Bien que ne pouvant rivaliser avec les 308 articles de la loi Macron, la loi Alur et ses 177 articles, est conforme à la production législative française de notre époque. Là ou la loi du 6 juillet de 1989 fixait les modalités des rapports locatifs en 47 articles précis, la loi « Accès au Logement et à l’Urbanisme Rénové » est un ouvrage monumental mêlant recours des tiers et linge de lit, comme sa cousine les autocars et les notaires. Mais ceci ne doit rien au hasard, car ces lois sont, l’une comme l’autre, des loi « sociétales » dont l’objectif va bien au delà de l’établissement d’un cadre réglementaire. Ainsi, si la loi Alur a peu modifié l’exercice de nos professions, elle a fait entrer le monde de l’immobilier dans la sphère de l’économie administrée.
Car ce qui change, c’est la capacité dont s’est doté l’état pour agir directement sur le marché du logement. C’est ainsi que, pour faire baisser les prix de l’immobilier résidentiel, l’exécutif a choisi l’encadrement des loyers, arme de régulation redoutable à la disposition du maire. A Paris, l’objectif est parfaitement atteint, puisqu’il arbitre en faveur des occupants des petites surfaces qui sont pour la plus part de jeunes actifs aux revenus modestes, et ce, au détriment de leurs bailleurs. C’est ainsi que l’état entend modifier les rapports sociaux, en contraignant, plutôt qu’en libérant l’économie. D’autres dispositions comme l’encadrement des honoraires de location, le contrat de syndic type, la normalisation de l’équipement du meublé, ou le bail type, sont aussi contraignantes, mais ont l’avantage de clarifier la relation client, en évitant les abus et la concurrence déloyale de ceux ne respectent pas les règles de droit. Car la complexification favorise aussi la justification de nos rémunérations.
Et il faut bien admettre que l’ensemble de ces contraintes nouvelles n’a pas empêché la reprise des transactions, la baisse des prix et des taux améliorant la solvabilité les primo-accédants, tandis que de nombreux particuliers renonçaient à gérer, louer ou vendre en direct, augmentant la part de marché des professionnels. Pour autant, nos consciences citoyennes ne peuvent que s’élever contre cette folie réglementaire et le corsetage de nos activités. Lorsque l’état se mêle de l’équipement du placard à balais, il faut tout de même s’interroger sur le recul des libertés individuelles. Car, au travers de la loi, le pouvoir politique s’est doté de moyens d’action d’autant plus autocratiques que le CNTGI, qui représente les professionnels de l’immobilier et les consommateurs, ne produit que des avis consultatifs et non contraignants. Et il a suffi de prendre connaissance des premiers décrets pour constater que ses recommandations ne seront pas nécessairement suivies. Ainsi, si l’on veut voir un progrès démocratique dans l’émergence du paritarisme appliqué à tous les secteurs de l’économie, il faut aussi que les professionnels s’organisent d’avantage pour peser avec force sur les négociations futures, au travers de syndicats puissants et combatifs.
La Fnaim et les autres organisations ont parfaitement rempli leur rôle en déposant plusieurs recours devant le Conseil d’État.
Cependant, leur représentativité n’est pas encore suffisante, et de nombreux professionnels ne perçoivent pas l’importance de militer en leur sein, face à un état omnipotent qui se rêve en stratège. Car il ne faut rien attendre d’une éventuelle alternance politique future. Aucun gouvernement ne renoncera plus désormais aux moyens d’action considérables que lui a conféré la loi Alur. ©byBazikPress