« Le Brexit améliore encore les conditions d’accès au marché pour les acquéreurs Français », Michel Mouillart, Professeur d’Economie à l’Université de Paris Ouest, FRICS

Michel Mouillart, professeur d'Economie à l'Université de Paris Ouest, FRICS revient sur les conséquences du Brexit sur le marché immobilier. Entretien exclusif avec Ariane Artinian.

Michel Mouillart, Professeur d’Economie à l’Université de Paris Ouest et spécialiste de l’économie immobilière. aussi à l’initiative de l'observatoire CLAMEUR - Les droits d'utilisation publicitaire ou d'éditions sont protégés, contacter l'auteur - www.lebedinsky.com - Tel : +33607660257

JDA : Quel va être l’impact direct du Brexit sur le marché immobilier français?

Michel Mouillart : Contrairement aux craintes qui se sont souvent exprimées, il devrait être  extrêmement limité. Ce ne sera pas la dépréciation de la livre qui va pousser massivement les anglais à acquérir une résidence secondaire en France, dans le Périgord ou en Dordogne par exemple. Les difficultés économiques que va traverser la Grande Bretagne vont en outre se traduire par une diminution des pensions de retraite et il n’est pas certain que tous les anglais installés depuis longtemps en France vont rester. Enfin, je ne crois pas non plus à un retour massif des expatriés qui donnerait un coup de fouet au marché parisien. Le Brexit, ce n’est certainement pas que cela.

JDA : C’est quand même une nouvelle anxiogène qui peut jouer sur le moral ?

Michel Mouillart : Effectivement, le Brexit en lui-même ne change rien … sauf qu’il renforce le climat anxiogène. D’où une volatilité très élevée sur les marchés boursiers et financiers. Ceci étant, il n’y a pas lieu de redouter pour autant une crise de l’ampleur de celle de 2008. Au niveau macroéconomique, le Brexit peut se traduire par un ralentissement d’un ou deux dixièmes de points de croissance, mais certainement pas par une récession.

JDA : Pourquoi ?

Michel Mouillart : Parce que le système financier a été sécurisé depuis l’affaire Lehman-Brothers. Et surtout parce que les banques centrales vont maintenir leur stratégie de création monétaire facile, d’injection de liquidités dans l’économie en 2016 et en 2017. Ce qui est inquiétant aujourd’hui, c’est que personne ne sait comment l’histoire va se finir pour l’Ecosse ou le Pays de Galle, par exemple. Du coup les investisseurs se protègent encore plus qu’avant le Brexit en acceptant des taux d’intérêt négatifs. Par exemple, le taux de l’OAT à 5 ans était à – 0,376 % le 1 er juillet. Au pire de la crise grecque, en 2015, il n’est jamais descendu sous les – 0,023 % et pendant seulement une semaine. Et rien ne nous dit que nous n’aurons pas bientôt des taux d’intérêt négatifs à 10 ans ! Le 1 er juillet, l’OAT à 10 ans était à 0,157 %. Du jamais vu …

JDA : L’inquiétude générée par le Brexit peut donc alimenter de nouvelles baisses des taux des crédits immobiliers ?

Michel Mouillart : Exactement, la baisse a repris et à un rythme soutenu. Regardez les derniers chiffres de l’Observatoire CSA-Crédit Logement, ils sont éloquents : au mois de juin 2016,  les taux des crédits du secteur concurrentiel se sont établis à 1,6% en moyenne contre 1,77% en mai. Nous avons aujourd’hui des niveaux de taux d’intérêt inconnus jusqu’alors : 3,5 fois moins haut que ceux observés au début des années 2000 ! Cette baisse répercute la faiblesse des taux constatée sur les marchés obligataires et elle exprime des orientations monétaires réaffirmées par les banques centrales à la suite du Brexit notamment. Et pour faire simple, toute baisse du taux de l’OAT à 10 ans se traduit par une diminution du taux des crédits immobiliers de l’ordre d’un tiers : donc pour un taux à 0,390 % en juin (en moyenne), la marge de baisse est encore de l’ordre de 5 à 10 points de base pour les crédits immobiliers.

JDA : Le Brexit est finalement une bonne nouvelle pour les emprunteurs ?

Michel Mouillart : Oui, dans la mesure où les conditions de crédit sont exceptionnelles. Nous pouvons compter sur des taux à 1,5 % dans l’immobilier jusqu’à la fin de l’année (et même  probablement, sur une grande partie de 2017). En bref, le Brexit pourrait être une très bonne affaire pour le marché de l’accession dans l’ancien.

Propos receuillis par Ariane Artinian©byBazikPress©Christophe Lebededinsky

 

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