Tout s’est passé depuis plus de cinquante ans comme si la copropriété était sereine. Elle a d’abord été un statut, venu clarifier des relations complexes et mal stabilisées entre des parties prenantes malgré elles associées au même destin, auxquelles il fallait des règles du jeu. Elle s’est vite senti un microcosme, avec ses codes et sa culture. Un petit monde en quelque sorte, que l’on a cru protéger de tout ce qui se passait alentour, : évolutions économiques ou ruptures sociologiques. Travelling avant : l’urbanisation a révélé des zones malades où la copropriété était synonyme de communauté malheureuse. Là encore, la pensée collective, y compris chez les acteurs de l’immobilier : promoteurs, architectes, syndics, associations, a fait comme si ces lieux ne faisaient pas partie de l’univers ordinaire de la copropriété : impossible que les immeubles bien portants, sans dette, sans tracas, soient un jour atteints des mêmes maux.
Il faut dire aussi que ces actions inspirent la pratique ordinaire des syndics, qui marquent désormais une attention accrue à ce phénomène de fragilisation. Un récent article, dans un quotidien du soir, donnait la parole à lʼAssociation des Responsables de Copropriété (ARC) et à l’Agence Nationale pour le Logement (ANAH). Ces deux associations portaient le même regard inquiet sur la perte de solvabilité des copropriétaires et des copropriétés. Il était souligné que les syndics devaient veiller à la maitrise des charges, notamment par la mise en concurrence des prestataires. Si la parole avait été donnée aux gestionnaires professionnels dans cet article, ils auraient pu attester que ce sujet était au centre de leurs préoccupations depuis longtemps. Veiller à un coût de fonctionnement des immeubles qui garantisse à tous les copropriétaires de pouvoir assumer leurs charges est l’obsession des syndics, qui sentent bien depuis plusieurs années combien les ménages peinent de plus en plus à équilibrer leur budget domestique. Au demeurant ce constat conduit à faire de la transition énergétique des immeubles une priorité, pour abaisser les factures et rendre de nouveau solvables les copropriétaires.
On mesure ainsi deux évolutions corollaires : d’une part l’évolution du métier de syndic, qui devient un gestionnaire en patrimoine collectif des ménages, préoccupé de l’adaptation des dépenses et des investissements à la situation des copropriétaires ; d’autre part l’apparition d’un authentique métier dans le métier, avec le développement de compétences dédiées au soin a priori et a posteriori des difficultés des copropriétés fragiles. Les syndics, ceux de lʼUNIS singulièrement, démontrent leur réalisme et leur adaptabilité aux bouleversements de la copropriété.