Le mail permet de répondre toujours plus vite aux attentes du client : envois de fiches de biens, de diagnostics, de photos, transmissions d’informations. Cependant peut-on tout faire par courrier électronique ? Quelle est la valeur d’un mail faisant état d’une baisse de prix ? Le PDF d’un mandat signé est-il valable ? L’agent immobilier devra être vigilant sur ces points pour sécuriser son chiffre d’affaires.
Un mandat original
À peine de nullité, le mandat d’entremise doit être établi en autant d’originaux que de parties ayant un intérêt distinct. C’est la règle posée par l’article 6 de la loi Hoguet (n° 70-09 du 2 janvier 1970) qui renvoie à l’article 1325 du Code civil : « Les actes sous seing privé qui contiennent des conventions synallagmatiques ne sont valables qu’autant qu’ils ont été faits en autant d’originaux qu’il y a des parties ayant un intérêt distinct. ». L’article 6 de la loi Hoguet est d’ordre public (en ce sens, notamment, Cass. 1re civ., 12 juillet 2006, n° 04- 19815 ; Cass. 1re civ., 24 avril 2013, n° 11-26876). C’est-à-dire que les parties ne peuvent pas y déroger. Ce point, dans la pratique, ne pose généralement pas de problème à la prise de mandat. Il en est cependant autrement pendant la durée du mandat. En effet, il n’est pas rare, notamment lors d’une baisse de prix, que le client confirme son accord par mail. Mais quelle est la valeur de ce mail ?
Un mail n’est pas un contrat
C’est ce que rappelle la jurisprudence (Cass. 1re civ., 8 avril 2010, n° 09- 12007). Dans cette affaire, un vendeur avait donné par courrier son accord pour vendre un immeuble à un prix déterminé. Le montant de la commission était également précisé dans le courrier. La Cour de cassation casse l’arrêt de l’appel qui avait fait droit à la demande de paiement des honoraires de l’agence, au motif que « la constatation du défaut de contrat écrit interdisait de retenir que l’agent immobilier avait reçu un mandat de vente ». Ainsi si un courrier original ne peut valoir mandat au sens de la loi Hoguet, un mail ne peut pas davantage être considéré comme un avenant régulier. Cela est d’autant plus vrai que le mail ne donne aucune garantie quant à l’identité de l’expéditeur.
Pour finir, rappelons que la sanction du non-respect du formalisme est particulièrement lourde, puisqu’il s’agit d’une nullité absolue qui peut être invoquée par toute partie y ayant intérêt pendant toute la durée de prescription (Cass. 3e civ., 8 avril 2009, n° 07- 21610). Ainsi, la nullité cause non seulement la perte du droit à honoraires de l’agent immobilier mais également la nullité des actes accomplis en vertu du mandat irrégulier tel que la vente par exemple.
La mandat et le PDF
Autre pratique quotidiennement utilisée : le scan. Pour des raisons de commodité et de réactivité, il arrive que le mandat (ou l’avenant) soit envoyé au client et que ce dernier retourne le scan du document qu’il a signé. À l’appui de cette pratique, on pourrait soutenir que l’article 6 de la loi Hoguet renvoie à l’article 1325 du Code civil qui, lui-même, en son alinéa 5, renvoie à l’article 1316-4 du Code civil sur la signature électronique… Bref, pour simplifier, qu’un mandat pourrait être signé électroniquement. Attention, cependant, à ne faut pas confondre signature électronique et signature numérisée.
. La signature électronique est une « clé informatique » sécurisée grâce à un dispositif de création de signature électronique. Elle doit, notamment, garantir l’identité du signataire au moyen d’un certificat électronique. La certification de la signature doit être réalisée par un organisme ayant reçu un agrément ministériel.
. Le scan ou le PDF est une signature numérisée et non une signature électronique. Un document PDF peut être facilement retouché, de sorte que ce format de document ne garantit pas l‘identité du signataire. Scanner une signature revient à la copier. La jurisprudence confirme que la signature scannée ne vaut pas signature électronique. « La seule signature scannée (…) est insuffisante pour s’assurer de l’authenticité de son engagement juridique comme ne permettant pas une parfaite identification du signataire » (CA Fort-de-France, ch. civ., 14 décembre 2012, n° 12/00311 ; en ce sens également, CE n° 351931 du 17 juillet 2013).
En conclusion, le mail et le scan de documents permettent de communiquer plus rapidement avec les clients mais ils n’autorisent pas à s’affranchir valablement du formalisme relatif à la conclusion d’un contrat.
A RETENIR
– Le mail et le scan sont des outils commerciaux.
– Une signature scannée n’a pas la valeur juridique d’une signature manuscrite ou électronique.
– Formaliser les mandats et avenants avec des signatures manuscrites et originales.
– Établir autant d’originaux que de parties.
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