Les prévisions de l’INSEE pour l’année prochaine ont surpris la plupart des chefs d’entreprise et plus particulièrement les professionnels de l’immobilier. Comment interpréter les chiffres optimistes de l’institut de statistique de référence, alors que la réalité quotidienne de l’activité de nos entreprises demeure globalement difficile. Un miracle va-t-il se produire ?
Des prix qui résistent
La zone Euro, et a fortiori la France vont entrer en déflation. Il serait donc logique et souhaitable que la baisse des prix s’accélère. Pourtant, les fondamentaux disent le contraire, pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, la solidité de la situation financière des propriétaires les incitera à reporter leur vente et à demeurer patients dans l’attente de jours meilleurs.
La raréfaction de l’offre dans les zones tendues, conjuguée à la résistance des vendeurs dans les zones sinistrées ne permettra pas aux prix de suivre le rythme de la déflation, ce qui revient mécaniquement à ne pas anticiper de gain de pouvoir d’achat immobilier pour le consommateur.
Des conditions d’accès au crédit détériorées
Les taux d’emprunt sont historiquement bas. C’est essentiel, mais cela veut également dire qu’ils ne pourront baisser significativement d’avantage. Or, dans un contexte d’inflation négative à venir, le rapport taux d’emprunt/inflation va mécaniquement augmenter.
D’autre part, l’application de Bâle III au 1er Janvier, poussera d’avantage les banques à réduire leur bilan en terme de financement pour améliorer leur ratio capitaux sur fonds propres. Autrement dit, elles ne prêterons qu’aux riches, ce qui n’est pas le cas de Monsieur Tout le Monde, loin s’en faut.
Des acquéreurs sous pression
Si la croissance est anticipée à 1%, chacun s’accorde à reconnaître que le chômage continuera à progresser. Pas de quoi faire revenir les primo accédants.
De même, le matraquage fiscal battra son plein, tout comme les pertes de pouvoir d’achat des familles qui vont voir les effets conjugués de la modulation des allocations familiales et la réduction du quotient familial sur leurs finances.
Enfin, les professions réglementées qui représentent traditionnellement une large part du bataillon des investisseurs seront en 2015 sacrifiées sur l’autel des lois Macron, Hamon et Touraine.
Si l’on peut saisir une lueur d’espoir du côté des acquéreurs, elle viendra des acquéreurs étrangers bénéficiant des effets de change et de la baisse de l’Euro.
Des loyers stables, voire en hausse
C’est la conséquence du marasme de la construction de logements neufs. Après trois années d’effondrement des permis de construire et la division par trois du marché de la défiscalisation, l’offre de logements à louer va diminuer.
Il faudra également tenir compte de coût accru de l’entretien des logements, de la hausse de la fiscalité locale, des charges de copropriété et de la complexification induite par la loi ALUR, qui devraient inciter les bailleurs à rechercher à restaurer la rentabilité par l’augmentation des loyers, en particulier dans les grandes métropoles.
Des volumes stables
2013 et 2014 ont apporté la preuve que le marché français ne pouvait descendre au deçà de 700 000 ventes. Ce volume correspond à un marché de nécessité, c’est à dire un marché minimum, dont le maintient revêt un caractère relatif, car il aurait du augmenter naturellement sous l’effet de l’augmentation de la population.
De fait, en 2015, ce chiffre devrait être atteint voire augmenter légèrement sous l’effet conjugué d’une légère reprise économique et de la tendance démographique.
La part de marché des professionnels attaquée
C’est aussi un enseignement de 2014 : sur les 700 000 ventes conclues, beaucoup ont échappé aux agents immobiliers.
La part de marché du particulier a augmenté et continuera à augmenter, sous l’effet conjugué de la transformation des habitudes de consommation, liées aux moyens collaboratifs du web 2.0, et au souhait de faire l’économie d’honoraires jugés disproportionnés, en particulier en période de crise.
Les agents immobilier vont donc être d’avantage mis en concurrence avec des modèles low cost, type mandataires ou agences à honoraires réduits, ou avec les notaires qui vont chercher à développer leurs parts de marché dans l’immobilier, pour compenser les effets de la loi Macron.
Il faut bien sur rester prudent en matière de prévision. Gardons à l’esprit que de nombreux éléments macro économiques et géo-politiques peuvent changer la donne, par des effets positifs tout aussi inattendus que ceux d’un baril de pétrole sous les 60 dollars, un Euro durablement faible, ou une OAT historiquement basse.
Ainsi, si les éléments factuels du marché de la vente de logements ne portent guère à l’optimisme pour 2015, il semble tout de même que nous ayons atteint un point bas à partir duquel la moindre stimulation doive produire un rebond, voire une reprise du nombre de transactions. La vraie question est de savoir quand.