Depuis le 1er juin 2020, par application de l’ordonnance du 30 octobre 2019*, la soumission au régime de la copropriété a été recentrée autour de l’habitation. Ainsi, le régime de la copropriété s’applique désormais à « tout immeuble bâti ou groupe d’immeubles bâtis à usage total ou partiel d’habitation dont la propriété est répartie par lots entre plusieurs personnes » (article 1 – I loi 1965).
La règle de la pluralité des propriétaires
Si les notions d’immeuble bâti ou groupe d’immeubles bâtis et de répartition par lots sont des constantes récurrentes de l’article 1, il peut être intéressant de se pencher plus particulièrement sur les notions qui ont « évolué » au cours du temps : la question de la pluralité de propriétaires et la notion d’usage total ou partiel d’habitation.
Par principe, la copropriété ne peut exister qu’en présence d’au moins deux propriétaires distincts. Incidemment, elle disparaît lorsque ce nombre est ramené à un propriétaire unique. L’ordonnance de 2019 est venue finalement mettre l’accent sur cet élément en réintroduisant dans la loi de 1965, l’article 46-1 qui avait précédemment été abrogé par la loi Alur de 2014. Petit retour en arrière dans le texte fondateur qui réaffirme désormais que « la réunion de tous les lots entre les mains d’un même propriétaire entraîne de plein droit la disparition de la copropriété […] ».
Le caractère partiel ou exclusif de l’habitation
La notion d’usage total ou partiel d’habitation, vient quant à elle recentrer le régime de la copropriété autour du logement : peu importe que certaines typologies de lots soient majoritaires à d’autres, c’est l’usage qui prédomine. Il est donc essentiel de toujours s’attacher aux éléments matériels et objectifs permettant d’attribuer ou non à l’immeuble un caractère partiel ou exclusif d’habitation.
Une fois les différentes caractéristiques de l’article 1 réunies, le régime de la copropriété s’applique. Il s’agit d’un statut d’ordre public. Ainsi, aucune dérogation n’est consentie quand bien même il n’y aurait ni état descriptif de division, ni règlement de copropriété. En d’autres termes, il est parfaitement erroné de penser que la présence ou non d’un règlement de copropriété permet de soumettre un immeuble au régime de la loi de 1965. Dans de telles conditions, il semble parfaitement légitime de vérifier de manière systématique cette réalité notamment en raison des conséquences qu’une telle négligence peut générer (obligation de tenir une assemblée générale, présence d’un syndic, mentions légales sur l’annonce immobilière, diagnostic loi Carrez, documents obligatoires en cas de vente…).
Le renoncement au régime de la copropriété
L’ordonnance de 2019 entrouvre toutefois une voie dérogatoire pour les bâtis « à destination totale autre que d’habitation dont la propriété est répartie par lots entre plusieurs personnes » (article 1, II 1° loi 1965). C’est-à-dire que des immeubles à usage exclusif de bureaux ou de commerce pourront renoncer au régime de la copropriété en adoptant une convention. Celle-ci doit expressément préciser que les parties ont choisi de déroger à la loi de 1965, et mettre en place une organisation dotée de la personnalité morale et suffisamment structurée pour assurer la gestion de leurs éléments et services communs. Notez encore que pour les immeubles déjà soumis à un régime de copropriété, la convention doit être adoptée à l’unanimité en assemblée générale.
Concernant les ensembles immobiliers (article 1, II 2° loi 1965) , la législation reste constante et ceux-ci sont soumis au régime de la copropriété à défaut de convention contraire. La difficulté attachée spécifiquement à ce type de biens est très certainement la manière dont on le définit. Sur ce point un arrêt de la Cour de cassation en date du 26 mars 2020** est venu préciser cette notion dont la caractéristique première est d’être hétérogène.
* Ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis
** Arrêt n°279 du 26 mars 2020 (18-16.117), Cour de cassation, troisième chambre civile