Depuis le 1er janvier 2022, toutes les demandes d’autorisation d’urbanisme peuvent être adressées à l’administration par voie électronique. Plus besoin de consulter les horaires d’ouverture au public de la mairie et de faire chauffer la photocopieuse pour déposer un projet de travaux ! Il était temps car avec la crise sanitaire, les périodes de confinement puis les obligations d’isolement des cas positifs ou des cas contacts, les deux années écoulées ont été particulièrement délicates pour les services administratifs en charge de l’accueil et de l’examen des demandes d’autorisation d’urbanisme.
La bascule dans l’ère de la digitalisation de l’urbanisme réglementaire n’en est que plus appréciée. Elle était pourtant à l’ordre du jour depuis longtemps. Une ordonnance de 2014 – précisément l’ordonnance n° 2014-1330 du 6 novembre 2014 – avait déjà instauré au profit des usagers un droit de saisir l’administration par voie électronique (Saisine par Voie Électronique = SVE). Ce droit est reconnu d’une façon absolue à l’article L. 112-8 du Code des relations entre public et l’administration. Cependant, bien que consacré dès 2014, la mise en œuvre de ce droit a connu plusieurs dérogations justifiées par la technicité ou la complexité de certains services publics. L’urbanisme réglementaire a fait partie des secteurs d’activité administratifs bénéficiant d’un recul de l’entrée en vigueur du dispositif.
C’est désormais terminé. En effet, grâce au décret n° 2021-981 du 23 juillet 2021 portant diverses mesures relatives aux échanges électroniques en matière de formalité d’urbanisme, le droit à la SVE déploie tous ses effets depuis le 1er janvier dernier en urbanisme. Cette innovation s’inscrit dans le cadre de la démarche «Action publique en 2022» qui a pour objectif d’améliorer la qualité des services publics et de moderniser l’action publique. Elle devrait, espérons-le, offrir plus de transparence sur l’état d’avancement de chaque dossier aux différentes étapes de l’instruction de la demande.
Quelles sont les communes concernées ?
La SVE ne change pas l’interlocuteur mais seulement la manière de le saisir. Les communes restent le seul «guichet unique » de dépôt des formalités d’urbanisme (art. R. 423-1 du Code de l’urbanisme). Toutes sont concernées sans exception par la SVE. Quelle que soit leur taille, elles seront tenues de recevoir les demandes d’autorisation d’urbanisme déposées par voie électronique, si le pétitionnaire fait le choix de ce procédé. Certaines avaient d’ailleurs déjà franchi le cap. À l’image de la ville de Paris, un petit nombre de communes françaises avait expérimenté la dématérialisation bien avant le 1er janvier 2022 dans le cadre d’un dispositif expérimental.
Deux observations s’imposent. En premier lieu, une commune n’est pas en mesure de refuser à un administré ce droit à la SVE au motif qu’elle n’est pas prête, pas assez équipée ou que sa couverture numérique n’est pas de qualité. En second lieu, la reconnaissance de ce droit à la SVE ne signifie pas que les dépôts traditionnels, physiques ou postaux, sont à l’avenir interdits. Tout administré conserve le droit de ne pas recourir à la SVE, laquelle n’est que facultative et absolument pas obligatoire. Les usagers conservent donc la possibilité de saisir l’administration par voie postale ou, le cas échéant, de se déplacer physiquement pour déposer une demande. En retour, l’administration n’est pas tenue de répondre à une saisine par voie électronique par la même voie (art. L. 112- 14 du Code des relations entre le public et l’administration).
Quelles sont les formalités concernées ?
Le champ d’application de la dématérialisation englobe toutes les autorisations d’urbanisme : permis de construire (PC) et permis de construire pour une maison individuelle (PCMI), permis d’aménager (PA), permis de démolir (PD), déclarations préalables de travaux et déclarations préalables de division. Les demandes d’informations sont aussi concernées. Ainsi, les demandes de certificats d’urbanisme d’information (CUa) et de certificats d’urbanisme opérationnels (CUb) peuvent être elles aussi adressées par voie électronique.
Il convient de remarquer que la purge du droit de préemption urbain est depuis longtemps susceptible d’être opérée par voie électronique. En effet, depuis l’entrée en vigueur du décret n° 2012-489 du 13 avril 2012, les propriétaires souhaitant céder leurs biens dans des zones où peut s’exercer le droit de préemption peuvent fournir leurs déclarations d’intention d’aliéner par voie électronique (art. R. 213-5 alinéa dernier du Code de l’urbanisme).
Le recours à la SVE ne modifie aucunement la durée des délais d’instruction des demandes d’autorisation, laquelle demeure identique dans tous les cas. On rappellera à ce titre que le délai d’instruction est de :
- 1 mois pour les DP et les demandes de CUa ;
- 2 mois pour les DIA, les demandes de PCMI, de PD et de CUb ;
- 3 mois pour les demandes de PA et de PC. Attention les formulaires, eux, ont bien changé ! Le ministère a réédité en effet quasiment tous les formulaires pour les moderniser et accompagner cette bascule numérique.
Le tableau ci-dessus référence les numéros de cerfa des formulaires modernisés. Quant à la preuve du dépôt, elle s’opérera en cas de SVE non pas par l’envoi du traditionnel récépissé de dépôt mais par l’envoi d’un accusé de réception électronique (ARE). Tout envoi électronique fait donc l’objet d’un accusé de réception. L’ARE peut être délivré de manière instantanée ou différée. Dans le second cas, l’administration dispose d’un délai maximum de 10 jours ouvrés pour le retourner (art. R. 112-11-2 du Code des relations entre le public et l’administration). Dans l’attente de la délivrance de l’ARE, elle délivrera un accusé d’enregistrement mentionnant la date de réception de l’envoi. Celui-ci est dénommé « accusé d’envoi électronique » (AEE).
Pour accompagner les demandeurs dans le cadre du dépôt numérique de leurs formalités, le gouvernement a mis en place un service d’assistance disponible sur le site « service-public.fr » : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R52221. Par la suite, toute la chaîne d’instruction du dossier se déroulera de façon dématérialisée. On peut ainsi espérer que les très nombreuses demandes d’autorisation d’urbanisme déposées chaque année (près d’1,5 million) seront fluidifi ées et facilitées, de même que les échanges entre les acteurs concernés, jusqu’à la décision de l’administration.