JDA : D’où vient votre intérêt pour la sphère de l’immobilier ?
Mickaël Nogal : J’ai commencé à m’intéresser aux questions du logement en 2012, en parallèle de mes études en communication à l’ISCOM. Je travaillais alors en tant que collaborateur parlementaire aux côtés du député PS Christophe Borgel, qui a participé à la Loi Alur. J’ai donc découvert le secteur de l’immobilier par le prisme du législatif. Lorsque j’ai à mon tour été élu député en 2017, à l’âge de 26 ans, j’ai voulu m’impliquer sur un dossier qui touchait le quotidien des Français. Or, le logement, c’est à la fois le premier poste de dépenses des Français, et l’une de leurs premières préoccupations.
Mon leitmotiv, c’est d’améliorer la vie des gens et faire en sorte qu’après ce quinquennat, ils vivent mieux dans leur logement. Sur ce sujet, je ne veux laisser personne au bord du chemin. En 2019, le Premier ministre Édouard Philippe et le ministre du logement Julien Denormandie m’ont confié une mission sur les rapports locatifs et le modèle des agences immobilières. C’est à ce moment-là qu’un travail plus étroit avec les agences a commencé.
JDA : Pourquoi avezvous fait de la gestion locative votre cheval de bataille ?
M. N. : Dès le début de ma mission, je me suis rendu compte que les agences immobilières avaient seulement un tiers du marché de la gestion locative et que deux tiers des propriétaires préféraient donc gérer seuls leurs biens, de particulier à particulier. Ce chiffre m’a beaucoup interrogé, je me suis alors intéressé à l’activité d’administration de biens des agences. J’ai passé du temps sur le terrain à consulter les professionnels de l’immobilier. Je les ai parfois bousculés avec mon regard neuf, par exemple sur ce qui est au cœur de ma proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale : la sécurisation totale des propriétaires bailleurs. Aujourd’hui, un mandat de gestion n’entraîne pas une obligation de résultat, mais de moyen. Or, plusieurs études concordantes montrent que 70 % des propriétaires seraient prêts à passer par un professionnel s’ils avaient cette garantie.
JDA : Quelle est, selon vous, la valeur ajoutée des professionnels de l’immobilier ?
M. N. : Il m’a souvent été reproché de défendre l’intermédiation. Pourtant, je suis convaincu que dans l’immobilier, il est bon d’avoir des professionnels qui gèrent des sujets complexes. Il suffit de regarder le nombre de lois qui ont touché à la thématique du logement depuis la Loi SRU en 2000 : elles sont toutes venues modifier les règles dans le parc privé, social, en matière d’accession à la propriété… Les lois de finance ont, à leur tour, questionné les dispositifs fiscaux type PTZ, Pinel, Denormandie… À la fin, il y a une complexité que seuls des professionnels peuvent gérer. Derrière cette complexité, c’est la protection des citoyens qui se joue. Car ces lois sont avant tout là pour protéger les propriétaires et les locataires. Les textes législatifs sont de nature à rassurer l’usager sur le service délivré par les professionnels. La complexité et la professionnalisation sont donc intimement liés.
«Mon leitmotiv, c’est d’améliorer la vie des gens et faire en sorte qu’après mon quinquennat, ils vivent mieux dans leur logement.» Mickaël Nogal
JDA : Quelle est votre vision des agents mandataires ?
M. N. : Je suis étonné de voir que les positions sur les agents mandataires sont différentes d’un syndicat professionnel à l’autre. Je pense que ces divergences mériteraient d’être harmonisées et que la profession parle d’une seule voix. Quoiqu’il en soit, les réseaux de mandataires ont, selon moi, toute leur place dans le paysage immobilier. Ils participent à l’émulation collective et ne sont donc pas incompatibles avec les agences « traditionnelles ». Le seul critère qui entre en ligne de compte, c’est le professionnalisme. Or, ce dernier ne dépend ni du statut, ni même de la carte professionnelle. Pour autant, il faut que leur approche se structure, si les mandataires veulent être mieux reconnus, y compris par leurs propres pairs, il est important qu’ils affichent la même expertise que les titulaires de la carte.
JDA : Qu’attendez-vous des professionnels de l’immobilier dans le cadre de la loi Climat & Résilience ?
M. N. : La rénovation est l’enjeu majeur des prochaines années. Dès aujourd’hui, les agents immobiliers ont un rôle à jouer dans le cadre de la loi Climat & Résilience, qui a pour objectif de lutter contre le dérèglement climatique en réduisant notamment les émissions de gaz à effet de serre. Le bâtiment, à la fois résidentiel et tertiaire, c’est 25 % des émissions de CO2 dans notre pays et 45 % de la consommation d’énergie. Ces prochains mois, les gestionnaires devront donc accompagner les propriétaires dans l’amélioration du parc existant. D’autant que nous prévoyons – et c’est assumé – d’interdire la mise en location des passoires thermiques. Les syndics de copropriété ne seront pas en reste. Dans les copropriétés, la politique de rénovation est différente, les modes de décision sont plus complexes et les règles de majorité diffèrent entre les sujets. Les syndics seront, eux aussi, attendus pour accompagner les copropriétaires.
