De retour de vacances ou de voyage, qui ne s’est pas surpris à caractériser une ville ou une région comme si elles étaient des personnes : Paris est « romantique et sophistiquée », New York est « arrogante et cosmopolite », Marseille devient » moderne et extravertie », Dubaï est « grandiose et clinquante », la Bretagne est « accueillante et ouverte », etc. En attribuant des traits de personnalité à des espaces, les gens expriment un certain niveau d’attachement, de sympathie ou de rejet. Et cette perception peut avoir de réels effets sur leur attractivité, donc sur la demande immobilière et sur les prix.
Un « capital de marque » qui fait la différence
Aujourd’hui, les concepts de « marketing territorial » ou de « destination marketing » sont devenus courants ; dans cet esprit, les villes peuvent être considérées comme des marques, c’est-à-dire des noms supposés véhiculer différentes associations avec des traits spécifiques de personnalité. Ils proviennent d’éléments tangibles – architecture, événements, musées, infrastructures – ou plus intangibles – cadre de vie, sympathie des habitants, accueil des commerçants, dynamisme économique – qui émergent à l’évocation du nom de la ville. Le nom de la ville en tant que marque incite à une différenciation avec les autres villes.
La marque porte en elle une certaine valeur en suscitant des associations mentales et des émotions positives. Les actions de communication capitalisent alors ces avantages pour mettre en avant ces atouts et engendrer des comportements bénéfiques. Ces noms de marque sont souvent associés à des symboles forts et différenciants (tour Eiffel de Paris, festival de la BD d’Angoulême, Mucem à Marseille, etc.), véhiculant un « capital de marque ». Le positionnement ainsi affiché tente de transmettre des niveaux d’exigence en termes de qualité, de tradition, d’expertise… et la personnalité perçue est le résultat des actions de toutes les parties prenantes.
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« I Love New York », « Only Lyon » ou « Magnetic Bordeaux », autant de slogans traduisant la personnalité attrayante des villes.
Mesurer la personnalité d’une ville
Des chercheurs en marketing ont comparé neuf villes sur vingt-cinq critères permettant de mesurer la personnalité de la marque ville (gaie, authentique, audacieuse, indépendante, intelligente). Les résultats montrent que les gens structurent leur perception de la personnalité des villes selon cinq grands facteurs : niveau de sincérité perçue, excitation, compétence, sophistication et rudesse. Ainsi, Barcelone et New York apparaissent les villes les plus excitantes et sophistiquées, Paris comme authentique et sincère, alors que Bucarest, Rotterdam ou Londres sont perçues comme plutôt rudes et dures. Mais quel type de personnalité attire le plus les touristes ? Les répondants – des étudiants – déclarent préférer les villes ressenties comme audacieuses, pleines d’imagination et modernes (dimension « Excitation ») et gaies, séduisantes et jolies (dimension « Sophistication »). Plus encore, certaines études américaines ont montré que, sans réellement le savoir, les gens avaient tendance à déménager vers les villes dont ils se sentaient le plus proche en termes de personnalité.
Parfois même, la ville peut façonner la personnalité, voire l’exacerber pour les nouveaux habitants. Les analyses en termes de capital marque et de personnalité montrent bien l’importance de ces nouvelles approches qui offrent un autre regard sur la conception des stratégies d’attractivité fondées sur des facteurs clés attrayants pour l’ensemble des cibles : pas seulement les touristes, mais toutes les parties prenantes créatrices de valeur. La croissance des logements et/ou des prix pourrait alors s’expliquer en partie par la mise en œuvre d’une stratégie marketing globale d’attractivité et l’exploitation d’un capital symbolique.
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Sources : « Is Virginia for Lovers ? Geographic variation in adult attachment orientation », Chopik W. J. & Motyl M. (2017), Journal of Research in Personality, 66, 38-45. « Les villes ont-elles une personnalité ?», Bartikowski B., Merunka D., Ouattara A. et Valette- Florence P. (2009), Revue française de gestion, (7), 49-64.
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