Le concept est intellectuellement intéressant et présente peut-être un potentiel important, mais depuis les premières annonces en 2017 il est resté, en France, à l’étape du laboratoire et peu de choses sont sorties des éprouvettes.
Un mécanisme très complexe
Comprendre finement comment fonctionne la Tokenisation et son support la blockchain est complexe, voire très complexe. En simplifiant beaucoup, la finalité peut être présentée comme un procédé qui divise les titres de propriétés immobilières en « jetons » de faible valeur unitaire que l’on peut échanger sans frais ni intermédiaires.
Investir des petites sommes, plus vite et facilement, à moindre frais
De longue date, les investisseurs ont cherché à placer des fonds dans l’immobilier sans acquérir directement un bien afin d’éviter de le gérer, et pour répartir leurs placements sur un portefeuille diversifié et engager des montants plus petits que le prix d’un immeuble. Ils trouvent des réponses dans les supports de la pierre-papier : SCPI, OPCI, SIIC.
La Tokenisation présente, en théorie, des avantages supplémentaires comme la possibilité d’échanges ou d’investissements sans intermédiaire, sans formalité, sans frais et instantanés. Sur les plateformes américaines, il est possible d’investir 50 dollars dans un immeuble en quelques clics. La Tokenisation vise à toucher un public beaucoup plus large que celui des investisseurs traditionnels du secteur.
En france, peu d’opérations ont été tokenisées
Il semble que depuis 2019, seules deux opérations ont été tokénisées en France. D’une part, le promoteur immobilier Sapeb Immobilier a acquis pour 6,5 millions d’euros un hôtel particulier situé à Boulogne-Billancourt, et il en détient désormais les droits uniquement accessibles à travers la blockchain.
D’autre part, le fond Mata Capital a tokenisé un immeuble parisien de 26 millions en 2020. En réalité, ces tokens représentent les parts d’un fonds lancé à titre de ballon d’essai, sans suite. Mata Capital a testé l’acquisition d’un immeuble, mais pas la liquidité des tokens qui aujourd’hui ne peuvent pas être cédés sur Internet. Il semble que la législation ne le permette pas…
Aux USA, des avancées plus probantes bien que limitées
Des start-up américaines ont été beaucoup plus loin dans la mise en œuvre de la Tokenisation de l’immobilier et il est possible d’investir facilement de petites sommes. La promesse d’investir sans formalité n’est pas réellement respectée car la création d’un compte avec déclaration de son identité dans le cadre d’un processus de vérification Know Your Customer (KYC) est déjà une formalité qui peut rebuter. La Tokenisation est possible car une loi américaine reconnaît légale la Tokenisation des parts de société ; dans le cas de l’immobilier, le token est une fraction du capital de la société qui détient l’immeuble.
La start-up américaine la plus avancée est RealT, www.realt.co. Sur son site Internet, on voit clairement comment se déroule le processus, la promesse de rendements locatifs nets autour de 10 % et la possibilité de pertes en capital si l’on souhaite revendre ses tokens. Dans ce cas, c’est RealT qui rachète les tokens. RealT annonce avoir réalisé la Tokenisation de 200 biens pour un montant de 46 millions de dollars. Ce sont des chiffres intéressants pour une société fondée en 2019, mais une goutte d’eau dans un secteur où les fonds immobiliers comptent en dizaines de milliards.
Ce qu’il faut retenir
La Tokenisation permettra peut-être demain d’investir facilement des petites sommes dans des biens immobiliers ou dans des fonds immobiliers, ce qui ouvrira ces opportunités à un public qui aujourd’hui n’y a pas accès. Mais aujourd’hui en France, rien de significatif n’a été mis en œuvre à notre connaissance. Et les agents immobiliers ne sont pas près d’intervenir sur des ventes de logements à des particuliers sous forme de token.