La reconnaissance des titres professionnels et toutes opérations visant à les promouvoir sont des étapes importantes, mais pour être pleinement efficaces elles doivent s’accompagner d’une évolution des pratiques professionnelles. Le respect des obligations légales peut alors être un outil pour prouver votre professionnalisme et gagner la confiance des clients.
Je vous propose de prendre une contrainte juridique et d’en faire un outil au service de votre professionnalisme.
La contrainte juridique
L’article L 561-5 du Code monétaire et financier impose l’obligation d’identification et de vérification de l’identité du client. Les articles R561-5 et R561-5-1 du même Code indiquent les mentions à vérifier pour les personnes physiques et les sociétés. Cette obligation légale s’inscrit dans le cadre de la réglementation dite Tracfin qui lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
En 2018, 70 % des sanctions prononcées par la Commission Nationale des Sanctions concernaient des agents immobiliers et 16 % des manquements au défaut d’identification et de vérification de l’identité du client (Source Journal de l’Agence, entretien du 25 septembre 2019 avec Francis Lamy, conseiller d’État et président de la Commission Nationale des Sanctions).
Rappelons que la Commission peut prononcer des sanctions allant jusqu’à l’interdiction d’exercer ou au retrait de la carte professionnelle (L561-40 du Code monétaire et financier). Il ressort des décisions publiées (economie.gouv.fr/commission- nationale-sanctions/decisionscns) que toutes les agences immobilières sont contrôlées indépendamment de leurs tailles ou de la typologie des biens vendus (immobilier de luxe ou non).
Le plus souvent, pour une première sanction, les interdictions temporaires d’exercer prononcées à l’encontre de la société et du dirigeant le sont avec sursis. Mais si dans les cinq ans qui suivent, la personne sanctionnée commet une infraction ou une faute entraînant le prononcé d’une nouvelle sanction, celle-ci entraîne, sauf décision motivée, l’exécution de la première sanction sans confusion possible avec la seconde.
Enfin, un durcissement des sanctions est annoncé ainsi que des publications judiciaires nominatives effectuées dans deux journaux dont un local (cf. article précité).
Si le respect de la réglementation dite Tracfin ne peut se résumer à l’identification et la vérification de l’identité de votre interlocuteur, elles en constituent cependant la première étape nécessaire à respecter. Ainsi pour une personne physique, les professionnels de l’immobilier doivent demander une pièce d’identité en cours de validité comportant une photo. Alors comment faire de cette contrainte juridique un outil vous permettant de vous positionner en tant que professionnel ?
Se positionner en tant que professionnel
Demander à l’acquéreur et au vendeur, dés le début de la relation commerciale une pièce d’identité, est perçu, dans le contexte très concurrentiel de la vente immobilière, comme un frein commercial. Alors comment faire de cette contrainte légale un avantage ?
A – La pièce d’identité de l’acquéreur à la visite
Pour avoir la pièce d’identité de l’acquéreur lors d’une visite, encore faut-il la lui demander et le faire sans s’excuser : Vous faites rentrer au domicile de votre client un tiers : c’est une attitude professionnelle que de vérifier son identité.
J’entends souvent « si l’acquéreur me demande si je n’ai pas confiance en lui, que dois-je lui répondre ? » Vous lui répondrez que la confiance n’exclut pas le contrôle. À l’occasion d’une formation, je faisais face à des réticences sur la demande de pièce d’identité de l’acquéreur : « Ce n’est pas possible », « les autres ne le font pas », « on n’a pas le droit ». C’est alors que deux participants d’une même agence sont intervenus pour dire qu’ils le font depuis dix ans sans que cela pose de difficultés. Je leur ai demandé pourquoi ils le faisaient. La réponse était simple : une maison, qu’ils avaient à la vente avait été cambriolée après des visites, et la police leur avait demander les pièces d’identité des candidats acquéreurs, pièces qu’ils n’avaient pas pu fournir.
Marche à suivre pour demander une pièce d’identité à un acquéreur avant une visite :
- À la prise de rendez-vous, lui demander de prendre une pièce d’identité pour le jour de la visite. À ce stade, il n’y a pas d’explications particulières à donner, car, comme vu précédemment, c’est normal.
- Si l’acquéreur s’en étonne et vous dit que vous êtes le seul à le faire, vous lui expliquerez que c’est la politique de l’agence et que c’est normal, pour des raisons de sécurité, de vérifier l’identité des personnes qui visitent.
- Si l’acquéreur s’en étonne toujours mettez-le à la place du vendeur : et si c’était lui le vendeur, il n’apprécierait pas que l’on fasse entrer chez lui des personnes sans savoir qui elles sont… et il aurait raison.
Le jour de la visite, prenez une photo ou un scan de la pièce d’identité et imprimez- la pour la conserver.
B – La pièce d’identité du vendeur à la prise de mandat
La vérification de l’identité du vendeur, même si elle pose moins de difficultés que pour celle de l’acheteur, n’est pas toujours effectuée lors de la prise de mandat.
Pourtant, outre, l’obligation Tracfin, vérifier l’identité d’un vendeur, c’est également gagner en efficacité commerciale : en vérifiant le titre de propriété du bien et l’identité de chacun de vos interlocuteurs, vous vous assurez toutes les parties prenantes sont d’accord pour vendre.
Marche à suivre pour demander une pièce d’identité à un vendeur lors de la prise de mandat :
- À la prise de rendez-vous, demandez-la lui avec le titre de propriété.
- Si le vendeur s’en étonne, expliquez-lui que ce ne serait pas sérieux de votre part de prendre un bien à la vente sans vous assurer qu’il en est bien le propriétaire.
- Expliquez-lui également que vous avez la même démarche avec les candidats acquéreurs et que vous leur demandez une pièce d’identité avant chaque visite.
Ainsi en demandant les pièces d’identité, vous vous positionnez en tant que professionnel à l’égard des clients et respectez l’une de vos obligations Tracf n.