Acquéreur cherche jardin avec maison !

Après l'expérience du confinement et l'adoption du télétravail de plus en plus d’acheteurs vont réorienter leurs recherches sur des maisons avec jardin !

Depuis toujours, les Français cherchent majoritairement à acheter des maisons individuelles et le jardin qui va avec mais, depuis cinq ans, avec le développement du home office, la tendance s’accentue. Ils ont en effet changé leur mode de vie. Beaucoup quittent les centres villes, privilégiant une meilleure qualité de vie. Désormais, lorsqu’ils cherchent à acquérir un logement, ils placent l’accès sur l’extérieur en tête de leurs critères de recherche.

Celui-ci devient aussi important que le quartier, l’emplacement, (ensoleillement, vue, calme…). Pour les Français qui, de plus en plus, optent pour le télétravail une journée par semaine, le jardin ou la terrasse compte autant que le nombre de mètres carrés. Et lorsqu’il (elle) est soigné(e), paysagé(e), c’est souvent l’élément déclencheur lors d’un achat immobilier. Alors, certains acheteurs font volontairement l’impasse sur un de leurs critères, comme un salon de 30 m², pour  avoir en contrepartie un bout de terrain où poser une table et des chaises de jardin. « Beaucoup font des sacrifices, ne serait-ce que pour avoir quelques mètres carrés afin de faire quelques pas, de s’évader un instant, de cultiver un coin de jardin ou de partager en famille les joies des activités de plein air, explique Lionel Labouz, directeur technique clientèle institutionnelle chez Galtier Valuation, expert en biens immobiliers. Et ce, surtout en ville où le besoin d’espace est très prononcé. C’est un espace de liberté, de convivialité, particulièrement prisé des jeunes couples ou des familles.»

Un beau jardin n’a pas de prix

Ce changement, cette envie d’extérieur, Isabelle Larochette, à la tête d’un réseau de mandataires baptisé De la cour  au jardin, davantage axé sur l’art de vivre que sur l’immobilier à proprement parlé, le constate tous les jours, et pas uniquement en milieu urbain : « Cela fait vingt ans que je valorise le charme et les jardins des biens à vendre et, ce qui est sûr, c’est qu’aujourd’hui le jardin a autant d’intérêt que la maison. On assiste à un véritable retour à la vie de famille à la campagne. Du coup, le moindre mètre carré de verdure dans une annonce  immobilière attire l’oeil, éveille l’attention. Même un balcon, aussi petit soit-il, suscite l’intérêt. Une table, une chaise, un livre ou une tasse de thé et cela fait rêver les acheteurs. C’est une bouffée d’air frais. Et les gens en ont besoin :  la vie est compliquée… Les acheteurs aujourd’hui cherchent des lieux de vie et non plus simplement des mètres carrés.»

En centre-ville, beaucoup d’acheteurs acceptent donc des rez-de-chaussée, malgré les nuisances de la rue ou les risques de cambriolage, pour autant qu’il y ait une cour ou une terrasse arborée où poser un transat et respirer. Bon nombre d’entre eux changent de quartier, voire de commune, pour profiter d’un petit extérieur. Certains acheteurs vont encore plus loin : ils n’hésitent pas à privilégier le jardin avant le logement. « Il arrive que les acquéreurs achètent un bien sans le visiter, commente Fabrice Abraham, directeur du réseau Guy Hoquet. En effet, si l’intérieur d’une maison peut être rénové à l’aide de travaux, posséder un beau jardin n’a pas de prix.» Combien faut-il en effet d’années pour faire pousser plantes, arbres ou haies pour se protéger d’un vis-à-vis ?  Sans compter que tout le monde n’a pas la main verte. Et paysager un jardin n’est pas si facile. « Les végétaux ont un coût tant à l’investissement qu’à l’entretien, reprend Lionel Labouz. Mais il n’y a pas que cela… En copropriété, les charges grimpent vite et, parfois, le syndic impose des contraintes aux propriétaires de jardins.»

