une redevance mensuelle vis-à-vis de l’OFS pendant toute la durée de leur contrat.

Dans la 2nde hypothèse lorsque le bailleur social réalise une opération de BRS sur son patrimoine existant au travers de l’application de l’article l 443- 7 du CH modifié à la suite à la loi 3D 3DS il n’y aura donc que 2 acteurs : le bailleur agréé OFS et les acquéreurs (occupants ou personnes physiques sous plafonds de ressources);

Le bailleur social agréé comme OFS peut donc porter directement une opération. Il lui reviendra de signer des promesses de BRS avec des preneurs individuels puis de passer à l’acte authentique. Une fois que cet acte authentique passé il y a un transfert de propriété des droits réels immobiliers portant sur cet immeuble. Les acquéreurs/preneurs lui verseront une redevance correspondant au droit d’occupation et de jouissance du terrain d’assiette de l’immeuble. Tout comme dans le cadre de la vente HLM classique le bailleur social pourrait être amené à se rapprocher d’agents immobiliers capables de leur vendre leur patrimoine sous la forme d’un BRS.

4 – Qui sont les ménages qui vont pouvoir bénéficier de l’accession à prix mesuré offert par le mécanisme du bail réel solidaire (BRS) ?

Les textes visent les ménages ou les personnes physiques sous plafonds de ressources PSLA ce qui signifie qu’on exclut les personnes morales telles que des SCI et tout acquéreur qui ne remplirait pas ces critères d’éligibilité.

5- Quels sont les avantages fiscaux et financiers que des preneurs individuels auraient à acheter un bien immobilier sous forme de BRS ?

D’une part, l’acquisition d’un logement dans le cadre d’un bail réel solidaire (BRS) a pour premier avantage que l’effort demandé aux ménages ou à la personne physique pour pouvoir accéder à la propriété d’un logement sera moindre que sur le marché libre puisqu’une décote en corrélation avec la dissociation du foncier et du bâti va s’appliquer au prix de vente et cela même si le preneur verse une redevance mensuelle pendant sa durée de détention.

D’autre part ces ménages ou personnes physiques vont pouvoir bénéficier d’aides fiscales pour l’acquisition à savoir le TZ (sous conditions amenées à évoluer au jour où nous écrivons cet article).

De même ils pourront s’ils travaillent dans une entreprise qui cotise au 1% bénéficier du prêt accession social (Action logement – condition qui peut également évoluer au jour où nous écrivons cet article).

6- Qu’en est-il de la taxe foncière sur la propriété bâtie dans le cadre d’un bail réel solidaire (BRS) ?

La réponse est claire puisque le II de l’article 1400 du CGI précise que lorsqu’un bien immobilier fait l’objet d’un BRS, la taxe foncière sur la propriété bâtie est éditée au nom du preneur à bail réel solidaire. En conséquence ce sont donc bien les ménages ou personnes physiques isolées qui vont être les redevables de cette taxe.

Rassurons-nous, il a été également prévu que les collectivités ou les EPCI sur lesquelles ces opérations de BRS sont développées ont la possibilité d’offrir un abattement concernant leur part sur cette taxe foncière sur la propriété bâtie qui varie de 30 à 100%. Ce qu’il faut savoir c’est qu’une fois que l’opération a démarré et que la délibération instituant cet abattement sur la part communale de la taxe foncière sur la propriété bâtie a été prise, il va s’appliquer pour l’ensemble du programme pendant toute la durée de ce BRS il n’y aura donc pas de remise en cause. La remise en cause est toutefois possible si le bien est effectivement utilisé en contrariété avec l’objectif pour lequel il a été il a créé.

7- Comment bénéficier de cet abattement sur la taxe foncière et la propriété bâtie ?

L’abattement sur la taxe foncière sur la propriété bâtie n’est pas automatique même si la collectivité a pris une délibération en ce sens, il faudra effectivement que le preneur individuel (ménage ou personne physique isolée) fasse une démarche déclarative auprès de ces impôts.

