Tout est parti d’un congé locatif pour vente délivré par un professionnel immobilier mandaté par le bailleur (une SCI). Ce professionnel disposait d’un mandat de gestion et d’administration de bien comportant usuellement le pouvoir de « donner tous congés ».
Il est toutefois acquis en jurisprudence qu’un tel mandat général de gestion ne confère pas à l’administrateur de biens le pouvoir de délivrer un congé pour vendre, puisqu’il s’agit d’un acte de disposition (CA Paris 2 mai 2002 ; Cass. 3ème civ., 12 juillet 2006 n°1275 – Administrer déc. 2006 p.70 ; Obs. Vincent CANU).
La locataire, bien décidée à demeurer dans les lieux loués, saisit le tribunal de grande instance de Nice en contestation du congé pour vente au motif que, selon elle, le congé serait nul. Selon cette locataire, l’administrateur de bien ne disposait pas d’un mandat spécial répondant aux exigences de la loi Hoguet, ce qui l’empêchait de lui délivrer un congé efficient.
La locataire faisait notamment valoir que l’agent immobilier ne justifiait pas d’un mandat spécial pour délivrer congé pour vendre et qu’en toute hypothèse, la simple lettre que lui avait adressée la bailleresse le mandatant ne mentionnait pas la durée du mandat et ne comportait pas le numéro d’inscription du mandat sur le registre des mandats.
Fort heureusement la locataire est déboutée de son argumentation par les magistrats niçois, puis par ceux de la cour d’appel d’Aix en Provence (23 avril 2015 n° 2015-268). La Cour de cassation confirme la position des magistrats aixois, et par cette décision, opère un profond revirement de jurisprudence.
Il est établi que la loi dite Hoguet et son décret imposent que le mandat du professionnel comporte une durée et figure (par ordre chronologique) sur un registre coté et relié sans discontinuité. Ce numéro de mandat doit en outre être reporté sur l’original qui reste en la possession du mandant, le tout à peine de nullité du mandat.
La Cour de cassation jugeait que ces dispositions d’ordre public étaient prescrites à peine de nullité absolue, qui pouvait ainsi être invoquée par toute partie y ayant intérêt (Cass. 1ère civ. 25 février 2003, n° 01-00461; Cass. 3ème civ., 8 avril 2009, n° 07-21610).
Dans cet arrêt du 24 février 2017 la chambre mixte de la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence en décidant que les dispositions de la réglementation Hoguet[1], visent la seule protection du mandant dans ses rapports avec le mandataire et que leur méconnaissance doit être sanctionnée par une nullité́, non plus absolue, mais relative.
Il en résulte que le tiers au contrat de mandat qui réclamait ici le bénéfice et la protection des dispositions légales d’ordre public, n’a pu profiter de cette protection et obtenir la nullité du congé pour vente qui lui avait été délivré.
Cet arrêt qui peut paraître anecdotique, s’agissant de la question de la validité d’un congé locatif délivré par un mandataire, est en réalité d’une portée beaucoup plus large pour les professionnels soumis à la loi Hoguet, sécurisant ainsi leurs mandats.
[1] Articles 7 alinéa 1er de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 et 72 alinéa 5, du décret n°72-678 du 20 juillet 1972.