La deuxième pièce préférée des français

En région parisienne, la tendance est encore plus importante. Le coût de la vie pousse depuis déjà quelques années  les Parisiens hors de la capitale mais, lorsqu’ils passent la Seine, c’est pour avoir un jardin. « Evidemment, en fonction des villes, ils acceptent d’avoir un extérieur plus ou moins grand, explique Florence Chauvel, responsable des Hauts-de-Seine Nord pour Barnes. Plus on s’éloigne de Paris et du métro, plus on peut avoir un grand jardin, de 500 à 1 000 m². D’une manière générale, les acheteurs sont de plus en plus exigeants: ils souhaitent avoir 1/3 du jardin devant la maison, deux passages sur les côtés, les 2/3 restants derrière, si possible exposés sud-ouest et surtout pas de vis-à-vis… C’est vraiment une pièce en plus. » Et c’est même plus que ça, en réalité, le jardin est aujourd’hui la deuxième pièce préférée des Français après la cuisine.

Valoriser les extérieurs pour la vente

Alors lorsqu’elle vend un bien immobilier qui possède un extérieur, Isabelle Larochette a une astuce : elle mise tout sur celui-ci. C’est ce qu’elle met en valeur. Elle aménage d’ailleurs cet espace. C’est ensuite la première photo qu’elle affiche. Et ce, même s’il s’agit d’une petite cour de 15 m². «Pas question de diffuser la photo d’une façade aux volets fermés avec la voiture devant. Non, moi, ce que je montre dans les annonces immobilières, c’est le potentiel de ces extérieurs, comme les essences dans un jardin qui promettent une belle qualité de vie… ».  Récemment, l’une des collaboratrices d’Isabelle Larochette a vendu une maison dans le centre de Bourges dotée d’une cour pavée, ravissante, avec des murs en pierre et une porte médiévale. Celle-ci ne trouvait pas preneur. L’équipe a déblayé la cour, l’a aménagée, a installé une table, des pots en terre, a cherché à créer une ambiance pour donner envie. Résultat : la maison est partie en deux jours.«Nous avons fait de cette cour l’atout majeur de cette maison, située dans la rue piétonne d’une ville, poursuit la chef d’entreprise. Nous avons insisté sur la rareté d’avoir un extérieur en plein centre-ville.»

Si le vert attire l’œil des acheteurs, l’autre bonne nouvelle, c’est qu’il a un impact sur le prix de vente. C’est une vraie valeur ajoutée, donc il permet une surcote. Lionel Labouz estime qu’un bien immobilier sans défaut, avec un espace extérieur, se négocie en moyenne de 15 à 20 % plus cher que le prix du marché. À quelques exceptions près… « Si le jardin est mal configuré, que l’accès se fait par une petite porte, des escaliers, qu’il donne sur la rue… il n’y aura pas de plus-value  par rapport à un 1er étage », modère-t-il. Et pour vendre plus vite, mieux vaut valoriser ces extérieurs… On sait que la première impression lors d’une visite est importante. Le jardin, c’est ce que les acquéreurs potentiels voient en premier. L’extérieur doit donc être soigné. En résidence principale, l’achat d’un appartement ou d’une maison correspond souvent à un coup de cœur. « Même en présentant à un acheteur le bien qui lui convient en surface, en nombre de chambres, dans le quartier désiré… il ne l’achètera pas pour autant, reprend Fabrice Abraham. L’ultime décision, les 5 % qui manquent, relève du coup de cœur ! Une terrasse ensoleillée ou 2 m² de jardin, par exemple, sont des éléments complètement irrationnels, subjectifs, qui contribuent fortement au coup de cœur !»

Quand on sait qu’un acquéreur visite en moyenne de 10 à 15 biens comparables  avant de se décider, se démarquer est donc essentiel. On vend ainsi plus vite, donc au prix ! Sauf dans certains quartiers, comme à Neuilly-sur- Seine où la rareté de ces produits, très recherchés par des clients au fort pouvoir d’achat, fait grimper les prix. Les appartements avec un extérieur partent parfois en une heure. «Certains clients sont prêts à faire des folies pour acquérir un bien avec jardin ou terrasse, explique Catherine Van Aal, de l’agence Barnes/Neuilly-sur-Seine et Levallois- Perret. Lorsqu’on estime ce type de biens, en réalité, on sait déjà à qui les proposer, on sait que certains acheteurs sont prêts à mettre le prix. Ils sont très réactifs et  achètent à la première visite, donc oui, les prix s’envolent. Récemment, un appartement en rez-de-jardin de 220m² en duplex, avec 5 chambres, en plein cœur de Neuilly, dans un immeuble charmant mais situé sur une grande avenue, avec une façade sur rue et un jardin de 100 m², s’est vendu 2 520 000 euros.»

