Le premier constat de l’étude Recrutimmo est significatif : 91 % des entreprises déclarent rencontrer des difficultés de recrutement en immobilier, tandis que 75 % des candidats interrogés estiment qu’il est « facile » de trouver un emploi dans le secteur. C’est indéniable : l’état du marché continue de se tendre, déséquilibrant encore un peu plus la relation employeurs/candidats au bénéfice de ces derniers.
Le marché de l’emploi appartient aux talents
Les talents du secteur sont non seulement particulièrement à l’écoute du marché du recrutement (83 %), mais ils se disent aussi régulièrement sollicités par d’autres employeurs (86 %), chiffre en augmentation constante depuis 4 ans.
Le marché de l’emploi appartient donc aux talents, ce dont ils ont parfaitement conscience, et l’équilibre des forces a définitivement basculé de leur côté. Cela crée nécessairement une instabilité forte sur le secteur, dont le turn-over est particulièrement élevé. Près d’un candidat sur deux (45 %) déclare avoir moins de 2 ans d’ancienneté dans son poste actuel ou le précédent, tandis que seulement 28 % d’entre eux ont plus de 5 ans d’ancienneté dans leur entreprise. Par comparaison, l’interrogation des candidats issus de la reconversion professionnelle démontre une instabilité propre au secteur de l’immobilier : 27 % d’entre eux avaient plus de 10 ans d’ancienneté dans leur précédent emploi (contre seulement 12 % dans l’immobilier) et seulement 30 % d’entre eux avaient moins de 2 ans d’ancienneté dans leur précédent poste.
C’est un sujet dont les recruteurs ont une connaissance aiguisée puisqu’ils évaluent parfaitement l’ancienneté moyenne de leurs collaborateurs dans leur entreprise. Cela ne manque pas de créer souvent des problématiques de management, celui-ci étant conditionné par une certaine crainte de voir ses collaborateurs quitter l’entreprise.
Au-delà de cette instabilité quasi structurelle, le marché du recrutement dans l’immobilier est devenu un marché soumis à une concurrence exacerbée entre les professionnels, qui nécessite d’intégrer les nouveaux paradigmes du recrutement et de maîtriser les outils mis à disposition des recruteurs pour attirer leurs futurs collaborateurs. Ne pas s’adapter aux talents ni aux pratiques de ses concurrents finira par faire perdre des parts de marché.
Pour les employeurs, il est plus que jamais d’actualité de comprendre le fonctionnement des talents et des candidats pour les attirer et les fidéliser. La réalité de l’entreprise doit entrer en accord avec les promesses faites : le management des professionnels de l’immobilier doit progresser et se mettre au niveau des standards actuels. Intégrer, former, animer et donc fidéliser ses équipes sont des enjeux tout aussi importants que le recrutement initial, dont ils sont indissociables, mais sont malheureusement trop souvent délaissés.
La reconversion professionnelle, un indispensable vivier de talents
Heureusement, l’immobilier est un secteur qui séduit énormément les talents, notamment en reconversion professionnelle. Et dans le sens inverse, le secteur autorise historiquement, le plus souvent avec un réel succès, le lancement de nouvelles carrières professionnelles. D’ailleurs, que serait l’état de l’emploi dans l’immobilier si celui-ci n’était pas autant ouvert à la reconversion ? Plus qu’une tendance, la reconversion est intimement liée à l’immobilier, et ce depuis toujours. Preuve en est le profil des professionnels de l’immobilier : 84 % d’entre eux ont travaillé dans un autre secteur que l’immobilier avant d’y faire carrière. C’est pourquoi aujourd’hui, 87 % des employeurs du secteur se disent rechercher des profils en reconversion. En allant plus loin, 68 % d’entre eux ajoutent que le diplôme n’est pas un critère d’embauche, s’attachant bien plus à la personnalité et à l’expérience des candidats.
Toutefois, un critère émerge de plus en plus chez les recruteurs : trouver des candidats géographiquement proches de leur entreprise, afin qu’ils bénéficient d’une véritable connaissance du marché et d’une disponibilité plus importante de leurs collaborateurs. Cela tombe bien : un grand nombre de collaborateurs recherchent un meilleur équilibre vie privée – vie professionnelle et n’ont plus envie de passer du temps dans les transports.
L’immobilier offre des carrières variées, des rapports humains, de meilleures rémunérations : cela se sait et ces perspectives attirent de nombreux candidats en quête de changement de vie. Ces candidats ont déjà une expérience professionnelle et de vie significative
(55 % d’entre eux ont plus de 10 ans d’expérience professionnelle), ce qui démontre une vraie maturité dans leur projet.
