Marché du recrutement : une guerre de position
Le recrutement est un point d’achoppement pour les professionnels de l’immobilier. Alors qu’en 2019, 74 %(1) des professionnels exprimaient leur difficulté à recruter, une étude conduite par Recrutimmo témoigne d’une tension qui s’accentue encore.
Fin 2022, 91 % d’entre eux qui affirment être confrontés à ce problème. Face à la pénurie de talents, les professionnels ajustent leurs techniques de marketing pour attirer les candidats et fidéliser leurs collaborateurs. Séduction, attention, valeurs, les grands réseaux se concurrencent et tentent de tirer leur épingle du jeu pour obtenir le graal : se placer dans le top 10 des meilleures marques employeur, une récompense clé de l’attraction des collaborateurs mais aussi un vecteur du développement du réseau de franchise.
Mais la guerre des collaborateurs ne saurait se remporter sans leur proposer une véritable expérience (2). Celle-ci peut se bâtir – et s’entretenir – grâce à trois piliers essentiels : une proposition de valeur collaborateur claire et pertinente qui séduit les candidats, une raison d’être qui engage les collaborateurs et une atmosphère qui les fidélise.
Marque employeur : capitaliser sur l’expérience collaborateur avec trois piliers majeurs
1 – Séduire avec une proposition de valeur collaborateur personnalisée
Définir une proposition de valeur collaborateur (PVC) personnalisée et attractive nécessite au préalable de bien comprendre sur quoi repose la valeur perçue d’un travail. Les recherches en ressources humaines en identifient cinq dimensions (3) :
- la valeur d’attrait : les nouvelles pratiques de travail, l’autonomie, la créativité accordée ;
- la valeur sociale/hédonique : la qualité des relations professionnelles ;
- la valeur économique : les salaires proposés, la sécurité de l’emploi ;
- la valeur de développement : les opportunités de reconnaissance, les possibilités de carrières ;
- la valeur de transmission : c’est-à-dire la transmission de son savoir.
Toutes les idées sont bienvenues : remises de trophées, organisation de festivals, espaces de coworking, offre de formations, d’autonomie, de rémunération attractive… Ce sont autant d’exemples d’éléments de valeur proposés par les grands réseaux.
Mais avec des taux de rotation importants, force est de constater qu’outre la difficulté du métier, le contenu de l’offre de travail n’est sans doute pas à la hauteur des espérances des talents devenus plus exigeants. Ainsi, il s’agit de bien connaître ce que les collaborateurs attendent pour définir de façon opérationnelle une proposition de valeur collaborateur réellement séduisante à leurs yeux.
L’appétence est aujourd’hui pour une GRH à la carte, dans laquelle chaque individu compose son propre « bouquet » en fonction de ses envies, besoins ou valeurs. La personnalisation de la carrière est de mise. On comprend dans ces conditions que la data collaborateur devient critique. Instaurer des dispositifs d’écoute des collaborateurs et des KPI de performance managériale de leur engagement tels que le eNPS (Employee net promoter score, pendant du NPS pour le client) vous permettra de définir une offre de travail ciblée et adaptée à leurs besoins.
2 – Engager par sa raison d’être
Narcissique et individualiste mais aussi en quête de sens et d’utilité sociale, la nouvelle génération est riche de ses paradoxes et c’est avec ceux-ci que les organisations doivent composer si elles souhaitent susciter leur engagement. Concrètement, cela revient à définir quelque chose qui transcende les affaires. Tel doit être l’objectif d’une marque employeur pour inspirer et construire une expérience digne de ce nom.
Dans ce contexte, une raison d’être fondée sur la responsabilité sociétale de l’organisation devient alors un levier important de l’engagement des collaborateurs.
3 – Attirer et fidéliser par l’atmosphère du lieu de travail
L’atmosphère, définie en marketing comme les facteurs d’ambiance, de design, et sociaux est également un véritable atout à cultiver et à soigner, tant pour le recrutement que pour la fidélisation. En jouant sur les émotions, les éléments de l’atmosphère d’un lieu de travail (luminosité, bruit, confort, esthétisme, odeur) ont une incidence bénéfique sur la cohésion d’équipe et le bien-être du travailleur. Penser le cadre d’expérience du collaborateur ne doit pas se limiter à la seule atmosphère de l’espace, il faut engager les mêmes efforts de soin sur le travail en lui-même. La simplification organisationnelle, la simplification des process et les outils digitaux mis à la disposition des collaborateurs sont des éléments de valeur importants en ce qu’ils circonscrivent l’architecture de leur expérience.
Il convient d’être facilitant, de résoudre leurs problèmes et d’anticiper leurs demandes de façon à se placer en adéquation avec leurs attentes. On reprend ici l’idée de Dixon et al. 2010(4) selon laquelle la meilleure expérience résulte de la minimisation du niveau de l’effort. L’employee effort score (eEs) pendant du customer effort score devint dès lors une façon de mesurer l’expérience du collaborateur.
On retiendra
L’expérience collaborateur est un avantage concurrentiel sous-exploité aujourd’hui. Le concept de symétrie des attentions et la criticité des RH dans la performance des entreprises n’est pas nouveau, mais plus que jamais, la crise a accéléré la tendance.
L’analyse des avis et commentaires des collaborateurs, eNPS, eES, constituent des indicateurs très instructifs de leur expérience.
Couplés à des audits conduits sur les collaborateurs perdus, l’entreprise dispose alors de la boîte à outils nécessaire pour mettre en lumière les difficultés rencontrées et redéfinir une PVC attractive et engageante. Autrement dit, il serait temps de s’intéresser à la satisfaction des collaborateurs avec autant d’énergie qu’on le fait lorsqu’il s’agit de la satisfaction client.
1) la 3e étude annuelle sur l’économie et les métiers de l’immobilier.
2) Morgan, J. (2017). The employee experience advantage: How to win the war for talent by giving employees the workspaces they want, the tools they need, and a culture they can celebrate. John Wiley & Sons.
3) Berthon, P., Ewing, M. et Hah, L.L. (2005). Captivating company: dimensions of attractiveness in employer branding, International Journal of Advertising, 24, 2, 151-172.
4) Dixon, M., Freeman, K., & Toman, N. (2010). Stop trying to delight your customers. Harvard Business Review, 88(7/8), 116-122.