Les paysagistes les home stageurs du jardin

David Jeannerot Rénet, plantiste en milieu urbain et paysagiste star, abonné aux pages des magazines de déco, a changé d’orientation professionnelle sur le tard pour retrouver ses racines terriennes.

Aujourd’hui, de nombreuses agences immobilières font appel à lui avant une vente. Pour ce créatif, dont le travail s’inspire des jardins ouvriers, aménager un balcon, une terrasse, est un atout évident pour séduire un acheteur. « Le temps va vite, très vite avec les nouvelles technologies, alors, un jardin permet de se ressourcer, explique-t-il. Arroser, retirer les feuilles mortes, ça détend. Les vendeurs ne se rendent pas toujours compte du potentiel de leur extérieur… Or, on n’a pas deux fois la chance de faire une bonne première impression. Lorsqu’un acheteur découvre un jardin en friche, il est affolé par le travail qui l’attend.»

Car le vrai problème est bien souvent là : bien sûr, les acheteurs rêvent tous d’un jardin soigné, d’une terrasse végétalisée, seulement, ils sont perdus, ils n’ont pas forcément le temps de s’en occuper. Et ils ne savent pas comment s’y prendre. « Quand il y a déjà des plantes sur le balcon, ça change tout : celui-ci devient un lieu magique car les plantes sont des éléments vivants… reprend David Jeannerot. Cela a un effet psychologique incroyable. Et naturellement, l’acheteur propose un prix plus élevé car, de lui-même, sans s’en rendre compte, il pense que cet appartement a plus de valeur que si son balcon était vide.» Une fois, le paysagiste a réaménagé un extérieur pour une famille qui voulait vendre et quitter la capitale. Il a fait de leur jardin la campagne à Paris, ce qui les a incités à rester. « Cela a été la plus belle des récompenses », raconte-t-il, ravi.

Contrairement aux cultures nordique et anglo-saxonne, les Français investissent peu dans leurs biens à vendre, qu’il s’agisse d’un paysagiste ou d’un home stageur. Sur les 980 000 biens vendus en 2017, moins de 1% a bénéficié des services de home staging. En revanche, les vendeurs savent que les conditions de présentation de leur logement influent très largement sur la vente et mettent donc la main à la pâte. Aujourd’hui donc, ce qui se fait depuis toujours dans l’immobilier haut de gamme se démocratise. Pour séduire  une  clientèle exigeante, les agences immobilières spécialisées dans les biens de luxe ont toujours conseillé à leurs clients/vendeurs de couper les arbustes, de changer les plantes ou les meubles de jardin, d’ajouter un parasol pour que l’extérieur soit plus attirant, qu’il corresponde mieux à ce que recherchent les acheteurs fortunés.  Dans les biens haut gamme, les extérieurs font toujours partie des critères de recherche,  précise Wanda Demeure, directrice du bureau ColdwellBanker Demeure Prestige. C’est l’un des éléments  prioritaires. C’est une clientèle exigeante qui veut ce qu’il y a de mieux et pour qui le style de vie est très important.» Sur les conseils de leur agent immobilier, les vendeurs de biens avec jardin ou terrasse  désencombrent donc, nettoient, tondent, plantent, cherchent même à créer des ambiances… D’autres choisissent de faire appel à des paysagistes de renom, comme Jean Mus qui travaille beaucoup dans le sud de la France. C’est pour eux l’assurance de  faire une confortable plus-value.