Il convient donc de continuer à faire preuve d’ouverture d’esprit pour embaucher, intégrer et former de nouvelles ressources humaines à ces beaux métiers que sont ceux de l’immobilier. C’est un immense défi qui est proposé aux employeurs du secteur de la pierre, ou plutôt qui leur est imposé. Le chemin est ardu, la pente abrupte, mais la réussite des entreprises du secteur passera par l’intégration de cet environnement pour permettre de poursuivre leur développement !
La formation et l’intégration, des outils d’attraction et de fidélisation
Si le secteur de l’immobilier est propice aux reconversions professionnelles, il ne faut pas pour autant imaginer que les métiers de la pierre sont des métiers faciles. L’immobilier est un milieu riche en compétences, ce qui le rend complexe à appréhender et nécessite des capacités d’acquisition et d’adaptation importantes, ainsi qu’une vraie force de travail. Il est donc nécessaire pour réussir une reconversion professionnelle ou tout simplement réussir un changement de poste ou d’entreprise, de disposer d’une intégration et d’une formation au niveau des exigences du secteur. Les candidats expriment d’ailleurs leurs attentes extrêmement fortes en termes d’accompagnement et de disponibilité du manager (95 %) et en termes de formation aux méthodes de travail (70 %).
Pourtant, il faut être honnête : il existe un véritable écart entre ces exigences et la réalité. Aujourd’hui, un tiers des nouveaux collaborateurs quitte l’entreprise pendant leur période d’essai. Mauvais choix du candidat ou du recruteur ? Défaut d’intégration du collaborateur ou formation insuffisante pour réussir ? Difficile de trancher mais un élément milite plutôt en faveur des deux dernières propositions : 33 % des candidats interrogés estiment n’avoir pas été ou pas suffisamment intégré et formé lors de leur arrivée dans l’entreprise. Et pour cause, 81% des nouveaux collaborateurs reçoivent une intégration et une formation d’une durée inférieure à 1 mois, ce qui paraît pourtant être une durée minimum pour disposer des outils nécessaires afin de devenir compétent dans les métiers de l’immobilier. Pire, pour plus de la moitié d’entre eux (52 %), la formation n’excède pas une semaine !
C’est donc une vraie prise de conscience à laquelle doivent se soumettre les recruteurs du secteur qui ne semblent pas mesurer l’importance de l’intégration et de la formation dans la réussite de leurs collaborateurs. Il devient essentiel de capitaliser sur les recrutements effectués. Engager autant d’énergie, de temps, voire d’argent pour recruter un collaborateur pour que celui-ci quitte l’entreprise pendant la période d’essai ou ne réussisse pas dans son nouveau poste n’a aucun sens.
La marque employeur au cœur du réacteur immobilier
Pour réussir son recrutement, il faut aussi comprendre les attentes des talents, savoir y répondre et utiliser les bons canaux de communication pour les toucher. Aujourd’hui, 98 % des candidats se renseignent sur l’entreprise avant de postuler ou de venir en entreprise. Que cherchent-ils ? Des éléments pour choisir l’entreprise pour laquelle ils vont vouloir travailler. Ils recherchent à savoir si celle-ci leur apportera une rémunération satisfaisante (62 % des candidats placent la rémunération dans leur trio de tête), l’équilibre vie professionnelle – vie personnelle continue de progresser (61 %) et une ambiance d’entreprise agréable est jugée essentielle pour un candidat sur deux. Face à ces attentes, force est de constater que les employeurs ont compris le message. Ils déclarent d’ailleurs mettre en place un certain nombre de mesures afin d’attirer et fidéliser les candidats (primes et avantages pécuniaires : 57 % ; repas et after-work d’équipe : 55 % ; infrastructure et environnement de travail : 45 %). Toutefois, il n’en reste pas moins que les canaux de communication entre recruteurs et candidats connaissent une véritable distorsion. En clair, les candidats se positionnent sur des canaux de communication qui ne sont pas suffisamment utilisés par les recruteurs pour se faire remarquer. Les employeurs ont travaillé le « contenu », mais doivent encore progresser sur le « contenant », c’est-à-dire les médias utilisés pour communiquer avec le candidat, et y associer des moyens conséquents.
Sur un marché devenu particulièrement concurrentiel, le candidat est difficile à capter et à fidéliser. Sans utiliser les principaux canaux de mise en relation avec les candidats, le recruteur se prive de la plus grande source d’acquisition. Or cette donnée semble mal appréhendée et le budget alloué au recrutement est en chute libre. Ainsi, 43 % des recruteurs n’attribuent aucune dépense et 66 % d’entre eux dépensent moins de 1000 euros. Ils recrutent avant tout via le bouche-à-oreille (62 %) ou via des réseaux sociaux non professionnels (Facebook : 63 %). Pourtant, les candidats utilisent de leur côté massivement les plateformes digitales d’emploi (83 % via les jobbards), ainsi que dans une seconde mesure les réseaux sociaux professionnels (LinkedIn – 33 %).
Il est donc indispensable pour les recruteurs d’investir pour être visible et pour acquérir des talents en vue de satisfaire leurs besoins en recrutement.
