Cette réglementation a pour objectif de maîtriser sur le territoire de ces communes l’offre de logement en soumettant tout changement d’usage vers un usage autre que de l’habitation tel que bureau, ou commerce à une autorisation préalable de l’administration. Le non-respect de cette réglementation emporte l’application des sanctions pécunières prévues à l’article L651-2 du CCH à savoir, une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 € par local irrégulièrement transformé, ainsi qu’une possible condamnation du propriétaire de revenir à l’usage d’habitation sous astreinte de 1000€ par jour et par mètre carré utile du local irrégulièrement transformé. Passé le délai laissé au propriétaire pour régulariser la situation l’administration peut procéder d’office, aux frais du contrevenant, à l’expulsion des occupants et à l’exécution des travaux nécessaires.
C’est ce que vient de rappeler la Cour de cassation dans un arrêté récent du 12 juillet 2018 (Cass. 3ème civ., n°17-20654), où un propriétaire avait dans le cadre d’un bail de bien meublé permis expressément à son preneur de procéder à des sous-locations temporaires pour une clientèle de passage. Or, la Cour retient que le propriétaire qui permet une telle sous-location ne peut se dégager de sa responsabilité au motif que ce n’est pas lui directement qui contrevient à la réglementation sur l’usage. Pour les juges le propriétaire est donc redevable d’une amende de 20.000€ par application de l’article L651-2 du CCH.
L’agent immobilier doit donc, faire preuve de diligences et doit tout faire pour apporter le meilleur conseil. Il lui revient de mesurer les risques d’une opération comportant un changement d’usage au sens du Code de la construction et de l’habitation.
Nous verrons ici les problèmes soulevés et les démarches à suivre pour mener à bien un dossier de location de biens immobiliers situés dans de telles communes.
Le projet du mandant est-il exempt de risque au titre du L631-7 du CCH ?
Gérer ou administrer des biens immobiliers situés dans des communes où est instauré ce système d’autorisation a pour conséquence directe que l’agent immobilier doit vérifier la faisabilité du projet du propriétaire qui entend mettre en location le bien pour un usage autre que d’habitation.
Cela amène à se poser la question de savoir, ce qu’est un usage autre que d’habitation au sens de la loi, les hypothèses sont nombreuses et de plus en plus fréquentes.
Bien entendu tout ce qui n’est pas de l’habitation et qui est nommé comme tel ne pose pas de difficulté particulière d’appréciation. En effet, louer un logement pour y installer un commerce ou un cabinet médical est nécessairement soumis à une telle autorisation. De même par exemple, vendre un bien à usage d’habitation pour y établir une agence immobilière doit nécessairement passer à minima par une telle autorisation.
En revanche, il est très courant que des propriétaires entendent mettre en location pour de courtes durées le bien qu’il n’occupent pas personnellement et cela de manière répétée.
Une telle situation nécessite une attention particulière du professionnel à qui l’on confie cette gestion car elle emporte l’obligation de recueillir l’autorisation de l’administration, faute de quoi le bail est réputé nul de plein droit puisqu’il s’agit d’exercer en réalité une réelle activité hôtelière. L’agent immobilier qui concourt à une telle opération pourrait voir sa responsabilité mise en cause pour défaut de conseil par son client qui n’est lui-même pas à l’abris d’une action du syndicat des copropriétaires si le bien est situé dans une copropriété. A noter, que tel n’est pas le cas lorsque le bien loué est la résidence principale du loueur (article L631-7-1 A).
Quels sont les biens visés par cette réglementation ?
Aux termes de la loi sont visés par cette règlementation : les logements ainsi que leurs annexes y compris les logements-foyers, logements de gardien, chambres de service, logements de fonction, logements inclus dans un bail commercial, locaux meublés donnés en location dans les conditions de l’article L. 632-1.
Afin de mener à bien un dossier de location, il faudra que l’agent vérifie si le bien qui lui est confié est un bien à usage d’habitation au sens des textes et que sa mise en location (courte durée ou pour un usage commercial, professionnel…) nécessite une telle autorisation. Selon les textes, ce régime s’applique dès lors que le bien en question était affecté à cet usage au 1er janvier 1970. L’agent immobilier ou gestionnaire devra faire en sorte de conserver la preuve que le bien n’était pas à usage d’habitation à cette date ce qui l’autorisait à ne pas solliciter l’administration avant de louer. La preuve se fait par tous moyens comme la conservation d’avis d’imposition professionnels, des anciens baux professionnels voir commerciaux ou encore un extrait d’un annuaire téléphonique professionnel (pages jaunes). Si tel est le cas le bien peut donc être utilisé pour tout usage défini par les parties sans passer par l’autorisation de l’administration ou encore sans apporter de compensation en nature à un changement d’usage autorisé.