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« Faire le plus simple possible », David Jeannerot, plantiste et jardinier urbain

Pour avoir un beau rendu rapidement, il faut faire le plus simple possible. Trois espèces suffisent et par nombre impair sinon ça fait fouillis. Il suffit de mixer des plantes de petit, moyen et grand calibre et on obtient une vue intéressante. En résumé : il faut que ce soit beau, simple et pédagogique. C’est pour cette raison que je préfère planter des essences endémiques. Par exemple, vous ne me verrez jamais planter un olivier à Paris. Je ne suis pas donneur de leçon mais on ne plante pas d’olivier au nord de la Loire. Cela ne se fait pas. Si on pouvait respecter cette nature-là, ce serait bien.

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Mettre en valeur les éléments différenciant

À défaut de faire appel à un paysagiste, le web permet de valoriser un extérieur. Il suffit pour cela de soigner les photos. Avec un œil de photographe, on peut repérer les éléments dans un jardin, dans une cour ou sur une terrasse à présenter, comme une verrière, un portail, un arbre… autant de détails intéressants qui laissent deviner qu’il y a quelque chose derrière.

«Dans l’immobilier, comme dans tous les domaines d’ailleurs, les meilleures photos sont souvent suggestives,  précise Fabrice Abraham. Il ne sert à rien de tout montrer. Il vaut mieux éveiller la curiosité pour inciter les internautes à aller au-delà de ce qu’ils voient sur leur écran, les encourager à visiter. Si vous lui en montrez trop, la tentation est grande pour l’acquéreur d’éliminer le bien, tandis que s’il prend rendez-vous pour visiter le bien, l’acquéreur potentiel verra peut-être des attraits qu’il n’avait pas perçus sur Internet. Cinq photos pour une annonce sont largement suffisantes !».

Et attention à toutes ces nouvelles technologies, comme le home staging virtuel ou les solutions qui éliminent les éléments parasites, comme le bazar dans une pièce, pour valoriser les photos immobilières, et qui ont finalement tendance à trop embellir la réalité. En découvrant le bien ou le jardin, certains acheteurs sont déçus. Isabelle Larochette est, elle, sans équivoque : « Apprenons à faire de belles photos, s’exclame-t-elle. Tous mes collaborateurs suivent des cours de photo car,  avec de bons conseils, tout le monde peut mettre en avant un poteau, une glycine, un bout de terrasse… Ce n’est pas une question de technique mais de sensibilité », conclut-elle.

« Photographier un jardin, un travail de pro ! », Marc Jelensperger, formateur en photo immobilière

La première photo qui apparaît sur l’annonce doit avoir été prise en extérieur. Celle-ci est forcément lumineuse, colorée : elle a donc un impact indéniable, d’autant qu’elle plaît à un large public puisqu’elle est moins personnelle que les autres photos montrant l’intérieur, plus chargé en meubles et décoration. Pour photographier  un jardin, je recommande un objectif grand angle pour avoir un meilleur rendu de l’ensemble de l’espace. Il faut évidemment tenir compte des conditions météorologiques mais aussi de l’heure de la journée en fonction de  l’orientation de la maison. La façade doit être ensoleillée. Côté prise de vue, cela peut paraître simple, mais l’appareil doit être droit, 90 % des photos de maisons sur le web sont penchées. L’appareil photo a été incliné vers le ciel pour prendre la maison en entier et ce n’est ni beau ni rassurant pour l’acheteur. Ensuite, l’appareil doit être à la bonne hauteur. Contrairement à ce que l’on pense, c’est à 3 m de haut et non pas à 1,70 m : il faut donc un trépied, le déplier et l’utiliser comme une perche, utiliser ensuite le mode retardateur, et le dresser au-dessus de sa tête. Plus on prend de la hauteur, mieux on voit le jardin et plus la maison est droite. Psychologiquement, c’est important. Certaines applications permettent de faire des photos en 360°. C’est aussi une solution pour avoir une belle représentation de l’espace. Enfin, dernier conseil : il est vivement recommandé de retoucher les photos d’extérieur, afin que le ciel soit bien plus bleu, que l’herbe soit plus verte et les zones d’ombre moins sombres !

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Olivia Delage By/BazikPress

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