Dans un marché immobilier très dynamique, la bonne tenue des prix des logements est rassurante pour une banque qui octroie un crédit immobilier, mais aussi un sujet de doute quant à la persistance de la valeur dans le temps. Le risque serait que l’emprunteur, en cas de difficultés de remboursement, ne couvre pas par la revente du bien le montant du capital dû. Cette inconnue est d’autant plus préoccupante si l’emprunteur devait être totalement défaillant et que le bien doive faire l’objet d’une remise sur le marché par voie judiciaire.
La question pourrait être résolue par des garanties complémentaires données à l’origine, mais encore faut-il en disposer quand on est accédant, sans oublier que la protection du consommateur en France privilégie la capacité de remboursement individuelle au détriment de la valeur des garanties. De fait, l’apport personnel permet de sécuriser les dossiers de crédit. Mais comment le définir ? Quelle proportion doit-il avoir ? Comment le constituer et l’optimiser ?
Qu’est ce que l’apport personnel ?
Expliqué simplement, un apport est la quantité d’argent que le candidat à l’achat peut verser en dehors des sommes fournies par le crédit qu’il va contracter. Mais le diable se cache dans les détails et la situation n’est pas toujours aussi simple dans le montage d’un prêt immobilier. Voyons ce que représente le montant de l’achat. Si un bien est affiché à une certaine somme, le total à débourser va bien au-delà. Il faut prévoir des frais inhérents à la transaction : droits de mutation et autres « frais de notaire », frais éventuels d’intermédiaires, travaux possibles, frais de déménagement et frais multiples inhérents au crédit.
Les « faux frais », qui en sont des véritables, peuvent représenter 10 à 15 % du prix affiché. Du coup, l’opération porte-elle sur le montant nominal ou sur le montant total, grevé des frais supplémentaires ? Les modalités du paiement de l’achat sont également importantes. Le paiement fractionné du bien est une situation rare, mais elle existe. Dans un bien ancien, on règle d’ordinaire le prix en une seule fois à la signature de l’acte. Dans l’achat du neuf, le paiement peut s’effectuer en fonction de l’avancement de la construction ou de l’appel de fonds du promoteur.
Les dispositifs d’aides à l’accession à la propriété sont aussi assimilables à de l’apport personnel. Il s’agit de sommes versées, remboursables ou non, sans prise de garantie pouvant contrarier la valeur de la garantie prise ou à prendre par l’établissement prêteur. C’est le cas des prêts Épargne Logement, des prêts Action Logement, des prêts des collectivités territoriales, des prêts des mutuelles d’assurance, des subventions ANAH, etc. Si ces aides sont remboursables, le banquier en tient compte dans le calcul de l’endettement et donc de la capacité de remboursement de l’emprunteur. Il devra les comptabiliser dans l’apport personnel.
Pourquoi est-il si important ?
Un apport personnel a plusieurs vertus, pas seulement pour négocier son dossier de crédit. La première réside dans la confiance qu’il confère aux parties de la transaction. D’abord, à l’égard du banquier qui prête. Puis, pour le professionnel que vous êtes, qui possède un mandat signé par quelqu’un capable de porter son projet à terme. Pour le vendeur aussi, qui juge le sérieux de la proposition. Pour
l’acquéreur enfin, qui peut négocier si l’apport est important et est rassuré pour engager d’autres frais, dans des travaux par exemple. S’agissant du banquier prêteur, l’apport diminue proportionnellement le montant du crédit consenti à l’emprunteur. Quand le profil, en termes d’intérêt commercial, est fort, les banquiers sont plus enclins à accepter de réduire la part d’apport. Avec les critères actuels du Haut Conseil de stabilité financière, l’apport permet de mieux gérer l’optimisation du rapport montant/durée de remboursement afin de respecter les normes d’endettement tolérées, voire de bénéficier de conditions de taux plus avantageuses.
De combien doit être un apport personnel ?
Selon la nature du projet et les périodes de l’histoire du marché du crédit immobilier, il est calculé différemment et son importance varie. Aujourd’hui, la banque considère moins le projet dans sa globalité. Elle attend que l’emprunteur prenne à sa charge les frais accessoires évoqués en début d’article. En demandant un pourcentage d’apport personnel, elle se fie ainsi au montant du prix nominal d’achat, voire au prix d’achat majoré des travaux. De ce fait, le candidat à l’achat qui faisait un rapport entre son apport et le prix d’achat peut voir fondre son pactole des 10-15 % de frais de l’opération, et se voir demander en supplément une partie du nominal de l’opération. C’est souvent déceptif et parfois compliqué car le solde pourrait devenir symbolique.
Sur de l’achat dans l’ancien, il est couramment admis en 2021 qu’un apport puisse couvrir les frais et entre 5 et 15 % du prix d’achat. Cela ne signifie pas qu’un apport moindre engendre forcément un refus de prêt, mais c’est un obstacle supplémentaire dans l’octroi du crédit. Tout dépend du profil de revenus et de patrimoine de l’emprunteur. Le montant de l’apport fluctue aussi en fonction de la nature du projet. Si le bien ancien est de qualité, le financement intégral peut être possible. Si le bien nécessite des travaux de mises aux normes, le banquier préfère que le client réalise un apport, n’étant pas certain qu’il puisse satisfaire aux futures dépenses.
Enfin, la localisation et le caractère atypique du bien incitent à davantage de prudence par le fait que le marché est moins liquide et que les négociations en cas de revente, surtout précipitée, font varier la valeur du logement.
Comment le constituer ?
Soit le montant de l’apport personnel est important et dès lors le prêteur va principalement s’intéresser à l’origine des fonds (en raison des obligations liées à la Lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme) et au taux d’endettement. Soit celui-ci est modeste et le prêteur va vérifier que l’apport provient d’une épargne progressive. Il va rapprocher les charges futures de celles supportées jusqu’ici et valider que l’emprunteur sera en capacité de poursuivre la (re) constitution d’une épargne de précaution.
Pour solliciter les aides et prêts, mieux vaut s’y prendre tôt. Les délais sont souvent plus longs que l’instruction du prêt. La banque aura besoin d’un accord pour construire son offre de prêt.
Se pose aussi l’hypothèse d’un prêt familial ou d’une donation parentale ou familiale. La promesse ou un courrier d’engagement ne suffit plus. Le prêteur demande la plupart du temps à ce que l’opération soit formalisée. Si elle s’en tient encore à l’intention, il faut justifier de l’existence des fonds chez le donateur. Pour sensibiliser les clients aux effets d’une donation, notamment dans une fratrie, rencontrer un notaire est le meilleur conseil qui soit. Pour les prêts familiaux, le banquier analysera cet apport comme un prêt tiers et affectera souvent un remboursement fictif. Le taux d’endettement en sera impacté.
Notons enfin que des solutions innovantes pour l’apport apparaissent, telles que la cagnotte immobilière ou la coparticipation à l’achat (proposée par la Fintech Virgil). Ainsi, la tension sur le marché immobilier avec le niveau de prix inhérent, la pression des autorités de régulation et la concurrence entre acheteurs font réapparaître l’importance de l’apport personnel. Un projet immobilier bien mené est donc un projet bien préparé !