La FPI conteste le raisonnement de la Cour des Comptes sur dispositif Pinel

La FPI, regroupant les promoteurs immobiliers en logement et en immobilier d’entreprise, a pris connaissance du rapport publié par le Cour des comptes sur les dépenses fiscales en matière de logement. Elle partage ses critiques sur le pilotage, mais conteste son raisonnement sur le dispositif Pinel.

La FPI partage les constats de la Cour sur les faiblesses du pilotage et du suivi par l’Etat des dépenses fiscales pour le logement, et déplore avec elle le manque de données tant sur les investisseurs que sur les locataires, et l’absence de mesure économique de leur effet incitatif. C’est l’Etat qui dispose des données nécessaires pour ce suivi, ou qui peut facilement s’en donner les moyens à l’ère de la digitalisation et du big data ; c’est également à lui qu’il appartient de cibler des contrôles s’il le juge opportun. Pour les professionnels, la transparence et l’évaluation sont parfaitement légitimes : à l’Etat de s’organiser en conséquence.

La Cour se trompe de diagnostic sur le Pinel

Il est d’abord paradoxal pour la Cour de critiquer l’absence de données sur le Pinel tout en formulant un diagnostic très affirmatif sur son zonage, ses loyers de sortie ou ses volumes de production.

L’affirmation selon laquelle les soutiens de l’investissement locatif « n’ont pas permis une offre locative privée dans les zones en tension avec effet sur la modération des loyers » contraste avec les résultats objectifs du Pinel : 50 à 60 000 logements neufs mis sur le marché locatif chaque année, en Ile de France et dans les grandes métropoles régionales, à loyers intermédiaires et sous plafonds de ressources. De ce point de vue, c’est une dépense fiscale efficace – a fortiori si on considère les recettes supplémentaires qu’elle induit (TVA, IS, fiscalité foncière, cotisations sociales etc.).

Cette différence de point de vue tient pour partie à l’ancienneté des constats de la Cour, qui ne mettent pas assez en lumière l’évolution vertueuse de l’investissement locatif depuis plusieurs années : forte réduction des plafonds de loyers, recentrage géographique, baisse du taux de réduction d’impôt etc.

Le rapport de la Cour est en outre biaisé dans sa comparaison entre le coût pour les finances publiques d’un logement Pinel et d’un logement social, car il le rapporte à la durée de l’engagement de location. Or la comparaison n’a pas de sens entre un organisme HLM, financé par des prêts de très long terme sur Livret A garantis par les collectivités locales, et un particulier : ce dernier ne peut pas s’engager sur 40 ou 50 ans !

Enfin, la Cour présente le soutien de l’investissement locatif comme bénéficiant d’abord aux plus aisés. C’est discutable à deux égards : les investisseurs en Pinel ne sont pas majoritairement les ménages les plus aisés (le rapport de la Cour montre lui-même que le revenu des trois quarts des investisseurs était inférieur à 70 000 euros en 2013) ; la location d’un logement intermédiaire Pinel libère un logement pour un ménage plus modeste et, en cascade, facilite les parcours résidentiels.

Des recommandations porteuses de risques

La Cour recommande de supprimer les dépenses fiscales dont l’efficacité n’est pas démontrée. Cela revient à considérer que la meilleure façon de prouver l’efficacité d’une mesure, c’est de la supprimer puis de mesurer les conséquences. Une véritable évaluation préalable serait plus adéquate.

La Cour recommande également de renoncer aux dispositifs dont l’administration n’est pas en mesure de contrôler effectivement les contreparties (ici, respect des plafonds de loyers et de ressources). Là encore, c’est faire peser sur les acteurs économiques les conséquences des carences de l’administration. Il serait plus pertinent de réinterroger ces contreparties pour les rendre réellement opérantes et contrôlables.

La Cour ne s’interroge pas sur les raisons de la continuité du soutien fiscal de l’Etat à l’investissement locatif des particuliers depuis 1984 : la désaffection durable des investisseurs institutionnels et la faiblesse de la rentabilité de l’investissement locatif sous l’effet d’une fiscalité écrasante. L’aide fiscale aux particuliers n’est que la conséquence de ces dysfonctionnements du marché, qui restent sans réponse de la part de l’Etat. Pour la Cour, le soutien fiscal des particuliers est un problème ; pour les promoteurs, c’est une solution aujourd’hui inévitable.

Le Pinel est un outil de production de logements neufs en zone tendue. Il n’existe pas d’alternative, à ce jour, pour y développer le parc privé abordable dont nous avons besoin.

Proposer sa suppression, sans imaginer d’alternative, c’est mettre en risque à très court terme la construction de dizaines de milliers de logements : rappelons que le simple rabotage de la réduction d’impôt Scellier, pour des raisons déjà budgétaires, a fait perdre 30 000 logements neufs entre 2011 et 2012 (soit 1 Md€ de recettes rien qu’en TVA). Enfin, la Cour omet de rappeler la très grande imbrication des marchés : les programmes neufs sont de plus en plus mixtes et comportent du locatif privé, mais aussi de l’accession à la propriété et du logement social. La suppression du Pinel aurait un effet domino sur toute la production neuve.

Pour Alexandra François Cuxac, Présidente de la FPI France, « La demande de la Cour de plus de pilotage, de transparence et de contrôle est légitime, et la FPI la soutient. En revanche, son diagnostic et ses propositions sur le Pinel passent à côté du vrai débat : comment produire autrement du logement neuf abordable à grande échelle pour accueillir les classes moyennes dans les zones tendues? Pour cela, il faudrait faire baisser les coûts de production, restaurer la rentabilité et l’attractivité de l’investissement locatif et remobiliser les institutionnels : en attendant, il n’y a pas d’alternative au Pinel. Il peut toujours être amélioré, comme il l’a déjà été, mais le supprimer, c’est basculer dans l’inconnu. Pilotage, oui, suppression, non ».

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