JDA : Votre démarche de promouvoir un insigne de la profession s’inscrit-elle dans la continuité de la reconnaissance du titre d’agent immobilier ?
Jean-Marc Torrollion : Exactement. Après la reconnaissance du titre, il nous fallait absolument un instrument de clarification. Ordonnances sur la copropriété, rapport Nogal, CNTGI, lutte antiblanchiment, Tracfin… les contraintes législatives et réglementaires qui pèsent sur nos professions sont de plus en plus lourdes. Nous sommes considérés par les pouvoirs publics comme des commerçants mais quasiment aussi comme des auxiliaires de services publics. De fait, nous avons un nouveau défi : garder notre essence libérale pour développer nos entreprises tout en y associant un insigne d’aptitude pour faire briller les lettres de noblesses de notre métier et augmenter la valeur ajoutée. L’identité dont nous disposons d’un point de vue réglementaire est désormais symbolisée par un emblème. Nous achevons la conquête de notre identité professionnelle
JDA : À qui est destiné cet insigne ?
J.-M. T. : Il est destiné aux titulaires de la carte professionnelle d’agent immobilier, d’administrateur de biens ou de syndic de copropriété, trois activités qui ont la particularité d’être régies par la loi Hoguet. Ainsi, dans les métiers de transaction, les agents commerciaux, qu’ils exercent dans une agence immobilière ou dans un réseau de mandataires, ne peuvent plus se revendiquer agent immobilier. Ils doivent se présenter en tant qu’agent commercial immobilier, négociateur, conseiller ou consultant.
JDA : Est-il obligatoire ?
J.-M. T. : Réglementairement, nous attendons qu’un arrêté ou un décret puisse être pris, officialisant le fait que Vesta soit l’unique insigne d’aptitude affichable par les titulaires de cartes professionnelles uniques, et que nous puissions dès lors le faire protéger par la loi.
JDA : Concrètement, c’est un logo en plus que les agences vont devoir poser sur leurs vitrines…
J.-M. T. : Pas du tout. C’est un symbole qui n’interfère en aucun cas avec l’enseigne commerciale, l’appartenance à un réseau ou à un syndicat ; un peu comme pour les notaires, les huissiers, les médecins ou les pharmaciens. C’est surtout un signe d’appartenance à une profession désormais reconnue par la loi.
JDA : Qu’est-ce que cela change concrètement pour le client ?
J.-M. T. : L’insigne est un symbole d’aptitude, de respect de la réglementation, de réassurance du consommateur, pas forcément de professionnalisme. Lorsque tout se passe bien, lorsque le professionnalisme irrigue toute la chaîne, l’insigne ne change rien. Mais en cas de réclamation, d’enjeu de responsabilité ou encore de besoin de réassurance, le consommateur doit savoir que c’est au titulaire de la carte symbolisée par son insigne qu’il doit s’adresser. C’est pour le consommateur, le symbole visible que nous sommes une profession réglementée, ce qu’il ignore totalement.
JDA : Qui est le personnage représenté sur l’insigne ?
J.-M. T. : Il s’agit de Vesta, figure de la Rome antique. Déesse du foyer et de la maison, elle porte le feu sacré qui réchauffe et éclaire les foyers, et la lance qui en symbolise sa défense. Éclairer et défendre, c’est l’obligation de notre profession qui se doit de protéger les intérêts de ses clients. Pour asseoir le caractère solennel de cet insigne, nous avons fait le choix d’un sceau avec une maxime en latin « Lucere Defendere ».
Les professionnels de l’immobilier doivent défendre le règlement de copropriété, les intérêts des propriétaires, la demande de logement des locataires ou encore la sécurité juridique du bail commercial. Ils doivent aussi éclairer sur la tendance du marché, la valeur la plus juste d’un bien, la réglementation juridique ou technique, les démarches administratives…
JDA : Puiser dans la mythologie permet aussi d’inscrire dans le temps l’histoire de vos professions…
J.-M. T. : Oui. L’immobilier est un métier qui ne date pas d’hier. Si la plus ancienne agence immobilière de Paris a été créée en 1818 par Alexander Arthur, il ne faut oublier qu’à Babylone, en Perse ou en Égypte antique, on a retrouvé traces d’opérations d’intermédiation immobilière telle qu’elles sont pratiquées de nos jours. Usus, fructus, abusus… il ne faut pas oublier non plus que le droit de propriété immobilière nous as été amenée par les Romains.
JDA : Comment a évolué le métier d’agent immobilier au fil du temps ?
J.-M. T. : Sous la noblesse, les grandes familles avaient leur régisseur. La Révolution française a démocratisé l’activité d’entremise. Au XIXe siècle, les premiers agents immobiliers administrateurs de biens avaient la gestion des biens particuliers des grandes fortunes françaises. On parlait alors d’agent d’affaires, un terme qui a existé globalement jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, puis a dévié sur la notion d’administrateur de biens, de syndic et d’agent immobilier. C’est dans cet environnement qu’est née la Fnaim en 1946, et qu’une réglementation, la loi Hoguet, est arrivée en 1970. En 2020, on fête un demi-siècle de la loi Hoguet. En un demi-siècle, nos parts de marchés en transactions sont passées de 28 à 70 %. Il était naturel de nous donner cet insigne qui récompense tous les efforts que nous avons pu faire pendant ces cinquante ans pour nous former, accompagner le Français, structurer un marché, faire évoluer la législation sur le logement.
JDA : Faut-il dépoussiérer la loi Hoguet ?
J.-M. T. : Où voyez-vous de la poussière ? La réglementation n’a empêché aucune innovation : ni les réseaux de mandataires d’exister, ni certaines plateformes. Ceux qui veulent revoir la loi Hoguet, veulent de facto Uberiser chaque séquence de notre métier. Et en réalité derrière, c’est un affaiblissement du service qui est visé et un renchérissement du coût. Je défends le fait que nous soyons rémunérés sur une prestation globale que si on réussit. C’est ça, la noblesse de l’entremise ! Notre service ne coûte rien au consommateur tant que le service n’a pas été rendu, nous avons une obligation de résultat. Ceux qui veulent transformer notre métier en obligation de moyens n’ont pas réfléchi.
JDA : Où en est le rapprochement avec l’UNIS ?
J.-M. T. : Notre philosophie générale est simple : ensemble, on plus fort. Nous avons besoin de ressources humaines pour être présent en région et nationalement. La concentration de la profession pousse les syndicats à bouger. Je ne me résous pas à ce que demain nous ayons un émiettement de la représentation parce nous ne réussirait pas ce rapprochement. Pour l’instant, le rapprochement se jour au niveau des territoires. Nous allons présenter le projet dans toutes les régions de France. J’aimerai que grandes lignes soient fixées fin juin.
JDA : Comment se porte la FNAIM ?
J.-M. T. : Nous sommes sur une très bonne dynamique, avec des adhérents entreprenants. En 2019, pour la première fois depuis longtemps, nous avons gagné 200 adhérents. Nous comptons 6849 entreprises cotisantes pour 9000 points de vente environ et 4milliard d’euros de chiffre d’affaires.
JDA : Quel est le coût de l’adhésion à la FNAIM ?
J.-M. T. : Le tarif est de 947 euros les 2 premières années. Ensuite, la cotisation moyenne tourne autour de 1700 euros, mais tout dépend du chiffre d’affaires.