Flexibilité du statut : convaincre le salarié ou le recruteur ?
L’immobilier est structurellement un secteur consommateur de profils indépendants. De fait, la demande des recruteurs de profils indépendants progresse chaque année, notamment sous l’impulsion du développement des réseaux de mandataires immobiliers ou des courtiers en VEFA. Lorsque nous interrogeons les recruteurs, ils sont 47 % à déclarer ne recruter que des indépendants, tandis que les 53 % restants recrutent des profils plutôt salariés.
Les raisons qui poussent les recruteurs à se tourner vers le statut d’indépendant sont principalement le coût représenté par le salarié, qui serait plus important que celui des indépendants. La deuxième motivation est celle de l’autonomie, en liant le statut d’indépendant à un besoin moindre de formation. En dernier lieu, le statut confèrerait plus de motivation aux collaborateurs que le statut de salarié.
Sur le premier sujet, cette équation est vraie si et seulement si le collaborateur n’obtient que des résultats (très) insuffisants. En effet, c’est en dessous de 60 000 euros HT par an qu’un collaborateur salarié est plus coûteux qu’un indépendant. Au-delà, l’indépendant coûtera plus cher que le salarié. En outre, le coût du départ d’un indépendant peut vite être décourageant pour un employeur, puisque les indemnités d’un départ non souhaité par un collaborateur indépendant seront largement plus élevées que celles d’un salarié.
En ce qui concerne celui de l’autonomie, le statut n’a que peu à voir dans ce sujet. En effet, l’autonomie n’a jamais été liée au statut d’un collaborateur mais à sa maturité professionnelle et son expérience dans le métier. Ainsi, indépendant ou salarié, le recruteur doit toujours avoir en tête que c’est l’intégration, la formation et l’expérience professionnelle d’un collaborateur qui le rendront autonome et non son statut.
Enfin, concernant la motivation, chaque collaborateur fonctionnera selon son propre filtre. Si certains seront soumis à une (bonne) pression par l’absence de rémunération fixe, d’autres à l’inverse seront plus à l’aise avec une forme de sécurité financière (très relative compte tenu du fait que la rémunération est essentiellement liée aux résultats).
Finalement, le choix d’un statut n’a pas de vérité absolue et il convient pour le recruteur de s’adapter à chaque profil, à sa réalité d’entreprise et de marché, mais toujours en considérant que la réussite d’un collaborateur sera directement liée à l’implication du manager dans celle-ci. Recruter un statut indépendant n’exonère pas l’employeur de son obligation d’intégrer, de former et d’accompagner ses collaborateurs, malgré ce que certains peuvent penser.
Du côté des candidats, ils ne sont que 8 % à être prêts à devenir ou à rester indépendant. Ce chiffre correspond à une sensibilité structurelle de notre pays qui fait encore du contrat de travail le mode d’employabilité principal. Le déséquilibre apparaît donc particulièrement élevé, à tel point que l’on ne s’étonne plus des difficultés de recrutement des entreprises qui s’appuient massivement sur des indépendants. Toutefois, à y regarder de plus près, il existe des motifs d’encouragement.
Premièrement, on se rend compte que 42 % des candidats initialement plutôt favorables au salariat, seraient finalement prêts à devenir indépendants pour une rémunération plus stimulante. Ensuite, le salariat est avant tout recherché de peur de perdre trop facilement son emploi (31 %), d’un manque de fonds disponibles au démarrage (25 %) ou de l’isolement professionnel (11 %).
Connaître ces craintes permet au recruteur d’adapter son discours pour démontrer au candidat que ces aspects sont, soit des croyances limitantes, soit des obstacles aisément contournables.
Enfin, la jeune génération nous démontre que les lignes ne sont pas figées et évoluent vers une société moins portée sur le salariat. Les étudiants actuels sont 18 % à envisager de travailler en tant qu’indépendant, soit plus du double des professionnels actuels. En outre, quand on interroge les « pro-salariat » sur les raisons qui les feraient changer d’avis, 64 % d’entre eux pourraient devenir indépendants en fonction de la rémunération proposée.
Comme dans toute démarche commerciale, il est donc essentiel d’écouter les attentes et les craintes des talents, de les entendre et d’y apporter les réponses adéquates pour les convertir en collaborateurs. La concurrence se situe désormais dans cette capacité à convaincre les candidats quant à leur intérêt de choisir tel ou tel statut : rémunération, intégration, formation, autonomie.
Et les jeunes ?
Enfin, l’étude Recrutimmo donne la parole aux étudiants en alternance qui s’orientent vers les métiers de l’immobilier. Ils sont attirés par la possibilité d’avoir des carrières variées et par les perpectives d’évolution qu’offre le secteur immobilier. C’est un dossier que nous aborderons lors du prochain numéro du Journal de l’Agence !