JDA : Les syndics sont-ils suffisamment formés pour embrasser ces nouveaux enjeux ?
M. N. : Je suis devenu le parrain du Bachelor dispensé à l’IMSI de Toulouse et d’une Licence professionnelle en juriste de copropriété, proposée à l’Université de Toulouse 1. C’est la preuve que le secteur a besoin de formations plus pointues. Le métier de syndic appelle des compétences spécifiques. La matière est tellement complexe qu’il n’est pas possible de s’improviser syndic. Le fait de devenir parrain me permet par ailleurs d’envoyer un message positif aux étudiants qui s’orientent vers ce métier : ils sont certains de trouver un poste à l’issue de leur formation, de toucher une bonne rémunération et d’avoir des perspectives d’évolution. En disant ça, je participe au travail de pédagogie que ces professionnels doivent faire sur leur métier. Car si les syndics renvoient, comme les politiques, une mauvaise image, c’est essentiellement parce qu’on ne connaît pas suffi samment leur métier.
JDA : Le nouveau diagnostic de performance énergétique (DPE) est entré en vigueur le 1er juillet dernier, après une série d’anomalies. Comment expliquez-vous ces couacs ?
M. N. : Même si toutes les parties prenantes ont été écoutées en amont, notamment la FIDI ou la Chambre des Diagnostiqueurs de la FNAIM, il y a effectivement eu quelques couacs dans le lancement du DPE « nouvelle génération ». Ces derniers ont surtout été attribués à des problèmes de coefficients, notamment pour les biens construits avant 1975. Pour autant, ils ont été corrigés rapidement. Les professionnels nous ont très vite avertis qu’il y avait trop de logements qui étaient considérés comme des passoires énergétiques, au regard du scénario que nous avions envisagé. Je rappelle d’ailleurs que les intentions du politique n’étaient pas de fragiliser les propriétaires ou de freiner les investisseurs. On sait qu’un bien rénové se vend mieux et je crois donc beaucoup à la valeur verte d’un bien. La rénovation, au-delà de sa vertu environnementale, est donc aussi un argument économique.
JDA : Avec quels dispositifs allez-vous encourager la rénovation ?
M. N. : Nous avons mis en place un arsenal d’outils pour encourager les propriétaires. Je pense notamment à France Rénov’, le service public dédié à la rénovation qui sera lancé le 1er janvier 2022, mais aussi à l’Accompagnateur Rénov’ qui accompagnera les Français de à Z dans leurs projets de rénovation. Nous proposons également des financements adaptés et revalorisés comme Ma Prime Rénov, dont le budget a doublé pour être porté à 4 000 000 000 d’euros dans le cadre du plan de relance. Pour les ménages les plus modestes, notamment les seniors qui représentent 62 % des propriétaires de passoires thermiques, nous créons le prêt Avance Rénovation. Il permet aux personnes n’ayant pas facilement accès au crédit de compléter l’enveloppe de leur rénovation. L’avantage de ce prêt, c’est que son remboursement se fera au moment d’une mutation, lors d’une vente ou d’une succession. J’aimerais qu’il ne soit pas octroyé en fonction des ressources mais ouvert à l’ensemble des Français afin qu’il constitue un excellent accélérateur.
«Je continuerai de me battre pour faciliter l’accès au logement afin qu’il soit synonyme d’émancipation, non de contrainte», Mickaël Nogal
JDA : Quels chantiers porterez-vous en 2022, à l’aube des élections présidentielles ?
M. N. : Mon objectif est de placer la question du logement au cœur de la campagne présidentielle. Durant le mandat d’Emmanuel Macron, beaucoup de sujets ont été traités et seront poursuivis : le logement d’abord, l’adaptation du logement au vieillissement, la revitalisation des territoires en cœur de ville, la réorganisation du monde HLM… Avec cette dernière, nous avons bousculé les bailleurs sociaux, en leur demandant de compenser l’impact de la baisse des APL, via le dispositif de réduction du loyer de solidarité. En 2022, je serai toutefois attentif à ce que leur modèle économique ne soit pas mis en péril. Enfin, j’aimerais que ma proposition de loi, qui vise à réconcilier propriétaires et locataires, soit portée par Emmanuel Macron pour son prochain mandat. L’un de mes combats concerne le dépôt de garantie, qui crispe les propriétaires comme les locataires et qui mériterait d’être consigné. Je défendrai enfin l’accès au logement afin qu’il ne soit plus synonyme d’obstacle ou de contrainte mais bien de sécurité et d’émancipation.