Entre les deux, c’est parfois « Je t’aime… moi non plus ». Concurrents de toujours, les agents immobiliers et les promoteurs multiplient pourtant les collaborations ces dernières années, à l’abri des regards de leurs directions respectives. « Je ne travaille qu’avec des agents immobiliers que je connais depuis longtemps et avec lesquels j’ai des relations quasi amicales », confie Éric Brico, président des métiers promoteurs-rénovateurs au sein de l’Union des syndicats de l’immobilier (Unis). Un couple où c’est le promoteur qui vient chercher l’agent immobilier afin que ce dernier lui fournisse différentes prestations : « Les petites agences sont sollicitées pour apporter du foncier. Si un terrain à bâtir est en vente ou qu’une maison avec un grand jardin vient d’être mise sur le marché et dont l’emprise foncière peut intéresser un promoteur, les agents lui feront remonter l’information », indique Henri Brahy, président de HB Conseil.
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Avec à la clé pour les agents immobiliers : une belle commission pouvant atteindre les 2 à 4 % du prix de vente du terrain. Bien plus que ce qu’ils pourraient obtenir lors d’une transaction traditionnelle. Cela suppose toutefois de la part de l’agence concernée une grande attention à l’évolution du plan d’urbanisme local, à la formation de l’ensemble des collaborateurs, sans compter les process à mettre en place en interne comme la création de mailing lists ou les relances téléphoniques régulières. Mais le rôle des agents immobiliers va plus loin, comme le souligne Jean Marc Torrollion, président de la Fnaim : « Nous sommes consultés sur la valeur locative des biens sur le marché. Cela va permettre au promoteur de fixer sa grille de prix. Il n’est pas rare qu’il nous demande également notre avis sur les typologies de biens à construire afin d’adapter l’offre future à la demande déjà existante.»
Coup de pouce sur les commercialisations
Reste que le phénomène demeure marginal. La Fnaim estime à ce jour que 21 % des logements neufs produits en France seraient vendus par des agents
Les « artistes » de la gestion d’immeuble
Autre point sur lequel les promoteurs font appel aux professionnels de l’ancien : la gestion des immeubles qu’ils produisent. Une fois le programme immobilier livré, le promoteur choisit un syndic chargé d’administrer le bâtiment. Il sera ensuite mis en concurrence avec d’autres lors de la première assemblée générale des copropriétaires. Foncia travaille depuis longtemps avec de nombreux promoteurs sur ce sujet via des conventions : Nous sommes un peu le service après-vente des promoteurs. C’est vers nous que les occupants se tourneront s’ils réalisent, après coup, qu’il existe des malfaçons dans leur logement et veulent faire jouer leur garantie dommage ouvrage, souligne Jean-Louis Vesperini, président de la région Ile-de-France Foncia. Nous délivrons en plus un service de garantie des impayés de loyers ainsi qu’un service de garantie d’occupation aux investisseurs », ajoute-t-il.
Nexity, promoteur à la triple casquette
Les organismes comme Foncia, la Fnaim, l’Unis et tous les agents immobiliers qui possèdent une activité de syndic sont consultés par les promoteurs, notamment sur l’élaboration et la conformité du règlement de copropriété. Chez Bouygues Immobilier, il est d’usage de tourner régulièrement avec les différents réseaux. Certains professionnels de la construction optent, eux, pour un modèle moins collaboratif. C’est le cas de Nexity qui fait rarement appel à des agents immobiliers extérieurs : « Depuis dix ans, Nexity a intégré son propre réseau d’agences immobilières», indique Cécile Baudoux, directrice de la région Alpes-Centre-Est SIP pour Nexity. Déjà, plus de 200 agences se déploient sur l’ensemble du territoire. « Nos agents ont accès à l’ensemble des biens neufs que nous proposons», précise-t-elle. Idem pour l’activité de syndic et de gestionnaire d’immeuble. La firme souhaite ainsi conserver l’ensemble de ses clients dans l’univers Nexity en lui proposant le plus de services possibles.
Des liens encore peu évidents
Si les rapports entre agents immobiliers et promoteurs sont donc nombreux, il serait encore possible, selon les professionnels des deux secteurs, de les développer davantage. Tout d’abord, en misant sur le numérique qui aujourd’hui facilite le dialogue entre les deux professions grâce à l’échange de données via des CRM commun. Quartus Résidentiel ne s’y trompe pas, qui vient de lancer, en septembre dernier, sa plateforme Place Quartus, à destination des agents immobiliers avec lesquels il collabore. Ces derniers ont ainsi accès à l’ensemble des informations nécessaires pour présenter un produit à des clients, du prix de vente à la maquette 3D du bien. Au sein des fédérations immobilières, certains militent pour la création de chartes, comme à l’Unis, qui
général de Quartus Résidentiel. Mais attention, « la prospection foncière est intéressante pour le chiffre d’affaires des agents mais il faut rappeler que, même si la commission est plus conséquente, elle n’arrivera qu’une fois le permis de construire délivré au promoteur. Or, cette étape peut être longue, ce qui explique pourquoi les agents immobiliers ne se battent pas toujours pour remonter des informations sur du foncier constructible », rappelle le président de HB Conseil Henri Brahy.
Dans l’attente du BIM et du carnet numérique
D’autres, comme Foncia, attendent avec impatience l’arrivée du BIM (Building Information Modeling ou modélisation des données du bâtiment) et du carnet numérique du logement dans les immeubles, afin de faciliter la gestion du bâtiment et gagner en efficacité. Mais, tous en sont persuadés, le couple agent immobilier/promoteur à encore de beaux jours devant lui.