Assistons-nous à une concentration ou à une atomisation de l’industrie immobilière ? Les deux en même temps ! Cette réponse s’explique aisément. Le domaine de l’administration de biens a effectivement poursuivi ce mouvement de concentration forte et de renforcement de la taille critique ; des groupes puissants se sont renforcés ou ont émergé tels Foncia Citya, Nexity. La concentration s’est aussi concrétisée avec les portails d’annonces tels SeLoger et Le Bon Coin qui ont racheté deux de leurs concurrents, respectivement Logic-Immo et A Vendre A Louer. Et plus récemment encore, MeilleursAgents est passé sous le contrôle d’Axel Springer société mère de Seloger.
L’atomisation de la transaction immobilière
Du côté de la transaction immobilière, c’est une toute autre image qui ressort. On peut réellement parler d’atomisation du secteur. Les changements en profondeur de cet écosystème ont d’ailleurs tendance à s’accélérer dans le temps. Dans les années 1960 à 1990, le marché se répartissait entre les particuliers (à 50 %), les agences indépendantes et un seul réseau constitué et en croissance : Orpi. Les années 1990 à 2000 voient l’apparition des réseaux de franchise, avec le plus célèbre d’entre eux et le premier : Century 21. Les années 2000 à 2010 voient naître les réseaux de mandataires. On peut citer IAD, Capifrance, Optihome, Safti. Depuis 2016, un modèle que je qualifierais d’hybride et venant des États Unis, s’installe en France : Keller Williams. N’oublions pas enfin les start-up qui rêvent toutes de « disrupter » le marché ou, pour certaines, de connaître le même succès que la Britannique Purplebricks, agence en ligne à prix réduits .
Des parts du gâteau qui se réduisent
Au regard des chiffres, on mesure bien ce phénomène d’atomisation du marché : les professionnels qui détenaient environ 50 % du marché dans les années 2000 réalisent aujourd’hui 70 % des transactions… mais sont beaucoup plus nombreux, le nombre de collaborateurs (tous statuts confondus) étant estimé à environ 130 000 et le nombre d’agences immobilières à environ 28 000, la plupart du temps d’une taille moyenne à assez petite.
Alors comment expliquer cet engouement pour cette profession ? Y-a-t-il une raison structurelle ou conjoncturelle ? Structurelle, pour partie, si l’on retient l’hypothèse que les agents immobiliers « traditionnels » n’ont pas complètement maîtrisé leur marché et ont laissé des espaces dans lesquels les nouveaux acteurs se sont engouffrés. Ajoutons l’attrait de ces modèles pour les néo-professionnels et la promesse d’honoraires moins élevés pour les particuliers, et nous avons une autre partie de la réponse. Conjoncturelle, sans doute, au vu des records de ventes battus et d’un marché qui s’emballe depuis trois ans environ grâce à la baisse historique des taux d’intérêt.
Se former et créer de la valeur pour le client
Ce mouvement d’atomisation du marché va-t-il se poursuivre longtemps encore ? Gardons-nous d’affirmations péremptoires, mais rappelons que nos métiers sont complexes et techniques. Rappelons également que, dans une situation de très forte concurrence, les critères majeurs restent la compétence (donc la formation) et la capacité à créer de la valeur pour son client. Et qu’après des années records (le million de transactions est dépassé), l’offre immobilière se raréfie, entraînant une inflation qui pourrait, à terme, bloquer le marché .
Dans ces conditions le statu quo ne pourrait perdurer et certains acteurs pourraient souffrir voire disparaître. Les autres devront se réinventer et faire preuve d’agilité. Mais c’est la loi du marché… et le seul arbitre demeure le client !