Notons, que selon les textes les locaux construits ou ayant fait l’objet de travaux ayant pour conséquence d’en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction ou les travaux ont été autorisés. Dans cette hypothèse, l’usage du bien est celui tel qu’il ressort de l’autorisation de construire délivrée à l’époque.
Le point sur les conditions cumulatives pour qu’une telle procédure s’applique et contraigne les propriétaires
Le bien doit être un local d’habitation situé dans une commune de plus de 200 000 habitants ou situés sur une commune des départements des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.
Aussi, le conseil municipal doit avoir adopté un règlement spécifique fixant les conditions de délivrance de telles autorisations voire les règles relatives à des mesures de compensation en nature.
A noter, que même si le bien confié semble déjà conforme au projet du propriétaire, il convient de vérifier la réalité d’affectation au 1er janvier 1970. En effet, dans une affaire jugée le 22 juin 2017, la Cour de cassation a pu constater la nullité d’un bail professionnel. Alors même qu’il ressortait du dossier que le bien était partiellement affecté à un usage professionnel au 1er janvier 1970, la cour de cassation a pu retenir que le bailleur aurait dû solliciter une autorisation de changement d’usage pour affecter totalement le bien à cet usage (Cass. 3ème civ., 22 juin 2017 n°16-17946).
Quelles sont les diligences à mener ?
Dans l’hypothèse, d’une vente il faudra que les conseils déterminent en amont l’usage du bien qui est vendu au regard du projet de l’acquéreur s’il entend que l’usage futur soit mentionné à l’acte de vente. En effet, si le bien acheté est un bien à usage d’habitation et que l’acquéreur entend l’utiliser à titre de bien professionnel ou encore le mettre en location, il conviendra d’indiquer dans l’acte qu’une telle modification dans l’affectation du bien consiste en un changement d’usage nécessitant une autorisation spécifique de la mairie.
Dans le cadre de la signature d’un bail, rappelons que cette autorisation si elle est nécessaire devra être obtenue avant même la conclusion du contrat (Cass. 3ème civ., 10 juin 2015 n° 14-15961). De même, le professionnel qui rédige et fait signer ce bail en méconnaissance de cette réglementation engage sa responsabilité envers le propriétaire et le preneur (Cass. 1ère civ., 25 janvier 1989 n°87-12838).
Concrètement, si le bien est situé dans une commune ayant institué une telle réglementation, il faudra obtenir une autorisation du maire en remplissant un formulaire dédié.
La demande devra détailler les caractéristiques du bien et de sa future occupation.
Attention, la Mairie peut exiger une compensation au propriétaire qui consiste à rendre à rendre à l’habitation des locaux qui étaient affectés, auparavant, à un autre usage, pour une surface au moins équivalente à celle qu’il souhaite transformer en local commercial ou professionnel (art. L.631-7-1 du CCH). Cela pour éviter un déséquilibre manifeste entre habitat et autre usage sur la commune. Une fois accordée l’autorisation est personnelle donc limitée dans le temps (le temps de l’activité professionnelle) sauf lorsqu’elle était subordonnée à une compensation en nature (inscription au fichier immobilier et transmissible).
Focus sur le permis temporaire de louer du L631-7-1-A « l’autorisation personnelle de faire du Airbnb »
La loi permet aux mêmes communes de prendre une délibération, au sein du conseil municipal ou au sein de l’organe délibérant compétent en matière de PLU, pour permettre aux propriétaires de louer temporairement un bien à usage d’habitation à une clientèle de passage qui n’y élit pas son domicile. Il s’agit d’une autorisation temporaire de changement d’usage qui déroge à la règlementation du L631-7 du Code de la construction et de l’habitation.
Cette délibération fixe les conditions de cette autorisation après pour les métropoles avis des maires d’arrondissements concernés. Cette autorisation temporaire de louer précise : les critères de cette autorisation temporaire, qui peuvent porter sur la durée des contrats de location, sur les caractéristiques physiques du local ainsi que sur sa localisation en fonction notamment des caractéristiques des marchés de locaux d’habitation et de la nécessité de ne pas aggraver la pénurie de logements.