Extrait du BOFIP :

En application de l’article 1388 octies du CGI, pour pouvoir bénéficier de l’abattement, le redevable de la taxe doit avoir adressé, au service des impôts du lieu de situation des biens, avant le 1er janvier de l’année suivant celle de la signature du bail réel solidaire :

– une déclaration conforme au modèle établi par l’administration (imprimé n° 6738-SD prochainement disponible sur le site www.impots.gouv.fr) comportant tous les éléments d’identification des biens (série « commune, section, numéro de plan, bâtiment, entrée, niveau » ou « numéro d’invariant du local ») ou, le cas échéant, toute modification affectant les locaux bénéficiant de l’abattement ;

– une copie du bail réel solidaire fourni en annexe à la déclaration prochainement disponible. Cette obligation déclarative est réputée satisfaite lorsque le preneur à bail réel solidaire a fourni une copie du bail pour l’ensemble des locaux situés dans la même commune.

Lorsque cette déclaration accompagnée des pièces justificatives est souscrite hors délai, l’abattement s’applique pour la durée restant à courir après le 31 décembre de l’année de la souscription.

8- Peut-on réaliser une plus-value dans le cadre de la revente du bail réel solidaire (BRS) par son propriétaire le preneur individuel ?

La réponse est positive, en effet l’acquisition d’un logement via un BRS n’empêche pas son propriétaire de réaliser une plus-value. Ce qu’il faut savoir c’est que cette plus-value va être plafonnée (Article L255-5 du CCH), elle est plafonnée parce qu’en réalité on attend des acquéreurs qu’ils contribuent à l’effort de solidarité en pratiquant des prix de revente non déconnectés de la capacité de leur sous-acquéreur. On parle donc d’une plus-value limitée, qui permettra au moins de ne pas perdre sa mise de départ (frais d’acquisition compris).

Cette clause anti-spéculative, se présente comme une disposition du code de la construction et de l’habitation qui manquait au système du PSLA. En imposant le plafonnement du prix de cession du droit réel immobilier du preneur en BRS le législateur a mis en place un garde-fou contre la spéculation immobilière. Spéculation immobilière n’oublions pas qui aurait été réalisée alors même qu’une personne publique ou parapublique a fait elle-même un effort en n’intégrant pas dans son prix initial de vente du logement le prix du foncier. C’est là toute la philosophie du BRS.

On notera que cette clause anti-spéculative va se heurter avec une conception commune qu’est celle de considérer qu’il n’y a de plus-value réelle que si le bien revendu rapporte un accroissement de la valeur important. Il va donc falloir attirer l’attention des acquéreurs de ces logements sur le fait que le BRS se présente comme un outil de capitalisation avant toute chose leur permettant comme un tremplin pour l’avenir.

9- Pourquoi acheter un logement en bail réel solidaire (BRS) ?

La première réponse qui vient en tête est celle de payer moins cher son logement, de bénéficier d’un prix attractif pour des ménages qui ne pourraient pas accéder à la propriété dans les secteurs dans lesquels les opérateurs développent ces opérations en BRS.

Rappelons-nous que le BRS a vocation à être commercialisé dans des zones de tension forte immobilière là où les prix sont très élevés. Il a donc vocation à permettre à des acquéreurs de pouvoir accéder à la propriété dans des secteurs où ils vont trouver un intérêt particulier à y rester. Je cite souvent dans le cadre de mes formations sur le BRS le cas d’une famille qui scolarise/fait garder ses enfants dans un secteur proche des commerces/médecins/transport et qui souhaite s’y installer. Aujourd’hui, ces secteurs très prisés car offrant une multitude de services sont très prisés donc plus cher que d’autres zones. La dissociation du foncier et du bâti peut donc se présenter comme un avantage certain à ce niveau-là.

Glossaire :

  • OFS : organisme de foncier solidaire agréé par la Préfecture pour porter des terrains dans le cadre du bail réel solidaire
  • BRS : bail réel solidaire
  • BRS opérateur/global : BRS signé entre un OFS et un opérateur qui construit les logements et les commercialise en VEFA
  • BRS preneur/individuel : contrat signé entre un OFS et les acquéreurs individuels de droits réels immobiliers correspondants au logement

 

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Sophie Droller-Bolela: Diplômée d’un Master Immobilier Public-privé, Sophie Droller-Bolela après avoir travaillé pendant plus de 10 ans en tant que juriste immobilier dans une étude notariale a décidé de co-créer son propre réseau de formateurs immobilier. Immo-formation.fr s’adresse à tous les professionnels qui souhaitent développer leurs compétences en matière immobilière. Elle anime également un blog d’actualité juridique immobilière depuis 2015. Sa philosophie : Adaptabilité – partage – valeur ajoutée Basée à Clichy la Garenne elle intervient sur toute la France. Tel : 07-68-32-27-67